Amid Faljaoui

Surpris d’être en vie après tant de tempêtes économiques et financières ?

Avec une météo indigne d’un mois de juin et des nouvelles qui sont bien souvent anxiogènes, il faut parfois avoir le cœur bien accroché pour ne pas sombrer dans une forme de grisaille morale.

C’est à ce moment-là qu’il faut savoir prendre du recul. Non pas pour jouer à l’autruche et dire que « tout va bien dans le meilleur des mondes », ce serait faux et injuste à l’égard des plus fragiles d’entre nous, mais juste aussi se dire qu’il faut parfois faire un distinguo entre l’écart et le gain comme le préconise le coach américain Dan Sullivan.

L’écart mesure la distance entre nos souhaits et la réalité. Nous avons tous tendance à nous braquer sur cet écart, ce qui est normal, humain, et instinctif. Le gain représente une forme de sagesse. Il permet de se focaliser sur ce qu’on a gagné ou évité de perdre. C’est une démarche moins glorieuse, c’est pourtant une des clés du succès. Plutôt que de se lamenter, focalisons nous sur les gains, nos petites victoires, qui cumulées jour après jour font la différence.

D’abord, souvenons-nous qu’en 4 ans, nous en avons traversé des crises. Comme l’écrivent joliment mes confrères du journal français Les Echos, nous sommes « comme des marins surpris d’être en vie après une effroyable tempête ». La crise du covid semble loin et pourtant, nous l’avons traversée. Avons-nous oublié que pour la première fois de l’Histoire, nos dirigeants ont fait passer nos vies avant l’économie. C’est la première fois de l’Histoire qu’on a exigé des entreprises de fermer leurs portes pour sauver des vies ?

De même, nous avons traversé la crise énergétique liée à l’invasion de l’Ukraine. Nos parents qui ont vécu la crise pétrolière de 1973 avec un quadruplement du prix du pétrole ont vu la Belgique et tous les autres pays sombrer dans la récession. Cela n’a pas été le cas en Europe, à part en Allemagne et encore c’était une récession mineure de – 0.3%.  Nous avons aussi assisté à une série de faillites bancaires aux Etats-Unis, des banques régionales certes, mais souvent plus grosses que des banques nationales européennes. Nous avons également vu une très banque européenne, suisse en l’occurrence, l’énorme Crédit Suisse tomber en faillite et être sauvée en quelques jours par un rachat forcé de son concurrent UBS. Contrairement à ce qui s’est passé en 2008 avec la faillite de la banque Lehman Brothers. Et il n’y a pas eu de panique bancaire ni de contagion à l’économie réelle. Fantastique, non ?  

N’oublions pas la hausse des taux d’intérêt, brutale et rapide. Dix hausses de taux en peu de temps rien qu’en zone euro, ce n’est pas rien. Oui, il y a eu des craquements, oui, le secteur immobilier tire la langue. Mais, avant quand l’immobilier toussait, le reste de l’économie se prenait une pneumonie, ce n’est plus le cas aujourd’hui.

C’est vrai que cette résistance inattendue de l’économie mondiale est en partie due à l’intervention de l’Etat comme le rappelle aussi le journal Les Echos. Tantôt pour protéger le pouvoir d’achat des ménages, tantôt pour éviter un effet domino. Le prix payé pour cette résistance, c’est l’explosion de notre dette publique. Autrement dit, le report de la charge d’intérêt sur la génération suivante. Mais, avait-on un autre choix, sauf à laisser des gens sur le carreau ? Après les élections, la soutenabilité de notre dette publique et la manière de la réduire progressivement s’invitera donc à la table des négociations.

Pour l’heure, ce n’est pas le sujet. En période électorale, on ne parle pas des sujets qui fâchent les électeurs. Les politiques, eux, ont compris de longue date qu’il ne faut pas se braquer sur l’écart, mais voir uniquement le gain. Surtout à court terme. C’est normal et cynique à la fois, l’électeur de demain n’arpente pas les marchés du week-end. Je ne peux pas lui serrer la main, ni lui refiler mon programme électoral. Pire encore, comme cet électeur de la génération suivante n’est pas encore né, comment pourrait-il voter pour moi ? Voilà comment j’explique la préférence des politiques pour le court terme. Et vous, vous en pensez quoi ?

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