Saga Delon: comment faire pour que sa famille ne s’étripe pas de son vivant ?
Comme le montrent les récents déboires de la famille d’Alain Delon, lorsque la santé d’un parent s’affaiblit il n’est pas rare que d’importants conflits éclatent. Surtout en cas d’héritage conséquent. Il existe pourtant un dispositif qui permet de baliser et faire respecter ses volontés, même quand on est plus en état de le faire. En Belgique, c’est le mandat extrajudiciaire.
“Abus de faiblesse”, “mise en danger”. La guerre fratricide redouble ses derniers jours, par médias et justice interposés, entre les trois enfants d’Alain Delon. Depuis cet été, ce qu’il est désormais convenu d’appeler la saga Delon, prend les atours d’un drame shakespearien fait de trahisons et de drames. Nul n’ignore plus que l’icône du cinéma français de 88 ans a une santé déclinante depuis l’AVC qu’il a eu en 2019.
Il y avait déjà eu cet été l’épisode étrange avec Hiromi Rollin, la dame de compagnie/compagne. Celle-ci avait été éjectée brutalement pour présomption d’abus de faiblesse et de maltraitance de la propriété de Douchy, résidence de l’acteur. Et, depuis début janvier, c’est entre ses enfants que le conflit fait rage.
Il y a d’un côté ses fils, Anthony, 59 ans, et Alain-Fabien, 29 ans. Ils estiment que Delon est manipulé par leur sœur qui leur aurait caché son état de santé. Ils l’accusent également de vouloir le ramener en Suisse pour éviter de payer trop d’impôts sur l’héritage. De l’autre côté, il y a Anouchka, 33 ans. Elle affirme avoir voulu emmener leur père en Suisse pour qu’il puisse continuer à y être soigné. Chacun de ses enfants jure donc vouloir avant tout le protéger.
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Et qu’en pense Alain Delon et dans quel état est-il réellement ? Nul ne le sait vraiment. Car ce que la saga met crûment en lumière, c’est la difficulté de s’assurer une fin de vie harmonieuse quand l’on est plus en pleine possession de ses moyens. Dès lors, comment éviter de se retrouver dans une telle position ? Comment se protéger et éviter de devenir l’objet de tension quand on décline ? Comme souvent la réponse est l’anticipation.
Le mandat de protection extrajudiciaire
En Belgique, il existe une disposition que l’on peut prendre en amont et qui assure autant que possible une fin de vie paisible. C’est le mandat de protection extrajudiciaire. Il permet de protéger son avenir et d’anticiper une incapacité tout en respectant son autonomie et sa volonté. Le tout sans pour autant être placé sous le régime de la protection judiciaire et sans devoir recourir à un juge.
Il prend la forme d’un mandat sur mesure (on peut définir très précisément les pouvoirs de décision transférés) et ne concerne pas seulement que les biens. Il peut aussi servir pour entériner certaines décisions concernant votre lieu de résidence ou encore éventuels soins (le choix d’une maison de repos ou d’un médecin par exemple). Il peut être conclu sous seing privé (entre deux parties sans l’intervention d’un notaire) s’il ne concerne que des biens mobiliers. Néanmoins passer par un acte notarié est tout de même vivement conseillé pour des raisons pratiques. Il couvre par exemple la vente d’un bien immobilier ou une donation. Il permet aussi de mieux ciseler la portée du mandat. Par exemple de donner un mandat que pour certaines tâches plus complexes comme la gestion d’actifs. Le passage par un notaire permet aussi d’éviter des conflits d’intérêts. Ainsi, désigner un partenaire ou ses enfants pour certains points financiers n’est pas toujours conseillé. Vous pouvez aussi choisir plusieurs mandataires pour que les responsabilités soient divisées en fonction des compétences de chacun.
Un mandataire ad hoc
Vous désignez vous-même la ou les personnes de votre choix (l’idéal est donc un mandataire ad hoc) qui pourra vous représenter pour les actes de gestion et d’administration de tout ou partie de vos biens à partir du moment ou vous le souhaitez ou quand vous n’êtes plus capable de le faire.
Cet acte revient à déterminer par qui et comment sera géré votre patrimoine quand vous ne serez plus en mesure de le faire. Depuis le 1er mars 2019, le champ d’application du mandat extrajudiciaire est élargi, précise encore le site des notaires. Il peut porter non seulement sur des actes relatifs aux biens, mais également sur des actes de représentation relatifs aux personnes, et sur des actes de gestion.
En cas de doute de la part par exemple de la banque ou du notaire, il existe la possibilité de faire appel au juge de paix. On conseille également de désigner une personne de confiance en plus du mandataire. Elle pourra à la fois veiller à votre intérêt, servir de médiateur et « surveiller » le mandataire.
Enfin, il est important de signaler que comptes et argent doivent être strictement séparés de ceux de votre mandataire.
Combien ça coûte ?
Depuis le 1er janvier 2024, le montant de l’honoraire pour la rédaction d’un mandat de protection extrajudiciaire s’élève à 211 euros. Le montant s’élève à 320 euros si deux mandataires sont présents. En plus de l’honoraire, vous devez tenir compte d’autres frais annexes tels que les droits d’enregistrement, le droit d’écriture, les frais liés à l’inscription au CRL et éventuellement au CRV, précise le site des notaires.
Quand le faire ?
Il vaut mieux ne pas trop attendre, car on doit être en pleine possession de ses moyens lors de la rédaction d’un tel acte. En cas de démence, par exemple, et sans dispositions au préalable, c’est le système de protection judiciaire qui se met en branle. Et c’est donc un juge de paix qui va désigner quelqu’un. Néanmoins, comme un accident peut arriver à tout âge, faire preuve de prévoyance peut se révéler utile.
Attention aussi au fait que c’est le mandataire qui jugera le moment où vous devenez inapte à gérer vos biens. Pour éviter toute mauvaise surprise, il peut être utile de fixer des modalités comme la présentation d’un certificat médical établissant que votre état.
Enfin, pour être valable, le mandat doit être enregistré au Registre central des contrats de mandat.
Il est important de noter qu’un mandat extrajudiciaire n’est pas forcément définitif. Tant que vous êtes capable d’en exprimer la volonté, vous pouvez changer d’avis. Soit révoquer ou modifier la procuration. S’il ne faut pas motiver sa décision, il est nécessaire de l’enregistrer au Registre. A l’inverse, le mandataire peut lui aussi mettre fin à son mandat.
Méfiance si on est seul
Lorsqu’on a une famille proche ou des personnes de confiance dans son entourage, le mandat de protection extrajudiciaire est souvent une bonne idée. C’est par contre une vraie porte aux abus si on est seul et isolé. Car c’est donner carte blanche à une personne. Et même si elle fait montre d’une grande serviabilité, en faisant vos courses par exemple, cela n’exclut pas la malice. Cette personne peut vite profiter de la situation à vos dépens. Dans ce cas, il est préférable alors de confier la gestion de votre patrimoine à un administrateur externe et se placer sous le contrôle d’un tribunal.
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