Typhanie Afschrift

“Le problème n’est pas qu’il y a trop de riches. Le problème c’est seulement qu’il y a trop de pauvres”

Typhanie Afschrift Professeure ordinaire à l'Université libre de Bruxelles

Un excellent quotidien économique a récemment titré : “Les sociétés de management contribuent à creuser les inégalités de revenus”. Il déclarait se fonder sur une étude de quelques professeurs ayant étudié les inégalités en Belgique. À vrai dire, on se demande le pourquoi d’une étude sur le lien entre inégalités et sociétés de management. Celles-ci ne sont pas toujours et pas seulement créées dans le but de réduire les impôts, mais aussi les risques de responsabilité civile, de mieux contrôler les cotisations de sécurité sociale, de permettre la collaboration de partenaires dans le management … Mais on doit admettre que la plupart ont notamment un objectif d’ordre fiscal. Dès lors, il est certain que, si cet objectif est atteint, ces personnes auront des revenus nets (les seuls qui comptent pour les gens) plus élevés et qu’il y aura par conséquent une plus forte différence avec ceux qui, quoique moins taxés, gagnent moins.

La conclusion de l’étude aboutit par conséquent à une évidence : tout ce qui échappe, au moins un peu, à la redistribution de revenus concourt à plus d’inégalités. Le but recherché est sans doute, en ce moment où certains partis s’attaquent au système des sociétés de management, de jeter l’opprobre sur celles-ci, parce que les inégalités seraient par nature injustes. Cela est parfaitement faux. Il y a évidemment des inégalités de revenus, et, encore davantage des inégalités de fortune, en Belgique, et pratiquement dans tous les pays où il subsiste une certaine liberté.

Si des personnes ont davantage de revenus que d’autres, c’est parce que, malgré toutes les réglementations et les prélèvements fiscaux et sociaux, chacun conserve une certaine liberté. Nous pouvons choisir de travailler plus ou moins, de profiter de notre vie en nous consacrant à nos passions ou à une activité lucrative. Nous pouvons poser des choix, et parmi eux, certains qui conduisent à s’enrichir, et d’autres qui amènent à s’appauvrir.

Nous avons la chance de vivre dans un système capitaliste, où tout ce que nous percevons, à l’exception des distributions étatiques, est la contrepartie de ce que nous apportons aux autres : des marchandises, des services, du travail, toutes choses dont les prix sont fixés de commun accord pour que la transaction soit gagnante pour les deux parties. Bien sûr, tout cela amène à des divergences de revenus. C’est la conséquence normale de la liberté individuelle, notamment dans le travail, l’une des rares inégalités qui dépend notamment de l’effort et des choix des gens. Et c’est étrangement celle qui est la plus discutée, alors que d’autres différences (de beauté, de talent artistique, de santé…) ne sont jamais critiquées.

Bien plus, on a l’impression que la “lutte contre les inégalités” que l’on souhaite imposer est systématiquement dirigée, non seulement contre “les riches” (notion que l’on s’abstient toujours de définir), mais aussi contre la classe moyenne, confrontée à un système étatique écrasant et qui tente de survivre et de profiter de son travail.

Le vrai problème n’est pas qu’il y a trop de riches mais seulement qu’il y a trop de pauvres. Et en cela, notre système, malgré des armées de fonctionnaires sociaux et des prélèvements de plus en plus élevés, échoue lamentablement. Notre Constitution prescrit l’égalité des droits et il faut absolument garantir celle-ci en supprimant les discriminations qui subsistent. Mais elle n’a jamais dit qu’il devrait s’agir d’une égalité de fait, que les revenus des uns et des autres devraient être identiques, quel que soit leur travail, leur ingéniosité, leur créativité et leur productivité. Ça c’est l’égalitarisme, et celui-ci est toujours une injustice.

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