L’infrastructure est au centre du combat climatique
En dépit d’un cru 2023 décevant, les fonds exposés sur l’infrastructure cotée disposent de fondamentaux solides pour les prochaines années et sont au cœur des problématiques climatiques auxquelles nous devons faire face. Le reflux des taux directeurs devrait permettre à cette classe d’actifs de retrouver un attrait auprès des investisseurs.
L’infrastructure est un secteur constitué d’entreprises qui vont être en première ligne dans le cadre du combat contre le changement climatique. Il existe aujourd’hui une dizaine de fonds disponibles sur le marché belge, dont une grosse poignée sont accessibles aux investisseurs individuels et affichent un historique de performance supérieur à trois ans. S’il existe de nombreuses manières d’accéder à un investissement sur un projet d’infrastructure (notamment pour les clients de banque privée), utiliser un véhicule coté présente de nombreux avantages.
“Sur une longue période, la performance des marchés cotés et non cotés est similaire, en dépit des divergences importantes qui peuvent parfois survenir à court terme, souligne Manoj Patel, le gestionnaire du fonds DWS Invest Global Infrastructure. Un fonds exposé sur l’infrastructure cotée est une proposition d’investissement liquide qui combine un rendement élevé sur le long terme et une diversification du portefeuille qui est difficile à obtenir sur un véhicule non coté.”
Environnement régulé
En tête du classement, nous trouvons le fonds KBI GI Global Sustainable Infrastructure, qui fait partie de l’offre du groupe Amundi. Son gestionnaire, Colm O’Connor, souligne que sa stratégie vise une exposition concentrée (sur une cinquantaine de lignes) avec une part active élevée et une volonté de s’exposer sur les secteurs économiques qui vont particulièrement bénéficier des flux d’investissements futurs, notamment dans des domaines comme l’eau, l’énergie renouvelable ou la sécurité de l’approvisionnement alimentaire.
“Nous cherchons typiquement à investir sur des sociétés qui vont gérer des projets d’infrastructure, générer des flux de trésorerie importants et des résultats financiers stables et prévisibles car fonctionnant dans un environnement fortement régulé. Ce cadre règlementaire permet à ces groupes d’être relativement immunisés contre l’inflation”, souligne encore Colm O’Connor.
Quatre secteurs
Le positionnement sectoriel de ces fonds infrastructure privilégie des segments comme la production d’électricité, l’immobilier, les valeurs industrielles ou l’énergie, quatre segments économiques qui représentent la large majorité des encours pour les différents fonds repris dans notre tableau. Après avoir très bien résisté durant l’exercice 2022 avec un recul moyen de seulement 2%, les sept produits sont par contre restés largement en retrait du rebond sur les marchés boursiers depuis le début 2023.
“L’attention s’est reportée vers les actions de croissance et les investisseurs ignorent le potentiel des sociétés que nous détenons, indique Alex Araujo, le gestionnaire du fonds M&G (Lux) Global Listed Infrastructure. En outre, les incertitudes entourant le niveau des taux d’intérêt futurs a été particulièrement préjudiciable à une classe d’actifs dont l’attrait repose souvent sur la croissance des dividendes qu’elle peut procurer face aux obligations. Depuis le début de l’année, l’opportunité sur le segment de l’infrastructure n’a fait que se renforcer et n’a probablement plus été aussi attrayante depuis très longtemps au vu de l’environnement actuel sur les marchés financiers.”
La principale caractéristique du fonds M&G (Lux) Global Listed Infrastructure est son exposition sur des secteurs qui sont critiques pour l’avenir de notre société. “Notre stratégie est plus exposée sur la transition énergétique que sur les énergies renouvelables, ce qui nous a permis de rester à l’écart des excès de valorisation qui ont affecté ce segment ces dernières années, indique encore Alex Araujo. Un des risques liés aux investissements durables est que certains investisseurs sont aujourd’hui obligés de détenir les mêmes entreprises, ce qui pousse leur valorisation vers des niveaux parfois difficilement justifiables.”
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Mitiger l’inflation
Jeremy Anagnos, le gestionnaire du fonds Nordea 1 – Global Listed Infrastructure, estime également que les différents secteurs des infrastructures sont des leviers essentiels de la politique climatique: “L’utilisation accrue de technologies innovantes pourrait réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre en permettant notamment aux villes d’utiliser l’énergie plus efficacement, d’améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments et de produire davantage d’énergie renouvelable”.
Par rapport aux obligations qui proposent des coupons statiques, les dividendes des actifs d’infrastructure ont tendance à augmenter régulièrement, tirés par des flux de trésorerie indexés sur l’inflation. “Les groupes actifs sur les projets d’infrastructure ont la capacité de répercuter la hausse de prix sur leurs clients, ce qui leur permet de surperformer historiquement les actions mondiales pendant les périodes d’inflation supérieure à la moyenne.”
Alex Araujo se montre également très véhément sur la nécessité d’être exposé sur l’infrastructure cotée pour les investisseurs soucieux d’avoir un effet positif sur la transition climatique. “Il est aujourd’hui évident pour tout le monde que les événements climatiques sont devenus de plus en plus sévères, avec des dégâts matériels et humains de plus en plus lourds. Et les entreprises ne sont pas immunisées contre ces risques. Un groupe comme la société d’électricité PG&E (Pacific Gas & Electric), qui a été à l’origine des grands incendies de 2017 et 2018 en Californie, a été contrainte de déclarer la faillite. Et un autre groupe comme Hawaiian Electric pourrait prochainement se retrouver dans une situation similaire suite aux incendies de cet été sur l’île de Maui. Enfin, je vais également citer l’action en justice d’un fermier péruvien contre l’électricien RWE, qui pourrait entraîner quelques d’actions en justice si le groupe allemand est reconnu coupable d’agissements ayant entraîné le réchauffement de la planète.”
Indépendance énergétique
L’infrastructure a également son rôle à jouer dans le renforcement de l’indépendance énergétique, en particulier au niveau européen. Alex Araujo (M&G) rappelle que, basé sur une étude récente (Excess mortality rose sharply to 19% in December 2022, www.ec.europa.eu/eurostat), “les conséquences de la hausse des prix de l’énergie ont sans doute causé 50.000 morts évitables en Allemagne durant une vague de froid de courte durée qui s’est produite en décembre 2022”.
Plusieurs décennies d’investissements lourds sont aujourd’hui prévus tant en Europe qu’aux Etats-Unis, d’autant que nous brûlons aujourd’hui plus de charbon que jamais. Il est symptomatique qu’un pays comme la Pologne, jusqu’ici très fortement dépendant du charbon et du gaz russe pour son approvisionnement énergétique, vienne d’annoncer des plans pour la construction de trois nouveaux réacteurs nucléaires.
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