Comme chaque premier vendredi du mois, le Bureau of Labor Statistics a publié, il y a quelques jours, son rapport mensuel sur l’emploi aux États-Unis. Cette publication était particulièrement attendue par les économistes et analystes des marchés financiers, et ce, pour deux raisons. Tout d’abord, on se rappellera que les chiffres des créations d’emplois en juillet (publiés début août) avaient été très faibles, provoquant la colère du président Trump qui n’avait alors rien trouvé de mieux à faire que de renvoyer le directeur du Bureau of Labor Statistics, juste comme cela… parce qu’il n’aimait pas les chiffres. L’institution allait-elle oser publier une nouvelle fois la réalité du marché du travail américain ? Manifestement, elle a osé… au risque que le président américain pique une nouvelle colère et jette à nouveau quelqu’un dehors.
En effet, seuls 22.000 nouveaux emplois ont été créés en août, ce qui est très faible. À titre de comparaison, la moyenne historique se situe plutôt aux environs de 160.000 nouveaux emplois par mois. Au cours des quatre premiers mois de cette année, la moyenne mensuelle avait déjà baissé à 123.000. Mais depuis avril, les créations d’emplois ont plus fortement chuté. Les droits de douane ont (comme prévu…) incité les consommateurs et les entreprises à se montrer plus prudents : les consommateurs achètent un peu moins et les entreprises embauchent un peu moins.
Cela nous amène à la deuxième raison qui rendait ces chiffres importants : le rythme des créations d’emplois est l’un des meilleurs indicateurs de la vigueur de l’économie américaine. Et manifestement, celle-ci ralentit, au point de raviver les craintes d’une récession ? Ce n’est pas encore le scénario central de la plupart des prévisionnistes, mais si cela devait être le cas, les répercussions sur les marchés financiers seraient importantes. On voit en effet que jusqu’à présent, les marchés d’actions se sont contentés d’une croissance molle, les entreprises arrivant malgré tout à accroître leurs bénéfices en comprimant leurs coûts. Mais en cas de récession, cet exercice deviendrait impossible.
Le ralentissement des créations d’emplois ouvre la porte à des baisses de taux de la Fed.
Ce qui est de plus en plus clair, c’est que le ralentissement des créations d’emplois ouvre la porte à des baisses de taux de la Fed. Pour rappel, celle-ci a un double mandat : la stabilité des prix et la maximisation de l’emploi. L’évolution récente de l’inflation ne justifie certainement pas des baisses de taux : elle progresse légèrement et les tarifs à l’importation risquent d’encore la pousser à la hausse dans les prochains mois.
Par contre, le net refroidissement du marché du travail va à l’encontre du deuxième objectif de la Fed, alors même qu’il écarte un peu le risque d’inflation (il sera en effet plus difficile pour les entreprises américaines de reporter les tarifs à l’importation sur leurs prix de vente dans un contexte de croissance faible). Les marchés financiers l’ont d’ailleurs bien compris. Dès la publication des chiffres de l’emploi, l’ensemble des taux d’intérêt se sont détendus sur les marchés, ces derniers anticipant plus de baisses de taux de la part de la Fed.
Ces baisses de taux sont largement souhaitées par Donald Trump. Son vœu devrait donc être exhaussé dans les prochaines semaines (même si cela n’ira pas assez vite à son goût). Mais pour la petite histoire, ces baisses de taux auraient été impossibles si l’emploi ne décélérait pas et si, comme Trump l’aurait voulu, le Bureau of Labor Statistics avait publié des chiffres d’emplois flatteurs. On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre… Même quand on est président des États-Unis.
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