Vraiment intéressant d’investir dans une batterie Tesla à domicile?
Tesla lance la batterie à usage domestique en Belgique. Le fabricant américain cible surtout les propriétaires de panneaux solaires. Mais le Powerwall serait aussi chaudement recommandé pour ceux qui n’en ont pas. Cela tient-il réellement la route ?
Le Tesla Powerwall est une batterie domestique qui stocke l’électricité, qu’elle provienne des panneaux solaires ou du réseau électrique classique. Eneco est pour l’instant l’unique vendeur au Benelux, mais les acheteurs n’ont pas à être nécessairement client chez ce fournisseur d’énergie pour en profiter.
Depuis le début de cette année, les personnes intéressées peuvent s’inscrire pour commander une telle batterie. Plus de 1000 Belges l’ont déjà fait et les premières installations ont pu débuter en mars.
“Nous passons au préalable sur place pour examiner le système des panneaux solaires”, explique Mark Van Hamme, porte-parole ad interim chez Eneco. “Ensuite, nous vérifions quelle est la meilleure solution. Dès que le consommateur a donné son approbation, nous venons installer la batterie. L’installation d’un Powerwall coûte entre 5.900 et 7.700 euros, TVA de 21% incluse. Le prix dépend de différents facteurs, comme la combinaison avec de nouveaux panneaux solaires ou la compatibilité du convertisseur.” L’âge de l’habitation joue également: si elle a plus de dix ans, la TVA s’élève à 6% au lieu de 21%. Le prix se situe dans ce cas entre 5.170 et 6.745 euros.
Mais cet investissement est-il vraiment utile ? Nous avons posé cette question à Kenneth Van den Bergh, ingénieur civil et chercheur dans le cadre d’un doctorat à l’Institut de l’Energie de la KU Leuven.
Vous avez des panneaux solaires
Pour son calcul, Van den Bergh s’est basé sur la consommation en électricité moyenne d’une famille composée de deux adultes et d’un enfant: 3.500 kilowattheures (kWh) par an. Leur habitation est dotée de panneaux solaires avec une puissance installée de 4 kilowatts. Avec un coefficient de charge de 10% – ce qui signifie que les panneaux solaires produisent à pleine capacité pendant 10% du temps – il génèrent environ 1.500 kilowatts par an. En général, on en consomme 30% immédiatement au cours de la production, ce qui revient à 1.050 kWh. Pour 70% du temps, la famille est donc encore dépendante du réseau.
Si la famille a un compteur ordinaire, qui tourne à l’envers si l’installation produit de l’électricité, alors la batterie Tesla n’est pas rentable.
Sans panneaux solaires, la famille paierait environ 1.000 euros par an pour son électricité. En Flandre, les propriétaires de panneaux solaires paient le tarif ‘prosommateurs’. Il s’agit de frais forfaitaires qui leur sont facturés pour l’injection d’électricité produite soi-même sur le réseau. Le montant varie légèrement en fonction du gestionnaire de réseau, mais pour l’installation de 4 kilowatts, une famille flamande doit tenir compte de 400 euros par an environ. Les familles wallonnes et bruxelloises ayant des panneaux solaires ne paient pas ces frais supplémentaires.
“Si la famille a un compteur ordinaire, qui tourne à l’envers si l’installation produit de l’électricité, alors la batterie Tesla n’est pas rentable”, dit Van den Bergh. “Elle reçoit dans ce cas autant pour l’électricité qu’elle injecte sur le réseau que ce qu’elle paie pour le courant qu’elle prélève. De ce fait, il n’y a pas d’économie de coût. La famille peut toutefois envisager d’échanger son compteur électrique contre un compteur bidirectionnel. Il ne tourne pas à l’envers, mais mesure de manière séparée combien est injecté en brut et combien est prélevé en brut.”
“Dans ce cas, vous payez pour le prélèvement brut total d’électricité”, déclare Van den Bergh. “Etant donné que, avec une installation photovoltaïque moyenne, vous prélevez encore toujours 70% de votre consommation directe du réseau, la facture d’électricité annuelle s’élève environ à 700 euros. Ce que vous recevez pour l’énergie injectée est difficile à chiffrer: cela dépend des accords pris avec votre fournisseur. Une batterie domestique peut entraîner une diminution de votre prélèvement brut, ce qui génère une économie de coût. En outre, avec un compteur bidirectionnel, les familles flamandes évitent le tarif ‘prosommateurs’ de 400 euros en moyenne par an. Le gestionnaire de réseau facture toutefois un coût unique pour l’installation (d’au moins 1.000 euros, ndlr).”
Le Tesla Powerwall a une capacité de 3,3 kilowatts et une capacité de stockage énergétique de 6,4 kWh. Selon le fabricant, c’est suffisant pour fournir la plupart des habitations en courant pendant les heures du soir, avec l’électricité générée par les panneaux solaires pendant la journée. Il y a moyen d’installer plusieurs batteries pour pourvoir à un plus grand besoin en énergie. Il est en principe même possible de se déconnecter du réseau électrique. Un tel scénario off grid (hors réseau) nous paraît actuellement encore prématuré, car on a besoin de bien plus d’une seule batterie Tesla pour traverser les sombres mois d’hiver sans panne de courant. En outre, le soutien d’Etat par les certificats verts est alors perdu.
Vous n’avez pas de panneaux solaires
Le délai de garantie du Tesla Powerwall est de dix ans
Selon Tesla et Eneco, la batterie domestique peut aussi être un investissement intéressant pour les personnes qui n’ont pas de panneaux solaires. Grâce à la batterie, il est possible d’emmagasiner l’énergie moins chère pendant les heures creuses et de l’utiliser plus tard au cours des heures pleines. Un compteur à tarif bihoraire doit être néanmoins installé. Cela coûte 300 à 400 euros pour le placement de celui-ci. Mais cet investissement paie-t-il ? “La période de garantie du Tesla Powerwall est de dix ans”, explique Kenneth Van den Bergh. “Si vous payez par exemple 7.000 euros pour l’installation, cela revient à un coût de 700 euros par an.”
“La consommation au tarif de jour d’une famille moyenne s’élève à 1.600 kWh par an. Si vous pouvez faire une transition complète vers le tarif de nuit et que vous désirez économiser en même temps au moins 700 euros par an, la différence entre le tarif de jour et le tarif de nuit doit dans ce cas être de 44 cents par kWh. Et aujourd’hui, c’est loin d’être le cas: la différence de tarif est seulement de 15 à 25 cents. Ce n’est donc pas rentable pour l’instant d’utiliser une batterie domestique pour un arbitrage jour-nuit. En outre, si vous désirez prélever de l’énergie du réseau électrique et la stocker dans la batterie, vous devez encore investir dans un convertisseur supplémentaire (courant continu – courant alternatif). Cela coûte à nouveau 2.000 euros. “Si le Tesla Powerwall devient moins cher dans le futur et que les coûts de l’énergie continuent à augmenter, ces calculs devront être revus.”
Une telle batterie pourrait également être envisagée comme alternative – automatisée et plus silencieuse – au générateur classique en cas de pannes de courant. Mais on peut déjà se procurer un générateur de secours pour moins de 1.000 euros. Et les black-outs qui nous avaient été prédits n’ont – jusqu’à présent – pas eu lieu.
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