Faire des frais pour faire des frais est une erreur: 7 conseils aux indépendants

INDÉPENDANT - Déclarer ses frais réels est souvent
plus avantageux. © Getty Images

Comment reconnaître les frais professionnels réels? Que sont les dépenses professionnelles mixtes et les frais forfaitaires? “Démontrer la valeur ajoutée, sur le plan professionnel, d’un déjeuner ou d’un dîner, n’est pas une science exacte”, nous répond un expert.

Les indépendants qui déclarent des charges professionnelles paient moins d’impôts, entend-on souvent dire. C’est vrai, mais ces frais doivent avoir un lien direct avec l’activité.

1. Distinguer les frais professionnels réels

“Il existe une règle simple pour savoir si un achat peut être qualifié de professionnel : tous les frais dont vous pouvez prouver qu’ils font progresser votre activité peuvent être considérés comme professionnels”, commente Giel Thomas, cofondateur de la plateforme comptable Dexxter. “En d’autres termes, tous les frais que vous n’auriez pas engagés si vous n’aviez pas été indépendant sont des frais professionnels – qu’il s’agisse de l’achat ou de la location d’outils ou de machines professionnels ou de la souscription d’une assurance responsabilité civile professionnelle.
Il faut bien entendu être en mesure de prouver ces dépenses à l’aide de factures, de tickets de caisse ou de justificatifs TVA. Tous ces documents doivent être conservés pendant sept ans au moins, pour le cas où l’indépendant ferait l’objet d’un contrôle fiscal. Il faut également être en mesure de prouver à l’administration fiscale les paiements effectués, en produisant des extraits de compte ou des relevés de carte de crédit, par exemple.
”Une information utile pour les ex-salariés : toutes les dépenses qui leur étaient à l’époque remboursées par leur employeur – comme les voyages ou les repas avec des clients – sont considérées comme des frais professionnels dans le cas des indépendants également.”

2. Attention aux pièges

“Les vêtements ne sont déductibles que s’ils ne sont normalement portés que dans le cadre de l’activité professionnelle. Des chaussures de sécurité ou une toge d’avocat ne poseront donc aucun problème. En revanche, une robe de soirée ou un costume sont discutables, précise Giel Thomas. Faites également attention aux dépenses de restaurant. Un dîner en tête-à-tête pour la Saint-Valentin ou pour l’anniversaire de votre moitié n’est pas une dépense professionnelle. Prenez l’habitude de noter sur chaque reçu de TVA ou dans un journal de bord le nom de la personne avec qui vous avez dîné – un prospect, un fournisseur, un partenaire commercial – et quand ainsi que, éventuellement, le projet ou la mission dont vous avez discuté à cette occasion. Ce faisant, vous prouvez déjà l’honnêteté de vos intentions. Démontrer la valeur ajoutée, sur le plan professionnel, d’un déjeuner ou d’un dîner, n’est pas une science exacte. Tordons le cou à un mythe tenace : les frais de restaurant engagés pendant le week-end peuvent eux aussi être pris en compte, pour autant que leur motif professionnel puisse être démontré.”

A partir du moment où vous utilisez un compte, quel qu’il soit, pour payer, ­l’administration fiscale dispose d’un droit de regard sur ce compte.” – Giel Thomas, Dexxter

3. Certains achats sont des investissements

“Un achat plus coûteux, dont l’utilisation s’étale sur plus d’un an, doit être comptabilisé comme un investissement plutôt que comme une dépense”, recommande Giel Thomas. Cet investissement peut être ventilé en plusieurs tranches et amorti sur autant années. Son amortissement peut être linéaire (d’un montant identique chaque année), dégressif (d’un montant qui diminue chaque année) ou progressif (qui augmente chaque année). “Il n’y a pas de montant minimum mais en général, on peut envisager de qualifier d’investissement toute dépense à partir de 250 euros. Il existe des lignes directrices qui permettent de déterminer sur combien d’années un bien peut être amorti. Le mobilier de bureau est considéré comme un investissement amortissable en 10 ans ; les ordinateurs et les smartphones peuvent être amortis sur trois ans, une voiture, un vélo ou un scooter électrique, sur cinq ans, etc.’’

4. Identifiez les dépenses mixtes

Vous avez un bureau ou un atelier à domicile ? Vous pouvez dans ce cas inscrire des dépenses mixtes dans votre comptabilité : il s’agit de frais qui sont en partie privés, en partie professionnels. “La facture d’électricité, l’abonnement à internet, la facture de téléphone, sont quelques exemples de dépenses mixtes. Le pourcentage que le bureau ou l’atelier occupe par rapport à la surface habitable totale sert de clé de répartition.” Supposons que le bureau installé à votre domicile occupe 20% de la maison ou de l’appartement : vous pouvez déclarer comme frais professionnels 20% des factures des fournisseurs d’énergie. Si vous payez 200 euros d’électricité par mois, cela représente 40 euros par mois, soit 480 euros par an.
”En tant qu’assujetti à la TVA, ajoute notre expert, vous pouvez récupérer ce même pourcentage de TVA sur vos dépenses mixtes, à condition que votre numéro d’entreprise figure sur la facture.”

5. Compte professionnel et compte privé

“Autre mythe : aucune distinction ne serait pratiquée entre le compte professionnel et le compte privé de l’indépendant. Dès que celui-ci effectue ne serait-ce qu’un seul paiement pour son entreprise à partir d’un compte privé, l’administration fiscale considèrerait ce compte comme un compte professionnel.” En réalité, les dépenses professionnelles peuvent être payées à partir de n’importe quel compte – privé, familial, professionnel, commun, etc. “Payer la facture d’électricité à partir d’un compte privé n’affecte pas sa déductibilité partielle au titre de charges professionnelles. Mais attention : à partir du moment où vous utilisez un compte, quel qu’il soit, pour payer, l’administration fiscale dispose d’un droit de regard sur ce compte.”

6. Frais forfaitaires

“Certains indépendants optent les yeux fermés pour les frais professionnels forfaitaires”, constate Giel Thomas. Ils n’ont alors à fournir ni preuves d’achat ni reçus, mais déduisent 30 % de leurs revenus professionnels. Sachez toutefois que les frais professionnels forfaitaires sont plafonnés : pour l’année de revenus 2023, par exemple, l’indépendant ne peut déduire plus de 5.520 euros de sa base imposable. “Ce qui, pour nombre d’entre eux, est trop peu. Dans la pratique, il est souvent plus avantageux de déduire les dépenses réelles, dont la véracité est prouvée par des reçus. Il n’est pas possible de combiner le système forfaitaire et celui des frais réels. On peut en revanche, si on le souhaite, passer d’un système à l’autre chaque année.”

7. Faire des frais pour faire des frais est une erreur

“Je préfère dépenser cet argent pour mon entreprise que le donner aux impôts, affirment certains indépendants. Mais ils n’ont pas forcément raison : acheter ou investir sans motif réel, dans le seul but de payer moins d’impôts, revient à jeter son argent par les fenêtres, raisonne Giel Thomas. Car tout investissement est avant tout une dépense. Cet argent, l’indépendant aurait peut-être pu l’économiser pour se constituer une réserve supplémentaire. Alors, certes, il paie moins d’impôts, mais il conserve également moins de bénéfices.”

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