Investir dans la cour des grands grâce aux holdings

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Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Les holdings permettent aux petits investisseurs de diversifier leurs placements et d’accéder aux entreprises non cotées en Bourse, ce qui leur serait sinon impossible.

Les holdings ou sociétés de portefeuille sont des sociétés qui détiennent des participations dans diverses entreprises. ” Les holdings diversifiées sont la meilleure façon de faire ses premiers pas en Bourse, assure l’expert en actions Rudy De Groodt de BNP Paribas Fortis Private Banking. Fan de Star Wars, je dis toujours aux clients ‘Que la Force soit avec vous. Achetez-les maintenant, rangez-les et laissez-les travailler pour vous’. ”

Les holdings sont des placements exclusivement à long terme. ” Elles sont généralement gérées ou contrôlées par une famille d’actionnaires. Autrement dit, les familles sont très prudentes avec leur argent et celui des petits investisseurs “, assure Rudy De Groodt. Le prix acquitté par les investisseurs pour les actions de holdings dépend de deux éléments : la valeur intrinsèque des investissements de la holding et la décote que les investisseurs exigent sur le portefeuille d’investissement sous-jacent.

Il est extrêmement difficile pour une holding d’estimer la décote appropriée, de l’avis de Rudy De Groodt. ” Cela dépend du track record de la direction, de la transparence et de l’importance du private equity dans le portefeuille “, explique l’expert. En général, la décote est moindre pour les entreprises qui possèdent plus de private equity en portefeuille. Les holdings apprécient leurs participations dans les entreprises non cotées par rapport aux concurrents du secteur cotés en Bourse. Elles allouent souvent une décote de leur propre initiative sur la valeur des peers ou font une évaluation conservatrice de la valeur de leurs avoirs non repris en Bourse.

” Le petit investisseur peut lui aussi accéder au private equity par l’entremise de certaines holdings diversifiées “, ajoute Rudy De Groodt. Il s’agit d’investissements dans des entreprises financées par des capitaux privés, qui ne font donc pas l’objet d’une cotation en Bourse.

L’analyste Hans D’Haese d’ING constate que, selon une étude récente d’une banque d’affaires américaine, les entreprises restent plus longtemps aux mains de privés et tardent à faire leur entrée en Bourse, ce qui a pour effet d’exclure les petits investisseurs d’une bonne partie du parcours d’entreprises très prometteuses.

Gimv

Gimv se compose quasi exclusivement de private equity. ” Cette société d’investissement investit dans des entreprises privées de taille moyenne en Belgique et dans les pays voisins, explique Rudy De Groodt. Gimv investit dans de jeunes sociétés en pleine croissance et les laisse mûrir à leur aise. ” Les investisseurs doivent se montrer patients pendant de longues années mais leur patience est récompensée par un rendement de dividende brut de 4,5% par an.

” Rares sont les entreprises en portefeuille mûres pour l’exit car l’âge moyen tourne autour de 3,3 ans. L’exit des entreprises permet à Gimv de faire des bonds de géant. Le dividende n’est pas mis en péril car la holding possède environ un demi-milliard d’euros en caisse “, clame Hans D’Haese. Les autres holdings présentent elles aussi un bilan solide.

Sofina

Sofina est constitué de private equity à 80%, placé en partie directement et en partie dans des fonds spécialisés comme Sequoia, connu essentiellement pour son rôle de financier des entreprises de technologie de la Silicon Valley. La holding contrôlée par la famille Boël a fait ses premiers pas dans le private equity à la fin des années 1970. La famille a le sens des affaires et peut compter sur un réseau international. ” L’application d’apprentissage indienne Byju’s dans laquelle Sofina a investi est en passe de devenir le nouveau Flipkart “, estime Rudy De Groodt. Sofina a réalisé une belle opération après le rachat par Walmart de Flipkart, le numéro un indien du commerce en ligne.

Sofina a récemment acquis une participation dans la start-up allemande Lillydoo qui livre des couches à domicile. Cet été, la holding avait déjà pris une participation dans Drylock, le fabricant de couches concurrent d’Ontex. Sofina a investi dans Lillydoo dans la foulée de Drylock, créé par l’ex-propriétaire d’Ontex, Bart Van Malderen.

Brederode

Le portefeuille de la holding Brederode (famille van der Mersch) contient autant de participations cotées que non cotées. La holding luxembourgeoise aux racines belges investit directement dans les blue chips cotées et les grandes enseignes, ou via des fonds spécialisés dans des entreprises non cotées. Brederode totalise 20 ans d’expérience dans le private equity.

GBL

GBL est la plus grande des holdings belges, avec une capitalisation frôlant les 15 milliards d’euros. Chez GBL, le private equity pèse moins lourd que dans les autres holdings, mais les choses sont en train de changer, à en croire Rudy De Groodt. ” Le pôle private equity de GBL passe de 8 à 12% avec le rachat de Webhelp, groupe français spécialisé dans l’outsourcing de la facturation, des call centers et de divers services. GBL a en outre l’intention de retirer de la Bourse Parques Reunidos, le propriétaire de Bobbejaanland et d’autres parcs de loisirs. Le but est d’accroître la proportion private equity à un quart, voire un tiers du portefeuille au cours des prochaines années. ”

D’un point de vue historique, GBL a toujours investi principalement dans les large caps françaises, autrement dit les grandes entreprises cotées en Bourse. LafargeHolcim et Imerys sont des vestiges de cette stratégie de placement. GBL possède aussi des actions dans des entreprises belges comme le fabricant de couches Ontex et le groupe spécialisé dans la technologie des matériaux Umicore. GBL a augmenté le pourcentage de private equity afin de tempérer les fluctuations de cours des investissements cotés en Bourse.

Rudy De Groodt se demande si GBL n’envisage pas de sortir le fabricant de couches Ontex de la Bourse. ” L’avantage des entreprises non cotées est que les actionnaires sont plus patients et laissent l’entreprise grandir à son rythme “, rappelle-t-il. L’expert ajoute que la transformation de GBL en 2019 est passée à la vitesse supérieure.

La holding a revendu toutes les actions de la société de services énergétiques Engie ainsi qu’une partie du fabricant de vins et spiritueux Pernod Ricard. Le récent investissement dans le groupe pétrolier espagnol non coté Cepsa est difficile à interpréter dans ce contexte, estime Rudy De Groodt.

Ackermans & van Haaren

En ce qui concerne les participations cotées en Bourse, la valeur est plus facile à calculer : le nombre d’actions fois le cours du jour. C’est moins évident pour les participations non cotées. ” Certaines holdings communiquent plus facilement sur la valeur du private equity en portefeuille que d’autres, souligne Hans D’Haese. Ackermans & van Haaren par exemple donne aux analystes et aux investisseurs tous les outils nécessaires pour calculer la valeur des entreprises : chiffres de vente, évolution du chiffre d’affaires, dettes, etc. ”

Selon Hans D’Haese, les holdings ont elles aussi une partie des informations nécessaires pour évaluer la réduction ou décote sur le portefeuille d’investissement. Une bonne communication permet aux holdings de combler le fossé entre leur valeur en Bourse et leur valeur en réalité.

Bois Sauvage

Bois Sauvage est la holding belge qui affiche la plus forte décote sur son portefeuille d’investissement. Selon Rudy De Groodt, l’action a été quelque peu oubliée et affiche un retard sur la hausse boursière. La direction de la holding ne fait pas grand-chose pour remédier à cette décote par une meilleure communication.

” Le groupe chocolatier non coté United Belgian Chocolate Makers – avec Neuhaus et Jef de Bruges comme locomotives – représente près de la moitié du portefeuille de Bois Sauvage. Le deuxième trimestre s’annonce meilleur que le premier pour le groupe chocolatier “, prédit Rudy De Groodt. L’analyste anticipe une nouvelle progression du chiffre d’affaires et du rendement pour les années à venir.

Les participations cotées dans le groupe de technologie des matériaux Umicore (21%) et du spécialiste des mousses de polyuréthane Recticel (14%) représentent 35% du portefeuille de Bois Sauvage. L’immobilier européen et américain représente 10% des actifs. Ce à quoi il faut ajouter quelques actions trading (environ 2% du portefeuille).

Ilse De Witte

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