Six jeunes sur dix sont prêts à tomber dans le piège de la mule financière
Malgré les campagnes de sensibilisation, les jeunes Belges restent des cibles faciles pour les criminels à la recherche des mules financières. Près de la moitié d’entre eux ignorent même la signification de ce terme, une méconnaissance qui les rend particulièrement vulnérables.
Une mule financière est une personne qui met son compte en banque, sa carte bancaire et/ou son code PIN à la disposition de criminels. Cela peut se faire délibérément, mais aussi de manière involontaire, le résultat de manipulation et d’escroquerie. Les criminels utilisent les comptes des mules pour transférer des fonds obtenus illégalement (par exemple via des opérations de phishing) vers d’autres comptes ou pour retirer cet argent en espèces. Ce mécanisme permet aux fraudeurs de rester dans l’ombre, laissant les mules face aux conséquences juridiques et financières.
“Ces jeunes sont souvent approchés par le biais de promesses de gains rapides et faciles via les réseaux sociaux comme Instagram, TikTok ou Snapchat. Mais aussi par e-mail, voire en personne, par exemple à proximité des écoles, des gares ou dans des endroits où les jeunes ont l’habitude de sortir”, explique Isabelle Marchand, porte-parole de Febelfin, la Fédération belge du secteur financier. “Les cibles sont principalement des jeunes vulnérables qui succombent aux promesses de l’argent facile.”
Une enquête menée par le bureau d’études Indiville pour le compte de Febelfin révèle que plus de six jeunes sur dix, en Belgique, se disent prêts à accepter une proposition de ce type en échange d’une rémunération financière.
Ce constat met en lumière un enjeu majeur pour les autorités et le secteur financier. L’éducation et la sensibilisation des jeunes face à ces pratiques est une priorité. Ces comportements, bien souvent perçus comme anodins par les participants, les exposent non seulement à des poursuites judiciaires, mais ils participent aussi à alimenter un écosystème criminel. Les campagnes d’information devront donc être renforcées pour démystifier l’attrait de telles propositions et mieux protéger les jeunes générations contre ces risques.
Conséquences pénales et financières
À peine un quart des jeunes âgés de 16 à 30 ans comprennent réellement ce qu’est une mule financière. Près de la moitié n’a même jamais entendu ce terme. Cette ignorance rend les jeunes particulièrement vulnérables. “Les criminels rassurent les adolescents en leur affirmant qu’il n’y aura aucune conséquence”, explique Isabelle Marchand, porte-parole de Febelfin. “Mais c’est tout le contraire. Agir en tant que mule financière peut avoir de graves répercussions pénales.”
Être une mule financière est juridiquement assimilé à de la complicité pour fraude et blanchiment d’argent. Cela expose les adolescents et les jeunes qui y succombent à des amendes élevées, à avoir un casier judiciaire, voire à des peines de prison. De plus, les victimes de ces fraudes peuvent exiger des dédommagements de la part des mules.
Sans oublier les risques financiers qui peuvent s’ajouter aux conséquences juridiques. “Les banques peuvent refuser d’offrir des services financiers aux mules reconnues coupables”, précise Isabelle Marchand. “Cela inclut l’octroi de prêts ou même l’ouverture de nouveaux comptes bancaires.”
Quant aux conséquences sur le plan pratique, les criminels obtiennent souvent un accès complet au compte bancaire des mules. Les jeunes risquent ainsi non seulement de ne jamais recevoir la rémunération promise, mais également de voir leur compte entièrement vidé.
L’importance de la sensibilisation
Pour lutter contre ce phénomène, Febelfin poursuit ses efforts de sensibilisation, en ciblant particulièrement les jeunes. L’année dernière, des campagnes sur les réseaux sociaux, des ateliers interactifs dans les écoles et des kits pédagogiques ont été déployés. Parmi les initiatives récentes figure le site internet MoreMoney.be. Les jeunes peuvent s’y informer sur les risques et les pièges liés aux mules financières. Febelfin propose également des brochures destinées à la fois aux jeunes et à leur famille. Ces brochures contiennent des conseils pratiques pour prévenir ce type de fraude.
“Nous voulons que les jeunes comprennent que gagner de l’argent facilement est souvent trop beau pour être vrai”, affirme Isabelle Marchand. “Ils doivent être conscients que les conséquences peuvent être lourdes, non seulement sur le plan financier, mais aussi sur les plans juridique et personnel.”
Tendances et perspectives
L’étude révèle que 3 % des jeunes Belges ont déjà été sollicités pour devenir mule financière, et que 39 % d’entre eux ont accepté l’offre. Parmi les jeunes âgés de 16 à 30 ans, ce chiffre atteint 61 %. Bien que ce pourcentage soit en baisse par rapport aux 77 % enregistrés en 2023, il reste alarmant. “Le fait que le nombre de jeunes, prêts à accepter de telles propositions, diminue montre que la sensibilisation porte ses fruits”, conclut Isabelle Marchand.
Febelfin entend poursuivre ses efforts pour réduire encore ces chiffres. “En informant et en renforçant la résilience des jeunes, nous espérons devancer les criminels”, explique la porte-parole. “Dans les faits, c’est souvent la mule financière qui est arrêtée et sanctionnée, tandis que les véritables fraudeurs restent hors d’atteinte. Sans mules, les fraudeurs n’auraient aucun accès à l’argent volé.”
4 conseils pour éviter de tomber dans le piège
Febelfin partage ses recommandations pour prévenir de ces fraudes :
- Soyez vigilant. Ne cédez jamais à une demande de partage de votre carte bancaire ou de votre code PIN. Et ce même avec des personnes de confiance. Les criminels exploitent parfois leurs relations personnelles pour convaincre leurs victimes. Les informations bancaires sont strictement personnelles et ne doivent jamais être divulguées.
- Détectez les signaux d’alerte. Si une offre semble trop belle pour être vraie, c’est qu’elle ne l’est probablement pas. Des propositions telles que “gagnez de l’argent facilement et rapidement” ou “vous n’avez qu’à fournir votre carte bancaire et votre code PIN” sont souvent des pièges. Posez-vous les questions : pourquoi aurait-on besoin de moi pour cela ? Quels sont les risques encourus ?
- Parlez-en. Discutez de ces situations avec vos amis, votre famille ou vos enseignants. En partageant vos doutes, vous pouvez obtenir des conseils de personnes plus expérimentées. Cela vous évitera de tomber dans le panneau.
- Soyez prudent sur les réseaux sociaux. Faites attention aux personnes à qui vous accordez votre confiance en ligne et aux offres que vous acceptez. Vérifiez soigneusement les contacts ajoutés ainsi que les messages ou propositions reçus. Ne faites confiance qu’à des sources connues et fiables.
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