Amid Faljaoui

Antidiabétique : peut-on vendre 350 dollars un médicament qui en a coûté 5 ?

La question du prix de vente des produits pharmaceutiques grand public suscite actuellement des interrogations, notamment autour de certains antidiabétiques tels que l’Ozempic.

Cette question n’est pas seulement soulevée par des organisations non gouvernementales, des syndicats ou des partis politiques d’extrême gauche, mais également par des scientifiques américains, britanniques et des représentants de Médecins sans frontières. Une étude récente publiée dans la revue scientifique JAMA a révélé que le coût de production de l’Ozempic, produit phare du laboratoire danois Novo Nordisk, est inférieur à 5 dollars. Cependant, son prix de vente varie de 80 à 353 dollars pour une boîte d’un mois selon les pays.

Cette disparité de marge bénéficiaire peut choquer à première vue. Pourquoi un produit de santé publique dont le coût de production est aussi bas se retrouve-t-il sur le marché à des prix aussi élevés ? Cette constatation a naturellement suscité l’indignation de certains responsables politiques, en particulier aux États-Unis, qui ont appelé à une baisse des prix de l’Ozempic.

Les entreprises pharmaceutiques concernées défendent leur position en soulignant que le calcul du prix de revient d’un médicament ne devrait pas se limiter à son coût de production. En effet, le développement d’un nouveau médicament nécessite en moyenne 15 ans avant sa commercialisation. Le coût de recherche et développement (R&D), qui s’élève en moyenne à un milliard de dollars par médicament, ainsi que les nombreux échecs lors des essais cliniques doivent également être pris en compte. Les laboratoires soutiennent donc que, bien que le coût de production puisse sembler faible, il est nécessaire de considérer l’ensemble des investissements engagés pour les médicaments qui ont réussi à passer les phases finales des essais cliniques.

Cependant, cette justification ne dissipe pas toutes les interrogations. Certains observateurs soulignent le risque de concentration du marché pharmaceutique, avec seulement quelques grandes sociétés contrôlant une part significative du marché des antidiabétiques et des coupe-faim dérivés. Cette situation, bien que ne constituant pas un monopole stricto sensu, s’apparente davantage à un oligopole, limitant potentiellement la concurrence.

En outre, cette dynamique économique soulève des questions éthiques et sociales. Faut-il accorder aux laboratoires pharmaceutiques une totale liberté dans la fixation des prix de vente, même si cela se traduit par des marges bénéficiaires importantes ? Est-ce là le prix à payer pour garantir l’accès à des produits pharmaceutiques efficaces, ou bien cela risque-t-il de conduire à une exploitation excessive des consommateurs ? Cette interrogation renvoie à un débat plus large sur le rôle des entreprises dans la société et sur la régulation des marchés, notamment dans le domaine de la santé.

Dans cette complexité, trouver un équilibre entre les intérêts commerciaux des entreprises pharmaceutiques et les impératifs de santé publique reste un défi. Cela nécessite une réflexion approfondie sur les mécanismes de fixation des prix, ainsi que sur les politiques réglementaires visant à garantir un accès équitable aux médicaments essentiels pour tous.

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