Amid Faljaoui

Bon d’État: le seul vrai gagnant de cette ruée irrationnelle, c’est le ministre des Finances

Les épargnants belges sont excités, en ce moment, par le fameux bon d’État qui rapporte du 2,8 % net. La preuve, en moins de 4 jours, ce bon d’État a déjà rapporté 16 milliards d’euros dans les caisses de l’État fédéral et ce n’est pas fini.

En effet, comme la souscription s’arrête ce vendredi 1er septembre, il est probable que ce bon d’État rapportera au final 20 milliards d’euros. Je ne vous le cache pas, tout le monde m’en parle, à croire que c’est le seul sujet de conversation en ce moment. Mais cela montre au moins une chose, les Belges en ont marre de leurs livrets d’épargne qui ne rapporte pas grand-chose et ils ont sauté comme un seul homme sur ce bon d’État avec un rendement net de 2,8 %.

La question que l’on me pose aussi souvent : c’est est-ce une bonne affaire ? Et là, je risque de décevoir : oui, c’est une bonne affaire, mais surtout pour le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem. Son échec, c’est la réforme fiscale. Il n’avait que cela à faire durant toute sa législature, et il a réussi à rater complètement cette réforme fiscale, qui finalement n’aura pas lieu sous cette législature, vu que maintenant , c’est trop tard, la campagne électorale a démarré… Vincent Van Peteghem sauve son image, ou sa peau, sur le plan politique avec le succès éclatant de ce bon d’État. Le monde politique et médiatique qui a une mémoire de poisson rouge ne retiendra que les 18 ou 20 milliards qu’il finira bien par récolter d’ici vendredi.

Quant aux épargnants, c’est plus nuancé. D’abord, il y a des comptes bancaires à terme qui donnent environ le même rendement net que le bon d’État. Renseignez-vous et vous verrez que c’est possible. L’autre alternative au bon d’État, c’est une obligation d’un État solide comme la Belgique, la France ou l’Allemagne. L’avantage, c’est que ces obligations offrent des rendements plus ou moins similaires, mais sur des durées plus longues qu’un an, souvent 4 ou 5 ans. Car il faut le rappeler le bon d’Etat n’a qu’une durée d’un an et après, ben, si les taux d’intérêt ont baissé, ce qui est la thèse actuelle, il faudra bien se contenter d’un rendement plus faible que l’actuel 2,8% net. D’où l’intérêt de sécuriser ce rendement sur quelques années.

Il y a même moyen d’avoir un rendement plus élevé avec des obligations d’État américaines, mais il y a évidemment le risque de change qui peut impacter votre rendement, mais pour l’heure, les prévisions sont plutôt positives pour le dollar.

En résumé, les Belges qui ont mis une partie de leur épargne dans ce bon d’État n’ont pas fait une mauvaise affaire, mais il y a moyen de faire un peu mieux et, cerise sur le gâteau, pendant plusieurs années et sans risque.

L’autre remarque qui m’a sauté à l’esprit, c’est que le montant moyen souscrit par les Belges pour ce fameux bon d’État est de 34.000 euros ! C’est quand même pas mal pour un pays qu’on dit perclus de dette. Cela accrédite la thèse que l’État belge est pauvre, mais que ces citoyens sont riches. Mais c’est à nuancer. En effet, quand on sait que sur les 300 milliards d’euros qui dorment sur les livrets d’épargne, 50% de ces 300 milliards d’euros sont détenus par 12% des Belges. Cela me fait dire qu’en réalité, cette ruée sur le bon d’État – surtout au vu du montant moyen de 34.000 euros – est le fait d’une petite frange aisée de la population.

Et ce qui est aussi dommage, décidément on va me cataloguer de râleur à la fin de cette chronique, c’est que tout cet argent récolté (les fameux 16 milliards)  vont vers de la dette publique, alors que cet argent aurait mieux fait d’être dirigé vers les entreprises et donc vers l’innovation. Mais bon, le succès n’aurait pas été le même, car le Belge déteste le risque et cela n’aurait pas marché sans un grand incitant fiscal. Mais comme les caisses de l’État sont vides, le bonus fiscal n’aurait quand même pas pu être mis en place…

Donc, en résumé, et sans doute de manière injuste, je dirai que le seul et vrai gagnant de ce fameux bon d’Etat, c’est le ministre des Finances qui vient de sauver sa carrière politique après le flop monumental de sa réforme fiscale. Nous avons tous sauvé le soldat Vincent Van Peteghem, c’était notre BA collective de l’année.

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