Eddy Caekelberghs
Politique : il n’y a pas d’amour heureux
L’amour et la politique ont quelques similitudes et quelques maladies communes. Ainsi, comme la chute et la trahison, la rupture en politique est chose commune à l’amour.
Ainsi, de la passion amoureuse – ou sexuelle – qui engendre souvent la violence des (res)sentiments ou l’abandon de toute précaution pourtant salvatrice. Ainsi, de ces alliances politiques impossibles sur le fond mais dont l’attrait du pouvoir maquille les travers ontologiques. Ainsi, des amours tarifés – ou sous excitant chimique – qui s(t)imulent le plaisir en maquillant les (res)sentiments sous d’innombrables simagrées. Je vous laisse imaginer les pendants politiques possibles.
Aussi, en France (comme, à certains égards, chez nous) faudrait-il retrouver le véritable sens de la relation respectueuse à l’autre. Crier, à tout rompre, qu’il faudrait nier l’existence des électeurs extrémistes, c’est se mettre la tête dans le sable et casser le thermomètre pour nier la fièvre. Ainsi, de ce prédicat douteux qui voudrait que la majorité gouvernementale peut se permettre de nier l’opposition (parfois pas si minoritaire) voire de passer en force, sans débat ni préliminaires !
Mais il est vrai que la France (à l’instar de bien d’autres nations du monde) voit évoluer ses institutions de manière chaotique. Que dire des Etats-Unis et de leur course présidentielle où le débat porte sur la santé de l’un et l’attentat contre l’autre. Que dire de l’Union européenne divisée entre son actuel principal opposant hongrois, Viktor Orban, qui la préside avec force pour six mois et Charles Michel qui la préside aussi pour quelque temps encore. En ligne de mire ? Les (dés)amours russes! Ainsi d’un Royaume-Uni qui fut violé par une droite maladroite et un populisme UKIP dépravé mais qui regrette de s’être donnée corps et biens (surtout !) aux sirènes des amours brexitaires.
Ce qui nous ramène au système bien connu chez nous de coalitions “à la belge”, parfois hétéroclites et décriées, mais au moins basées (normalement) sur l’espace discuté et raisonné des avancées réalistes ou, en tout cas, possibles.
Les régimes hyper-présidentiels – tels que la France de la Ve république voulue par de Gaulle – doivent admettre que le modèle “lubrifiant” – sous couvert “d’efficacité”, voire adossé au plébiscite des foules – a vécu. Certes, les Français ne voulaient plus d’une république des partis, la quatrième, avec ses cortèges de coalitions plus instables les unes que les autres. Avec un nombre insoutenable de chutes, ruptures, adultères politiques voire de divorces plus douloureux les uns que les autres.
Mais la stabilité réclame l’examen minutieux des moyens en regard des ambitions, des rapports de force et d’ouvertures possibles, des pratiques et objectifs acceptés par les parties, sans tabous pour les “ménages” à plus de deux ! Voilà pourquoi, sans doute aussi, les fameuses périodes – tant brocardées par nos voisins français – où nous autres, Belges, laissons mûrir nos coalitions possibles, sont peut-être finalement plus productives que les déclarations d’amour rapides et intempestives que l’on cherche à nous faire prendre pour des programmes.
L’amour et la politique – au temps de la chose – méritent mieux que les gestes maladroits des jeunes amants inexpérimentés et certainement plus que les baisers volés. André Breton disait : “Le portrait d’un être qu’on aime doit pouvoir être non seulement une image à laquelle on sourit mais encore un oracle qu’on interroge.” En politique, cela porte un nom : crédibilité ! z
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