Alors que l’augmentation des dépenses de pension crée une pression financière quasiment insoutenable sur les comptes de la maison Belgique, Frédéric Van der Schueren, CEO de Belfius Insurance, revient sur les enjeux liés à l’allongement de l’espérance de vie et insiste sur la nécessité de planifier à temps ses années de retraite sur le plan financier.
Alors que l’augmentation des dépenses de pension crée une pression financière quasiment insoutenable sur les comptes de la maison Belgique, Frédéric Van der Schueren, CEO de Belfius Insurance, revient sur les enjeux liés à l’allongement de l’espérance de vie et insiste sur la nécessité de planifier à temps ses années de retraite sur le plan financier.
Comment a évolué l’espérance de vie au fil des générations, et que nous dit cette progression sur notre avenir ?
L’espérance de vie a nettement augmenté. En 1885, elle était de seulement 46,7 ans pour les femmes et 43,6 ans pour les hommes. En 2023, elle atteint 82,3 ans à la naissance. Et pour les personnes âgées de 65 ans aujourd’hui, elle grimpe même à 85 ans, un record historique. Selon une analyse de Belfius sur sa population d’investisseurs, environ une personne sur deux atteindra 90 ans, une sur trois vivra jusqu’à 95 ans, et une sur dix deviendra centenaire. C’est une véritable révolution pour la condition humaine.
Quels facteurs expliquent cette évolution spectaculaire ?
Les raisons sont multiples. Il y a eu une forte diminution de la mortalité infantile. Ensuite, les progrès médicaux majeurs, comme la découverte des antibiotiques, les traitements contre le cancer et les maladies cardio-vasculaires, ou encore les avancées en diagnostic ont joué un rôle clé. Les comportements ont aussi changé : on fume moins, on fait plus d’activité physique et on mange mieux.
Que peut-on attendre pour les décennies à venir ?
De nouveaux risques apparaîtront. La résistance accrue aux antibiotiques et les impacts du changement climatique sont préoccupants. Ce dernier pourrait affecter la santé humaine à travers les chaleurs extrêmes, la pollution de l’air, ou encore l’exposition à des maladies infectieuses ou tropicales.
Ces risques seront-ils contrebalancés par d’autres progrès ?
Oui, bien sûr. Des avancées médicales, notamment dans le traitement des maladies neurodégénératives liées à l’âge, sont attendues. L’intelligence artificielle jouera aussi un rôle important, surtout en diagnostic et traitement. On peut aussi citer les véhicules autonomes : quand on sait que 94 % des accidents sont dus à des erreurs humaines, leur développement pourrait faire chuter drastiquement les décès sur la route. On peut donc légitimement conclure que l’espérance de vie continuera à augmenter, même si son rythme est difficile à prévoir.
Face à cette longévité qui augmente, quel est l’enjeu principal selon vous ?
Il est crucial de planifier ses années de retraite. Il existe une règle d’or : plus on commence tôt à épargner, meilleure sera la situation à la retraite. Par exemple, pour obtenir un même capital, une épargne commencée à 35 ans demandera un effort 3,5 fois moindre que si elle débute à 55 ans (pour un même montant de 100.000 euros, investi à un taux de 2,5 % et pour une retraite à 67 ans, ndlr).
Quels outils sont disponibles pour préparer sa retraite ?
Certains salariés bénéficient d’une assurance groupe, mais les montants sont souvent limités. On parle d’un montant médian de 15.299 euros pour les hommes et de 5.458 euros pour les femmes au sein de la population âgée de 56 à 65 ans en 2024, donc la population qui sera prochainement admise à la retraite. Mais beaucoup n’ont pas d’assurance de groupe encore, notamment dans les PME. Les indépendants ont d’autres options comme la PLCI, la CPTI ou l’EIP. Il y a aussi le troisième pilier – épargne-pension et épargne long terme – qui offre des avantages fiscaux. Enfin, pour ceux qui le peuvent, le quatrième pilier regroupe de nombreuses solutions d’investissement pour constituer un capital de pension plus conséquent.
Une fois à la retraite, comment gérer ce capital accumulé ?
C’est la phase de décumulation, où l’on utilise les sommes épargnées pour maintenir un bon niveau de vie. Mais selon Jennifer Alonso Garcia, professeure en sciences actuarielles à l’ULB, et avec laquelle Belfius Insurance a initié une chaire pension, cette décumulation n’est actuellement pas optimale. Beaucoup de retraités doivent vivre très frugalement.
Comment améliorer cette situation ?
Grâce à une approche personnalisée. L’étude réalisée par Belfius montre que les premières années de la retraite sont les plus coûteuses – jusqu’à 800 euros de dépenses supplémentaires pour le client médian de Belfius qui est pensionné médian, en raison des loisirs et des voyages. Ensuite, les dépenses baissent, se recentrant sur le confort quotidien puis le soutien médical. Le bon rythme de consommation du capital dépend donc des projets de chacun et de sa longévité, ce qui est une inconnue difficile à anticiper.
Pour le dire autrement, la longévité est un marché en croissance pour les assureurs ?
Plus que jamais, les assureurs ont un rôle sociétal majeur à assumer. Ils doivent mutualiser le risque lié à la longévité et proposer des solutions innovantes et personnalisées. Et Belfius Insurance a déjà pris des initiatives sur le sujet, notamment avec le lancement d’un nouveau produit qui permet de compléter la pension légale par un revenu mensuel stable tout au long de la retraite (rente), quelle qu’en soit la durée. Ainsi, l’assureur prend à sa charge l’inconnue de la longévité et mobilise ses compétences en gestion à long terme pour garantir un avenir sécurisé, ainsi qu’une vie longue… et épanouie !