Les warrants sont un avantage extra-légal. Il s’agit d’un titre négocié en bourse. Pourtant, ils devraient échapper à la taxe sur les plus-values. Voici pourquoi.
En Belgique, les avantages extralégaux forment un pilier fondamental du système de rémunération : ils permettent à un employé de percevoir davantage en net, que ce soit pour une prime de fin d’année, des bonus éventuels ou une partie de son salaire brut. Ces avantages comprennent, entre autres, une voiture de société ou un plan mobilité, une assurance hospitalisation, un plan d’épargne-pension, des appareils multimédia… et aussi des warrants, c’est-à-dire des actifs financiers négociés en bourse.
“Les warrants sont des options sur des actions qui sont un peu particulières parce que ces options sont elles-mêmes cotées en bourse. En fait, il n’est pas nécessaire de lever l’option pour acquérir le sous-jacent. On peut juste négocier les warrants sur le marché boursier“, explique Catherine Langenaeken, experte en rémunération chez Acerta.
Ces warrants servent ainsi souvent à l’octroi d’un bonus à un travailleur qui a atteint un objectif. Si le bonus était bonus payé en cash, il y aurait des cotisations patronales et sociales, pécules de vacances et précompte professionnel à payer. Pour le warrant, il y a uniquement le précompte professionnel à régler (en plus de la taxe boursière). Le travailleur touche ainsi 30 à 35% de plus en net sur le même montant brut, par rapport au cash.
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Mais comme il s’agit d’un actif financier… à quoi faut-il s’attendre par rapport à la taxe sur les plus-values, qui entre en vigueur en janvier ?
Taxe sur les plus-values ?
En réalité, les warrants échappent à cette taxe. Les plus-values sont minimes (en général de quelques cents), voire inexistantes. Et la taxe concerne seulement les gains qui dépassent 10.000 euros par an. Mathématiquement, il est quasi impossible d’atteindre un tel montant avec la vente de warrants. “Avant de faire 10.000 euros de plus-values sur des warrants, il faut déjà avoir un sacré montant de bonus et un fameux salaire. Les warrants ne peuvent jamais dépasser 20% de la rémunération annuelle brute, pour que l’octroi de warrants ne soit pas disproportionné”, nous explique l’experte.
Mais au-delà des chiffres, il y a aussi un autre élément qui empêche la taxation des plus-values de ces warrants. C’est qu’il s’agit d’un revenu professionnel. Le précompte mobilier est déjà retenu sur le produit de la vente du warrant. Cela les ferait donc sortir du cadre de la taxe sur les plus-values, pour éviter la double imposition. Mais cela reste à confirmer, le texte devant encore être voté définitivement.
Bourse
Mais pourquoi cet actif financier ne génère-t-il pas de plus-value ? Pour le comprendre, faisons d’abord le point sur son fonctionnement en bourse. Acerta travaille avec BNP Paribas Fortis. Les warrants proposés sont donc des options sur une SICAV, portant sur l’Euro Stoxx 50. D’autres entreprises peuvent travailler avec d’autres produits et fournisseurs. “Cela permet en fait d’avoir un panier d’actions assez stable sur le marché. Le warrant est donc relativement stable aussi. C’est pour avoir un gain net relativement sûr, même si cela reste un produit boursier. On ne peut jamais prévoir quelle sera la valeur de vente. Mais elle tourne toujours plus ou moins autour de 9,50 euros, qui est le prix de départ”, nous explique Catherine Langenaeken.
Cas warrants sont constitués le soir, sur base du prix de clôture. Ils sont cotés le lendemain matin à l’ouverture et vendus dans la foulée, ou presque. L’objectif est surtout de récupérer le cash qu’ils représentent. “On ne va pas spéculer sur la valeur du warrant ou du sous-jacent. On va revendre le plus rapidement possible ces warrants, histoire que le travailleur ait son cash au moment plus ou moins où il aurait normalement reçu le cash de son bonus traditionnel. Ce n’est pas un produit de spéculation, c’est vraiment un produit d’optimisation. Ce n’est pas un produit qui va permettre aux travailleurs d’escompter des plus-values extraordinaires. Ni de grosses pertes”, explique l’experte. Il peut néanmoins y avoir de grosses surprises : Catherine Langenaeken se souvient par exemple du 24 février 2022. La Russie a envahi l’Ukraine et quelques heures plus tard les marchés européens ont ouvert en très forte chute. Tout comme les warrants censés les répliquer.
Pas vraiment un produit d’investissement
Une autre question qu’on peut se poser sur ces warrants, c’est si un employé souhaite investir en bourse. Peut-il garder ces actifs, pour les faire fructifier sur long terme par exemple, au lieu de les vendre immédiatement ? C’est possible, nous explique Catherine Langenaeken, mais ce n’est pas vraiment l’idée.
Et ce, pour plusieurs raisons. La première est le précompte professionnel : il est à payer au plus tard 60 jours après l’octroi du warrant. Donc si le travailleur ne vend pas l’actif mais le garde, il doit quand même payer le précompte. Il l’aurait ainsi en moins sur son salaire. “Si le bonus est gros et qu’on a un gros précompte, on pourra avoir une fiche de paie négative”, met-elle en garde. L’autre, c’est la durée des options : elles expirent après dix ans. On pourrait par exemple oublier ces délais et perdre les warrants. Un fournisseur de services RH comme Acerta ne va en plus pas garder ces actifs éternellement sur ses comptes, pour le travailleur. Il va donc les transférer au travailleur, qui doit ouvrir un compte-titre auprès d’une banque s’il n’en a pas déjà un. Des frais de transferts peuvent s’appliquer, et d’autres frais si le travailleur veut revendre ces options, par exemple. Ces points d’attention comptent aussi pour ceux qui veulent exercer l’option et acheter le sous-jacent.
D’un point de vue pratico-pratique, il serait donc plus simple de vendre les warrants, de prendre le cash et d’acheter ces parts de SICAV ou autres ETF de son côté.
De plus en plus populaire
Les warrants gagnent d’ailleurs en popularité. En 2023, 9% des travailleurs les avaient choisi dans leur plan cafétéria, puis 12% en 2024 et maintenant 14,5% à les plébisciter, soit un travailleur belge sur sept : une hausse de 20,8% en un an, la plus forte parmi toutes les options disponibles.