Bruno Colmant

En 2024, la Belgique a rendez-vous avec elle-même

Bruno Colmant Economiste. Professeur à la Vlerick School, l’ULB et l'UCL.

Il est de coutume d’annoncer que chaque élection sera la plus décisive. Et pourtant, celles de 2024 seront essentielles, car le pays est devant de multiples choix.

Or, une chose qui me frappe de plus en plus, c’est l’absence d’un projet politique pour notre Royaume, qui fêtera son bicentenaire dans moins de 10 ans. Et que fêterons-nous d’ailleurs, sinon une stabilité institutionnelle de deux siècles, certes ébranlée par la question royale entre 1945 et 1950 ?

Mais qu’aurons-nous accompli ? 4 cinquantenaires ?

Car lorsque l’on regarde notre pays dans les yeux, à hauteur d’homme, les défis sociétaux sont immenses, mais sont occultés, comme si nos dirigeants n’étaient pas capables d’en tirer quelques synthèses.

Aurons-nous mis en œuvre un plan pour combattre l’exclusion, la pauvreté et la précarité ? Aurons-nous réduit le chômage dans certaines zones autrefois industrielles ? Aurons-nous renouvelé notre enseignement et nos réalités professionnelles pour faire face au défi de l’intelligence artificielle ? Aurons-nous mis en œuvre un plan de transition énergétique ? Quels seront notre adhésion et notre consentement à un projet écologique de qualité, très éloigné des récents égarements ? Aurons-nous trouvé un dialogue avec les différentes communautés ?

Ou au contraire, continuerons-nous à naviguer au gré des soubresauts politiques de certains, réduisant ainsi le débat politique à des querelles personnelles, sans assumer nos responsabilités ?

Le risque, c’est de voir une Belgique qui vieillit mal, perdant peu à peu les attributs de son État social. Un pays qui laisse son système éducatif se détériorer et néglige la réhabilitation de son personnel, y compris celui des soins à la personne. Le risque, c’est de se laisser guider par des mouvements musclés ou populistes, se perdant dans un nationalisme ou un régionalisme décomplexé et arrogant. Le risque, c’est de méconnaître la réalité d’une population décrochée, avec la fracture sociale qui ne cesse de s’élargir. Le risque, c’est de devenir une société cloisonnée, fragmentée en bons et mauvais quartiers, où la délinquance prospère au rythme de la désintégration de la citoyenneté.

La Belgique fait face à des défis sociétaux majeurs et à une absence de vision politique claire. Cependant, cela ne signifie pas que tout est perdu. Au contraire, en reconnaissant ces problèmes et en exprimant notre désir de changement, nous posons les bases d’un avenir meilleur. Il est temps de transcender les clivages politiques, de promouvoir la tempérance et la solidarité, et de travailler ensemble à la création d’un projet de société ambitieux. Si nous parvenons à unir nos forces pour lutter contre l’exclusion, la pauvreté, la précarité et pour promouvoir une transition énergétique et écologique, alors nous pouvons envisager un avenir plus lumineux pour le Royaume. Cela nécessitera un engagement sincère de la part de nos dirigeants et de chaque citoyen, mais cela en vaudra la peine pour les générations futures. En fin de compte, nous avons le pouvoir de forger un avenir où la Belgique se distingue non seulement par sa stabilité institutionnelle, mais aussi par sa vision, sa solidarité et sa prospérité partagée.

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