Les meilleures stratégies pour enseigner l’épargne et l’investissement à vos enfants

INVESTIR DE L'ARGENT. Ce que les parents et les enfants peuvent faire varie d'une banque à l'autre.
Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Comment apprendre à nos enfants à établir un budget, à épargner et à investir en ces temps modernes et numériques ? Pouvez-vous investir l’argent de vos enfants sans autorisation ?

Pous les experts en investissement vous diront qu’à très long terme, ce sont les actions qui rapportent le plus. Et les enfants ont l’horizon d’investissement le plus long de tous. Pourtant, il n’est pas si facile d’investir leurs économies dans des actions. Un actionnaire devient copropriétaire d’une entreprise et partage donc les bénéfices, mais aussi les pertes. Ce risque de perte n’est pas quelque chose que les adultes devraient simplement prendre avec l’argent des enfants dont ils sont responsables.

Nous avons interrogé une douzaine de banques sur les possibilités offertes. Beobank commence sa réponse par un avertissement, souligné en fluo : “Les investissements pour les mineurs doivent toujours être effectués dans l’intérêt supérieur et généralement avec l’autorisation du juge de paix.” Vous pouvez acheter des actions avec votre propre argent et les offrir à vos enfants, mais la banque ne vous autorisera généralement pas à acheter des actions avec les économies de vos enfants. Chez Beobank, on estime que les parents ou le tuteur doivent gérer l’argent de l’enfant “avec une restriction du profil de risque adaptée à la situation de l’enfant”.

Selon Crelan, il n’est “pas légalement possible” de laisser les mineurs investir eux-mêmes, même dans certaines limites. “Les parents ou les tuteurs doivent toujours signer les transactions. Si vous demandez à la banque de vous conseiller en matière d’investissement, le conseiller devra vérifier si l’investissement convient à l’enfant. La banque effectuera alors un test d’adéquation, qui vérifie les connaissances et l’expérience des adultes en matière d’investissement et prend en compte les objectifs et les préférences de l’enfant en matière de durabilité.”

Crelan ajoute que seuls les parents ou les tuteurs peuvent ouvrir un compte pour l’enfant. “Les autres adultes peuvent uniquement effectuer des dépôts sur le compte de l’enfant. Ils ne peuvent pas ouvrir un compte ou effectuer des transactions. Les parents et les tuteurs peuvent investir l’épargne de leurs enfants mineurs, mais ils doivent agir dans l’intérêt supérieur des enfants. Ils ne peuvent pas disposer des avoirs de leurs enfants pour les utiliser pour leurs propres dépenses, et ils ne peuvent investir que dans des titres qui sont dans l’intérêt de l’enfant”. Cela semble encore assez vague, mais d’autres banques précisent que les actions ne sont pas dans l’intérêt de l’enfant.

En votre nom ou au nom des enfants : le pour et le contre
– Au nom des enfants :
L’investissement au nom d’un enfant présente l’avantage de ne pas devoir payer de droits de succession sur cet argent à votre décès. Vous pouvez faire don de l’argent ou des investissements de votre vivant, lorsque l’enfant a 18 ans ou plus, et faire enregistrer cette donation chez le notaire. Pour une donation enregistrée en ligne directe ou entre partenaires, le taux des droits de donation est de 3 % et de 7 % en Flandre et à Bruxelles dans tous les autres cas. En Wallonie, les taux diffèrent légèrement. En ligne directe et entre partenaires cohabitant légalement, le bénéficiaire paie 3,3 % et tous les autres 5,5 %.
– En votre nom : Placer l’argent destiné à vos enfants en votre nom propre vous donne beaucoup plus de liberté. Vous pouvez prendre plus de risques. Vous pouvez acheter et vendre des actions sans risquer que la banque vous envoie devant le juge de paix. Cela vous permet également de conserver l’argent un peu plus longtemps si, à 18 ans, l’enfant n’est pas encore prêt à gérer lui-même un portefeuille d’investissement. Lorsque vous achetez des actions, des obligations ou des parts de fonds au nom de votre enfant, celui-ci acquiert tous les droits sur ces investissements à 18 ans.

“Lorsqu’on investit pour des mineurs, il faut surtout faire la distinction entre investir au nom de l’enfant et investir pour l’enfant”, prévient un porte-parole de la KBC. “Lorsque vous investissez au nom de l’enfant, nous partons du principe que vous devez agir en tant que personne prudente et raisonnable. Les représentants légaux, souvent les parents, ne peuvent investir au nom de l’enfant qu’à condition que les investissements soient de nature défensive.”

Le législateur ne définit pas en détail ce caractère défensif, ce qui laisse une certaine marge d’interprétation aux banques.

INVESTISSEMENT. Les adultes ne doivent pas simplement prendre le risque de perdre l’argent de leurs enfants.

Ouverture d’un compte-titres

Les actions peuvent également être achetées nominativement, auprès de la société émettrice des actions. Votre nom apparaîtra alors dans le registre des actionnaires. Dans certaines sociétés cotées en Bourse, comme Solvac, le holding qui chapeaute les entreprises chimiques Solvay et Syensqo, vous ne pouvez acheter que des actions dites nominatives. Seule, cette méthode est assez lourde, et l’achat et la vente de ces actions sont plus coûteux.

Pour investir en douceur dans des actions, des obligations ou des fonds communs de placement, vous devez ouvrir un compte spécial auprès d’un agent de change. La plupart des banques sont également des agents de change. Chez BNP Paribas Fortis, les représentants légaux des mineurs peuvent ouvrir un compte-titres au nom de l’enfant, mais “ce compte-titres est immédiatement associé au profil le plus prudent et le plus conservateur. Les actions et les trackers n’ont pas leur place sur un tel compte”, prévient un porte-parole de la banque.

Des actions pour la prochaine génération
En novembre 2022, Trends-Tendances avait demandé à dix équipes d’analystes belges quelles actions ils recommanderaient comme investissements à leurs enfants ou petits-enfants. Des titres qui, selon eux, résisteraient bien à l’épreuve du temps au cours des 10 ou 20 prochaines années. Les analystes ont surtout mis en avant des participations ou des entreprises ayant une longue histoire, comme Solvay et le français LVMH. 
Les holdings 
Les holdings ou sociétés de portefeuille sont des investisseurs professionnels. Ils placent l’argent de familles fortunées dans diverses entreprises qu’ils suivent de près. Parfois, ils revendiquent même un siège au conseil d’administration de ces sociétés. Les holdings cotés en Bourse peuvent accueillir des investisseurs individuels. Certains holdings ont tellement de participations que les risques sont presque aussi bien répartis que dans le cas des fonds communs de placement ou des trackers. 
Ackermans & van Haaren (AvH) est le holding le plus souvent cité. Avec l’entreprise de dragage DEME, AvH joue un rôle dans la transition énergétique, avec le holding de plantations Sipef, le holding a un pied dans le marché des matières premières et avec les banques privées Banque van Breda et Delen, la société immobilière Nextensa et l’entreprise de construction CFE, d’autres secteurs importants sont couverts.
Ceux qui ont acheté des actions AvH le premier jour de cotation de décembre 2022 bénéficient aujourd’hui d’une plus-value de 17 %. Un dividende de 2,38 euros nets a également été payé le 3 juin et 2,17 euros nets ont été versés sur les comptes des actionnaires en juin de l’année dernière.
Les autres holdings mentionnés sont Sofina de la famille Boël, Brederode de la famille van der Mersch et GBL de la famille Frère. TINC, le holding d’infrastructures détaché de Gimv, figure également sur la liste des analystes. Les holdings ne sont pas une activité exclusivement belge. Berkshire Hathaway, le holding américain de Warren Buffett, et Investor, le holding suédois de la famille Wallenberg, ont également été mentionnés par les analystes belges. 
Les entreprises 
Outre les holdings, les analystes ont surtout mentionné des entreprises au passé glorieux, telles que l’entreprise chimique Solvay, dont Syensqo a été séparée depuis, et le groupe de luxe français LVMH. Plusieurs valeurs technologiques figurent également dans le top 5 des analystes, comme Apple et Alphabet (Google), mais ce sont surtout le fabricant de puces néerlandais ASML et Microsoft qui emportent l’adhésion des analystes. Microsoft est la plus ancienne des “Sept Magnifiques”, qui dominent les marchés boursiers depuis un certain temps déjà. Aujourd’hui, ASML affiche une hausse de 23 % par rapport au 3 décembre 2022 et Microsoft de 30,5 %.

Les trackers sont également appelés ETF (exchange traded funds), des fonds communs de placement que l’on peut acheter en Bourse comme des actions. Ces trackers suivent en général servilement un indice ou une sélection d’actions ou d’obligations. Il existe également des fonds communs de placement composés d’actions et/ou d’obligations, dont les parts peuvent être achetées par l’intermédiaire de la banque. Ces fonds sont généralement gérés en fonction des convictions des gestionnaires, qui peuvent par exemple réduire le pourcentage d’actions s’ils craignent un krach. Il convient toutefois de noter que la banque considère les ETF comme risqués par définition, car les investissements sous-jacents d’un ETF peuvent également être des obligations, tout comme ils peuvent l’être dans un autre fonds.

Argenta souligne également qu’il existe des restrictions concernant les comptes-titres des mineurs. “Ainsi, les parents ou grands-parents ne peuvent investir dans des produits de protection du patrimoine qu’au nom de l’enfant ou du petit-enfant : c’est-à-dire des produits non risqués, défensifs ou très défensifs. Les mineurs ne peuvent pas acheter eux-mêmes des actions ou des fonds. Les parents ou grands-parents peuvent investir en leur nom propre pour leur enfant ou petit-enfant. Ils disposent alors de toute la flexibilité souhaitée en termes de risque, de produit ou de durée.”

“Il est important que les enfants découvrent qu’il n’y a pas que les comptes d’épargne et les obligations, et qu’il y a des avantages et des inconvénients.” -BNP Paribas Fortis

BNP Paribas Fortis indique que les parents, grands-parents, parrains, marraines, etc. peuvent investir eux-mêmes dans des produits à risque tels que des actions, et les transférer ensuite de leur propre compte-titres vers celui de l’enfant, par le biais d’un “cadeau bancaire”. Une fois ces actions transférées, les adultes en perdent le contrôle. Ils ne peuvent pas vendre ces actions par la suite, si quelque chose ne va pas avec la société en question, par exemple, et réinvestir l’argent dans d’autres actions.

“Il peut également être utile de demander aux enfants d’investir virtuellement, de suivre ces investissements et d’en discuter ensemble. Cela leur permet de se familiariser avec différents produits financiers sans risque”, ajoute BNP Paribas Fortis. “Il est important que les enfants découvrent qu’il n’y a pas que les comptes d’épargne et les obligations, et qu’ils en connaissent les avantages et les inconvénients.”

ENFANTS ET GRANDS-PARENTS. Investir en son nom propre offre beaucoup plus de liberté.

Fonds d’investissement

Selon la Deutsche Bank, les fonds de placement sont “l’école idéale pour apprendre aux enfants plus âgés à investir pas à pas. Il est déjà possible d’investir dans des fonds avec de petits montants et les investissements peuvent être effectués automatiquement et à intervalles réguliers. En outre, les investissements sont plus diversifiés et les risques spécifiques aux entreprises sont beaucoup plus faibles avec les fonds qu’avec les actions. Le moyen le plus simple de s’enrichir à long terme, outre le fait de travailler dur, est d’investir régulièrement et à long terme”, souligne la banque.

“Les fonds d’investissement sont l’outil d’apprentissage idéal pour apprendre aux enfants plus âgés à investir, étape par étape.” – Deutsche Bank

Les parts d’un fonds commun de placement qui investit à 100 % dans des actions ne vous permettront pas d’acheter pour votre enfant dans la plupart des banques. Il existe également des fonds qui n’investissent que dans des obligations ou des fonds qui investissent dans des actions ainsi que dans des obligations. Les obligations sont des prêts qui rapportent des intérêts. Le risque de perdre de l’argent est moindre avec les obligations, même si, bien entendu, les entreprises peuvent ne pas être en mesure de rembourser toutes leurs dettes en cas de faillite. Les obligations rapportent également moins à long terme.

Plans d’investissement

Chez ING Belgique, les parents et tuteurs légaux peuvent ouvrir un compte-titres pour leur enfant et entamer un plan d’investissement. “Les parents peuvent effectuer des versements périodiques sur le compte de placement de l’enfant via l’application Self Invest, après quoi un plan d’investissement peut être lancé. Ce dernier peut également être lancé au nom des adultes pour être ensuite offert à l’enfant.” Nous reviendrons plus loin sur cette dernière option.

Un plan d’investissement vous permet d’investir de petites sommes dans des fonds communs de placement à intervalles réguliers. Les montants minimums et le nombre de fonds dans lesquels vous pouvez investir varient d’une banque à l’autre. Un plan d’investissement ING Easy Invest, par exemple, est accessible à partir de 10 euros par mois. Jusqu’au 1er octobre, une promotion vous permet d’investir 25 euros supplémentaires si vous déposez 10 euros pendant trois mois consécutifs, et 50 euros si vous déposez 50 euros pendant trois mois consécutifs. Quatre fonds sont proposés. A la Deutsche Bank, il est possible d’investir dans un plan à partir de 100 euros par mois, trimestriellement ou annuellement dans plus de 100 fonds. Il n’est pas évident de savoir combien de fonds correspondent au profil défensif d’un mineur.

KBC propose plusieurs options d’investissement à bas seuil pour les nouveaux investisseurs. L’une d’entre elles est l’investissement avec monnaie. “Nous arrondissons toutes les dépenses de votre compte bancaire à l’euro supérieur, de sorte que la monnaie peut être versée dans votre plan d’investissement”, explique-t-on. Vous pouvez également laisser un montant fixe être versé chaque mois dans le plan d’investissement. Vous pouvez également remplir un profil d’investisseur. Vous recevrez alors une proposition de plan d’investissement mensuel adaptée à votre situation et à vos préférences.

Belfius recommande d’ouvrir un Flex Invest Plan au nom de l’enfant ou de faire don de l’argent ou des investissements à une date ultérieure. Jusqu’au 31 août, un cashback de 40 euros est offert pour l’ouverture d’un plan auprès de la banque.

L’assurance-vie

Plusieurs banques suggèrent la possibilité d’une assurance-vie. “Les parents et les grands-parents peuvent investir via une assurance-vie et désigner explicitement les enfants ou les petits-enfants comme bénéficiaires, afin que l’argent parvienne aux bonnes personnes au moment du décès. Si l’assurance-vie remplit certaines conditions, elle n’est plus soumise aux droits de succession”, explique Argenta.

Belfius parle d’asssurances-vie de la Branche 23, dont les investissements sous-jacents sont des fonds. “Les parents ou grands-parents conservent alors le contrôle des investissements, mais désignent l’enfant ou le petit-enfant comme bénéficiaire en cas de décès. ING Belgique propose également ce type d’assurance investissement.

Investir au nom d’un enfant présente l’avantage de ne pas devoir payer de droits de succession sur cet argent.

Des actifs importants

La Deutsche Bank s’adresse principalement à une clientèle aisée. “De plus en plus de familles fortunées optent pour des donations avec réserve d’usufruit”, indique la banque. Les parents qui font don de leur portefeuille d’investissement à leurs enfants peuvent, par exemple, continuer à percevoir des dividendes ou des intérêts annuels. “Cela permet aux enfants d’être impliqués dans le patrimoine familial dès leur plus jeune âge, tout en permettant aux parents de conserver une certaine forme de contrôle.” La banque ajoute que ces familles fortunées confient souvent la gestion à la banque – la gestion discrétionnaire dans le jargon – et que la banque rend compte des rendements à intervalles réguliers. “Le banquier peut alors jouer un rôle éducatif en tant que copilote financier personnel.”

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