Approche active: comment choisir un bon gestionnaire de portefeuille ?
Le BlackRock Investment Institute, le pôle de recherche du gérant d’actifs BlackRock, a publié un rapport cette semaine sur les perspectives pour les investisseurs. Il y préconise qu’une approche active de la gestion des portefeuilles est plus adaptée au contexte économique actuel. Olivier Pauwels, responsable Wealth et Stratégies Multi asset chez BlackRock, nous explique.
Trends Tendances : Il peut y avoir plusieurs définitions sur ce qu’est l’investissement actif. Comment le définiriez-vous ?
OLIVIER PAUWELS : Les deux grandes façons de gérer un portefeuille d’investissement c’est d’un côté la gestion active et de l’autre côté ce que nous appellons la gestion indicielle (aussi appelée passive, NDLR). Pour nous, la gestion active c’est un gestionnaire de portefeuille qui prend des décisions actives en choisissant des titres individuels, des régions, des secteurs, ou des styles de gestions. Mais la question va aussi être comment est-ce qu’on met en œuvre ces décisions dans les portefeuilles. On peut le faire à travers des managers actifs, mais on peut aussi le faire aussi à travers des instruments indiciels. Si on veut par exemple sous-pondérer les actions américaines comparé aux autres régions, cela peut très bien se faire dans un portefeuille composé uniquement d’ETF. Donc dans l’implémentation, il peut y avoir les deux façons de faire. Donc dans la mise en œuvre, il peut y avoir les deux façons de faire. Le traditionnel stock picking d’un côté et de l’autre utiliser des instruments indiciels pour traduire une vue active.
Dans le rapport, vous parlez d’un régime macro-économique et de marchés très volatil. Pourquoi ce régime d’aujourd’hui est-il plus favorable à une approche active ?
D’abord pour donner un peu de contexte sur ce nouveau régime de marché : en effet, depuis la pandémie et les années qui ont suivi, on observe clairement un contexte macro-économique qui est devenu beaucoup plus volatil et incertain. Quand on regarde par exemple les chiffres d’inflation et les attentes des analystes, on voit qu’il y a une plus grande dispersion entre les attentes des analystes. Il est devenu plus difficile de prévoir la trajectoire future macro-économique. Différentes “mégatendances” transforment l’économie mondiale, comme les problèmes dans les chaînes d’approvisionnement, les pénuries sur le marché du travail, les tensions géopolitiques, la transition énergétique. Ce contexte plus incertain génère plus de dispersion sur les marchés financiers. Quand on regarde les marchés des actions : la différence entre les gagnants et les perdants est devenue plus grande. Une gestion plus active d’un portefeuille est donc nécessaire pour faire la différence entre les gagnants et les perdants.
Mais qu’est-ce que cela veut donc dire cette gestion plus active ? Cela veut dire deux choses. Premièrement, les choix que l’on fait dans les classes d’actifs et la pondération qu’on leur donne, comme augmenter ou diminuer le poids vers les actions ou les obligations, par rapport à un portefeuille 60-40 classique, ont un plus grand impact sur le rendement que durant la période d’avant-covid. Ensuite, il y a aussi le timing. Combien de fois est-ce qu’on revoit son portefeuille ? Là aussi, par rapport à la période pré-covid, c’est-à-dire la période de taux bas et de croissance faible qui a pris fin avec la pandémie, on voit que le fait de revoir son portefeuille plus régulièrement est plus rémunérateur aujourd’hui. On a fait une analyse entre du buy and hold (donc on ne change rien), entre ‘on change une fois par an’ et ‘on change deux fois par an’… et on voit clairement que pour un même portefeuille, le fait de le revoir régulièrement génère un rendement plus élevé.
Dans ce contexte plus volatil et incertain, quelles peuvent être les difficultés ?
Les difficultés liées à une gestion active sont qu’on peut se tromper. Que ce soit au niveau des entreprises individuelles, des régions, des secteurs ou des styles d’investissement. Ça, c’est au niveau unilatéral du gestionnaire d’actifs. Évidemment, en tant qu’investisseur, il est important de faire le bon choix des managers. L’investisseur individuel n’est pas obligé de faire tous ces choix, il peut notamment choisir dans le vaste éventail des fonds d’investissement. Donc il a l’avantage que le travail est fait pour lui. Mais il y a la difficulté de faire le choix du bon manager… et là aussi, on observe que la dispersion est en train d’augmenter. Quand on regarde l’univers des gestionnaires actifs, on a observé que depuis la pandémie, la dispersion entre les meilleurs et les moins bons a augmenté. C’est une difficulté supplémentaire, car se tromper dans le manager ou dans le fonds qu’on sélectionne peut avoir des conséquences plus importantes que lors de la période pré-covid, où les conséquences d’un mauvais choix étaient étaient moindres.
Comment fait-on alors pour sélectionner un bon manager de portefeuille ?
Il y a plusieurs indicateurs à surveiller. Bien sûr on va regarder la performance historique, ça c’est une chose, mais je ne pense pas que ce soit la seule chose qu’il faille regarder. Une autre chose qui compte pour nous, c’est la robustesse du processus d’investissement. Par exemple, est-ce que c’est une équipe d’une personne ou est-ce qu’il y a trois, quatre, cinq personnes ? Le fait d’avoir une équipe est important pour la continuité du processus d’investissement. Autre élément : est-ce que le processus a été testé dans différents régimes et scénarios de marché ? Le tester dans d’autres scénarios économiques nous semble important. Puis un élément peut-être plus opérationnel, il faut aussi regarder au niveau de la maison de gestion dans sa globalité, son organisation, sa gouvernance et son cadre de gestion des risques. Cela fait partie de notre due diligence en tant que gérant. Je dirais aussi qu’il faut regarder si c’est un fonds qui prend beaucoup de positions actives ou si c’est un fonds qui cherche à suivre de plus près son benchmark.
Cela dépend donc aussi du profil de l’investisseur ? Par exemple, s’il est plus prêt à prendre des risques ou s’il préfère rester plus proche des indices ?
En effet. Si vous êtes en train de constituer votre portefeuille d’investissement, la prochaine question qu’on va vous poser c’est combien de risque est-ce que vous vous voulez que le gestionnaire prenne. Et par combien de risques, on entend – par exemple si on prend le S&P 500 – le pourcentage avec lequel ce gestionnaire sur ou sous-pondérer les positions. Est-ce que c’est 1% ? Est-ce qu’il peut ajouter jusqu’à 5% ou jusqu’à 10% sur un seul titre ? C’est alors un portefeuille qu’on appelle aussi de “haute conviction”.
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