Un vide juridique autour du « malus pension » empêche le traitement de nombreux dossiers de retraite. La FGTB tire la sonnette d’alarme, tandis que l’administration se veut rassurante.
Depuis la mi-avril, le Service fédéral des pensions (SFP) a suspendu une partie du traitement des dossiers de retraite, faute de cadre légal clair. Cette situation découle directement de l’absence de législation autour d’un élément-clé de la réforme des pensions : le « malus », une pénalité prévue en cas de départ anticipé. Le syndicat socialiste FGTB évoque un « blocage des pensions » qui pourrait, selon ses dires, concerner des dizaines de milliers de futurs retraités.
Une réforme sans base légale
L’accord de coalition prévoit l’introduction, dès 2026, d’un malus de 2 % par année de départ anticipé avant l’âge légal de la pension (67 ans). Ce taux grimperait à 5 % à partir de 2040. Les travailleurs à temps plein sans interruption – qualifiés de « carrière modèle » – échapperaient à cette pénalité. En revanche, ceux dont la carrière inclut des périodes de temps partiel, de maladie ou de chômage temporaire pourraient voir leur pension réduite jusqu’à 25 %.
Problème : cette mesure, bien que politiquement actée, n’a pas encore été traduite dans la loi. Résultat : le SFP se retrouve dans l’impossibilité de communiquer aux assurés les dates ou montants précis de leur pension. Selon la FGT, les citoyens concernés sont laissés dans l’incertitude, à quelques mois seulement de décisions cruciales concernant leur fin de carrière.
Enjeu juridique dès septembre
La FGTB s’appuie sur la Charte de l’assuré social, qui impose à l’administration de notifier les décisions de pension au plus tard quatre mois avant le départ à la retraite. Les travailleurs censés partir en janvier 2026 doivent donc recevoir une réponse d’ici septembre. Or, sans cadre législatif sur le malus, cette échéance paraît difficile à respecter. « Il y aura un gros problème juridique si rien ne bouge », avertit Selena Carbonero, secrétaire fédérale du syndicat.
Il y aura un gros problème juridique si rien ne bouge
La FGTB demande le retrait pur et simple du malus, qu’elle qualifie de mesure « injuste » et socialement discriminante, notamment à l’égard des temps partiels – souvent occupés par des femmes.
L’administration se veut rassurante
Contacté par l’agence Belga, le Service fédéral des pensions n’a pas confirmé le chiffre avancé par la FGTB, à savoir « des dizaines de milliers » de dossiers concernés. L’administration affirme que le traitement des demandes continue et qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter : « Chacun recevra sa décision de pension à temps ».
Autre difficulté signalée : les outils numériques de référence comme mypension.be ne prennent pas encore en compte les nouvelles conditions de départ anticipé prévues à partir de 2027, ni la définition des périodes de « travail effectif ». Pour combler ce vide, la FGTB a lancé un simulateur alternatif, mypension-arizona.be, utilisé plus de 50.000 fois depuis son lancement.
« Chacun recevra sa décision de pension à temps »
Selon des estimations relayées par le syndicat sur base de chiffres du Bureau du Plan, environ 4 travailleurs sur 10 devront prolonger leur carrière d’un an pour atteindre les nouvelles conditions, tandis que seulement 3 % des travailleurs pourraient encore bénéficier d’un départ anticipé après 42 années de travail effectif.