Paul Vacca

Hollywood peut-il sauver la planète ?

Paul Vacca Romancier, essayiste et consultant

Hollywood s’intéresse-t-il au reste du monde autrement que pour y exporter ou tourner ses films ? Il semblerait que cela lui arrive parfois.

Par exemple, lors du Hollywood Climate Summit, une conférence annuelle organisée depuis 2020, où les professionnels du cinéma et de la TV se réunissent pour s’interroger sur le rôle qu’ils peuvent jouer collectivement face aux enjeux climatiques.


Comme le soulignent les jeunes fondatrices de cet événement, la scénariste Allison Begalman, la réalisatrice Heather Fipps et la productrice Ali Weinstein, toutes ces industries produisent des œuvres que des milliards de personnes regardent. Et que font-elles de toute cette attention au profit de la planète ? L’enjeu du Hollywood Climate Summit qui s’est tenu cette année du 25 au 28 juin a été de s’interroger sur les façons de mieux intégrer les problématiques de climat dans leurs récits et leurs productions.


Dans une tribune publiée dans le Hollywood Reporter, intitulée How Hollywood Can Make Climate Stories Sexy, Begalman, Fipps et Weinstein tirent les grands enseignements de ce qui est sorti des nombreux groupes de réflexion organisés lors de ce sommet. Elles y livrent les moyens par lesquels l’industrie du divertissement peut rendre les thèmes environnementaux plus “sexy” : un guide pour un climate storytelling efficace.


Elles notent tout d’abord que la mise en avant des thématiques environnementales ne doit jamais se faire au détriment de la mission de ces industries d’entertainment qui est précisément de divertir. D’autant que sacrifier une bonne histoire pour un message lourdingue est à la fois inefficace et suicidaire. Car les spectateurs savent très bien reconnaître ce qui relève de la “propagande” et ce qui présente un réel intérêt narratif. Il est tout à fait possible, notent-elles, d’aborder ces questions tout en restant de purs divertissements comme le démontrent Glass Onion : Une histoire à couteaux tirés, True Detective, Ted Lasso, Grey’s Anatomy, Dont Look Up ou Twisters (à sortir le 19 juillet).


Ensuite, les autrices de la tribune soulignent l’importance désormais de sortir des schémas narratifs défaitistes ou apocalyptiques qui furent longtemps la loi du genre. Et qui ont des effets paralysants sur l’action. En effet, à quoi bon bouger si tout est foutu ? Elles préconisent au contraire de produire des récits “aspirationnels” qui offrent des perspectives, des moyens d’action, de l’inspiration à travers des héros qui agissent pour la planète. Bref, de développer une dynamique positive pour le climat comme peuvent le faire Wall-E, le robot de Pixar qui apprend aux humains à être plus humains, ou Erin Brokovich qui, seule contre tous et le système, se bat d’arrache-pied pour un monde meilleur.


Et, enfin, elles engagent les “climate storytellers” à s’extirper des récits manichéens – opposant les générations ou le camp du Bien et du Mal – en cherchant au contraire à exprimer la nuance et la diversité des points de vue. Car il y a urgence à dépolariser la question du climat. C’est d’ailleurs le problème qu’a rencontré le film Don’t Look Up, cette comédie climatique efficace et divertissante mais aussi terriblement clivante, confortant finalement chaque camp dans sa bulle pour un résultat finalement contreproductif.


Les “récits climatiques” doivent au contraire faire bouger les lignes : interconnecter les individus que les destins opposent ou faire que des points de vue différents puissent malgré tout s’aligner sur des besoins communs. Certes, aucun récit ne peut sauver le monde. Mais chacun peut construire la perspective d’une réconciliation possible.

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