Devenir propriétaire, un rêve impossible pour les jeunes Belges

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© Getty
Amid Faljaoui

Le premier poste de dépense contrainte d’un Belge, c’est son logement. Or s’il a toujours été prêt à se serrer la ceinture pour se payer son Home Sweet Home, pour la jeune génération cela risque non pas d’être plus difficile ou plus compliqué, mais tout simplement inaccessible.

Dans le dernier livre, la guerre des intelligences au temps de ChatGPT, le docteur Laurent Alexandre fait remarquer que la plupart de nos politiques sont analphabètes en matière de nouvelles technologies. Ils n’ont pas compris que si eux vivaient encore avec la temporalité du XIXème siècle, le monde externe, celui des nouvelles technologies, allait très vite. Si vite qu’il ne leur laissait aucune latitude pour s’adapter.

A cela j’ajouterai également l’inculture économique assez généralisée au sein du monde politique.  Une cécité face aux réalités économiques dues à un emprisonnement au sein d’idéologies parfois mortifères pour les plus jeunes générations. Et celles-ci vont devoir dire adieu à un rêve. Le logement va en effet devenir inaccessible pour beaucoup de Belges. Et surtout pour les jeunes – ceux qu’on appelle les primo-accédants. Pas plus difficile ou plus compliqué, juste inaccessible. La différence est de taille. On sait qu’aujourd’hui, environ 70% des Belges sont propriétaires de leur logement. Sauf à Bruxelles où c’est plutôt le rapport inverse. La grande majorité des habitants y sont locataires vu le prix du mètre carré.

Mais à qui doit le fait que ce rêve de devenir propriétaire s’éloigne un peu plus chaque jour pour les jeunes générations ? A la hausse des taux d’intérêt ? Les taux hauts sont censés casser l’inflation, mais ils cassent en même temps le moral des candidats acheteurs qui voient leur mensualité grimper de manière déraisonnable. Les prix de l’immobilier qui se tassent sur certains segments ou dans certaines régions ?  Le tassement n’est pas assez important pour compenser la hausse de la mensualité.

Il faudrait en réalité une vraie baisse des prix, mais le marché ne réagit pas de la sorte. Les vendeurs ne veulent pas vendre, car ils estiment que le prix obtenu sera bradé et les acheteurs ne veulent pas acheter, car ils espèrent que les prix vont baisser. Le résultat est que la baisse a lieu, mais elle est étalée sur plusieurs années. Il n’y a donc pas de chute brutale qui pourrait être une opportunité pour la jeune génération. De plus, c’est vrai que le prix du logement neuf a eu tendance à augmenter à cause des coûts de la construction qui suivent une pente ascendante. Et que le marché secondaire, celui du logement ancien, est lui aussi soumis à une pression. Ne serait-ce que parce que la majorité des logements en Belgique sont des passoires thermiques. Or ces passoires thermiques doivent être adaptées rapidement, sinon ces logements ne pourront bientôt plus être loués, ni même vendus.

Telle est la volonté politique. Si c’est pour de bonnes raisons, soit lutter contre le réchauffement climatique, le jeune accédant à la propriété n’a pas les moyens de payer ces travaux de rénovation ou d’isolation. Surtout si la banque lui demande d’ajouter ces travaux dans son crédit immobilier. De quoi rendre l’équation du financement encore plus complexe. D’autant plus que les banques ne prêtent plus 100% du crédit comme elles le faisaient auparavant. Aujourd’hui, les jeunes candidats à l’achat doivent mettre environ 20% de fonds propres. Des fonds qu’ils n’ont souvent pas, sauf si leurs parents ont les moyens de leur donner un coup de pouce.

Et même lorsque toutes les conditions sont réunies, encore faut-il qu’il y ait des logements à acheter.

Les promoteurs qui décident de construire plus de logements neufs sont bloqués par la difficulté à obtenir des permis de bâtir. Leur modèle économique est aussi chamboulé par la hausse des coûts de la construction et des taux d’intérêt. Ce qui fait que l’offre doit trouver une demande solvable.

Le premier poste de dépense contrainte d’un Belge, c’est son logement. Et s’il a toujours été prêt à se serrer la ceinture pour se payer son Home Sweet Home, la jeune génération voit néanmoins s’éloigner son rêve à grands pas. Avec le danger que cela risque de créer une fracture entre les générations. Un danger encore trop souvent ignoré, à tort, par les politiques. Or les jeunes pourraient se dire légitimement que les anciens – leurs parents en réalité – leur ont non seulement laissé une dette publique himalayenne, un environnement dégradé, des pensions non financées. Mais qu’en plus, ils leur ont fermé la porte de l’accès à la propriété. Merci qui ?

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