Les sangliers débarquent en périphérie bruxelloise: comment être indemnisé ?

Sanglier
Sanglier © Getty
Muriel Lefevre
Muriel Lefevre Journaliste multimédias

Les rencontres avec la faune sauvage ne sont pas rares en cette saison en Belgique, et les sangliers débarquent désormais jusque dans la périphérie bruxelloise. Si croiser un animal a son charme, cela peut vite tourner à l’aigre en cas d’incident.

L’animal sauvage n’appartient à personne et il n’est donc pas assuré. Du coup, si votre jardin est retourné par des sangliers ou en cas de collision avec un chevreuil sur la route, qui paie les dégâts ? Indice : ce ne sera pas la bête.

Que faire si des sangliers ont ravagé votre jardin ?

Autant vous prévenir : se faire indemniser dans un tel cas relève du parcours du combattant. La situation devient en effet nettement plus complexe lorsque les dégâts concernent votre propriété.

Les assurances habitation classiques ne couvrent pas ce type de dommages. L’assurance incendie n’intervient pas pour les dégâts causés par des animaux sauvages dans votre jardin. Il existe cependant des assurances optionnelles, complémentaires à votre contrat habitation, qui peuvent couvrir ce risque spécifique. Si vous résidez dans une zone où les animaux sauvages sont fréquents, renseignez-vous auprès de votre assureur sur les options disponibles.

Du côté des pouvoirs publics, l’Agence pour la Nature et les Forêts (ANB) en Flandre ou le Département de la Nature et des Forêts (DNF) en Wallonie peuvent théoriquement intervenir dans certaines situations exceptionnelles. Dans les zones rurales et périurbaines particulièrement touchées, les communes mettent parfois en place des systèmes de dédommagement ou des mesures de prévention. Il peut être utile de vous renseigner auprès de votre administration communale pour connaître les dispositifs existants.

Néanmoins, il ne faut pas s’attendre à grand-chose : ce genre de demande se solde le plus souvent par une fin de non-recevoir. Les animaux faisant partie de l’environnement, on vous répondra généralement qu’il faut « apprendre à vivre avec ».

Si vous avez déjà repéré des sangliers près de chez vous, sachez qu’il existe plusieurs solutions pour protéger votre jardin : clôtures électriques, répulsifs naturels, suppression des sources de nourriture facilement accessibles. Certains propriétaires installent aussi des systèmes d’éclairage avec détecteur de mouvement, efficaces pour dissuader les sangliers en balade nocturne.

Deuxième cas de figure: collision avec un animal sauvage

Les collisions avec des animaux sauvages représentent un risque croissant sur les routes belges, particulièrement en zones rurales et forestières. Or, une analyse des contrats d’assurance automobile révèle une lacune majeure dans la protection des conducteurs, souvent ignorée jusqu’au moment de l’accident.

Quelle assurance intervient pour les dégâts à votre voiture ?

  • Avec une omnium : vous pouvez être tranquille. L’assurance omnium prend en charge les dégâts à votre voiture, que vous soyez responsable ou non.
  • Avec une mini-omnium : la plupart des contrats incluent une couverture “heurts avec animaux“. Fournissez des preuves de la collision (photos, témoignages) pour faciliter l’indemnisation. Selon votre contrat, une franchise peut s’appliquer.
  • Sans omnium : les réparations restent entièrement à votre charge, sauf cas exceptionnel (voir ci-dessous).

Si vous heurtez un animal sauvage avec votre véhicule, la première réaction détermine vos chances d’indemnisation. Vous disposez d’un délai strict de 24 à 48 heures (selon votre assureur) pour déclarer l’accident à la police. Sans ce constat officiel, votre assurance refusera toute prise en charge.
Au-delà de cette démarche obligatoire, quelques réflexes peuvent renforcer votre dossier : photographiez les dégâts et, si possible, l’animal impliqué. Recueillez également les coordonnées d’éventuels témoins. Ces éléments constituent des preuves précieuses, particulièrement si vous disposez d’une mini-omnium.

Le cas particulier : quand un chasseur est impliqué

Même sans omnium, une porte de sortie existe si vous prouvez qu’un chasseur a traqué l’animal vers la route dit encore Delphine Van Bladel.

Pas simple à prouver, on en conviendra, mais cela vaut la peine de vérifier. Dans cette situation, l’assurance responsabilité civile chasse du chasseur couvre non seulement vos propres dommages, mais aussi les dégâts éventuellement causés à autrui si vous avez heurté une autre voiture, par exemple. Encore faut-il réunir des témoignages solides pour établir cette responsabilité.

Que se passe-t-il en cas de dommages à autrui lors de la collision ?

Lors d’un accident classique, l’assurance responsabilité civile du responsable indemnise les victimes. Mais lors d’une collision avec du gibier, personne n’est responsable : ni vous, ni l’animal sauvage qui n’a pas de propriétaire précise Delphine Van Bladel, porte-parole d’Assuralia.

Le Fonds Commun de Garantie Automobile (FCGA) peut théoriquement intervenir dans certains cas de force majeure. Toutefois, les conditions d’intervention sont strictement encadrées. Le FCGA traite principalement des situations exceptionnelles telles que l’éclatement de pneu ou le malaise du conducteur.

Pour qu’un accident avec un animal sauvage soit reconnu comme cas de force majeure, le conducteur doit apporter la preuve du caractère imprévisible et inévitable de l’événement, ce qui s’avère complexe en pratique. Cette voie de recours demeure donc incertaine. Ainsi, si des panneaux signalent la présence de gibier ou si vous connaissez les lieux, le Fonds n’interviendra pas.

Il faut aussi que la collision se soit produite en Belgique.

Et si vous êtes blessé ?

Contrairement à une idée reçue, l’assurance responsabilité civile obligatoire et l’assurance omnium, même complète, ne couvrent pas les dommages corporels subis par le conducteur lors d’un accident avec un animal sauvage.

Cela s’explique par le fonctionnement de l’assurance automobile en Belgique. L’assurance responsabilité civile (la RC obligatoire) couvre uniquement les dommages causés aux tiers, pas vos propres blessures en tant que conducteur. Autrement dit, elle paie pour les autres, jamais pour vous. L’omnium (mini ou complète) ne couvre que votre voiture, mais ne couvre généralement pas vos blessures corporelles. Ne restent donc qu’une assurance conducteur spécifique ou, éventuellement, le Fonds Commun de Garantie Automobile, comme indiqué plus haut.

Pourquoi vaut-il mieux percuter l’animal que chercher à l’éviter ?

Ce conseil peut sembler brutal d’un point de vue éthique, mais il repose sur une réalité juridique et assurantielle très concrète en Belgique : la distinction cruciale entre contact direct et manœuvre d’évitement, dit encore Delphine Van Bladel.

Vous êtes assuré si vous entrez en collision avec un sanglier via la clause « heurt d’animaux », mais pas si vous faites un écart pour l’éviter et que vous heurtez un arbre.

La manœuvre d’évitement suivie d’une collision avec un obstacle fixe (arbre, glissière de sécurité, véhicule en sens inverse) change la nature juridique de l’accident. Celui-ci n’est plus qualifié de “heurt d’animaux” mais de perte de contrôle ou de sortie de route. Cela est donc considéré comme un accident classique qui peut engager votre responsabilité.

De plus, sans contact avec l’animal, vous n’avez aucune preuve matérielle (poils, sang, traces) de sa présence. L’assureur peut alors suspecter une perte de contrôle du véhicule pour d’autres raisons (vitesse, inattention, etc.).

Si un cerf se jette soudainement sur la route, il vaut donc mieux ralentir au maximum, mais ne pas dévier. Et pas uniquement pour des raisons d’indemnisation.

L’analyse comparative des risques montre que les conséquences d’une collision frontale avec un animal de taille moyenne, même à vitesse élevée, sont généralement moins graves que celles d’une collision avec un obstacle fixe ou un véhicule circulant en sens inverse. Les statistiques d’accidentologie confirment que les accidents mortels résultent plus fréquemment de collisions secondaires que du choc initial avec l’animal.

Enfin, il y a la question du malus. Un accident qualifié de “heurt d’animaux” ne génère généralement pas de majoration tarifaire, étant considéré comme un cas de force majeure, contrairement à un accident résultant d’une perte de contrôle.

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