Cryptoactifs : une alternative pour votre portefeuille?

Woman's hand shows her smartphone with Bitcoin © Getty Images

Où investir maintenant que les marchés d’actions hésitent et que le rendement offert par les obligations a chuté ? Les cryptoactifs peuvent offrir une certaine diversification à condition d’être conscient des nombreux risques qui les entourent, y compris en matière de fiscalité.

Traditionnellement, les matières premières constituent l’alternative privilégiée aux actifs financiers classiques. Mais les perspectives semblent aujourd’hui assez incertaines, la fin d’un supercycle entamé à la fin des années 90 étant de plus en plus souvent évoqué en raison du ralentissement structurel de l’économie chinoise. Ce qui a déjà fait chuter les prix du minerai de fer ou du soja, et pèse sur les cours du pétrole, en baisse malgré la réduction volontaire de production de l’Arabie saoudite et les vives tensions au Moyen-Orient.

L’or est l’une des rares matières premières à continuer à s’illustrer, mais le métal jaune sent également le souffle du ralentissement de la Chine. La demande locale a en effet baissé ces derniers mois, conséquence des prix élevés et de la situation économique détériorée.

Or métallique ou numérique

Ce qui laisse peu d’options à l’investisseur en quête d’alternatives, à savoir essentiellement l’immobilier physique, qui nécessite un engagement à long terme, et les cryptoactifs. Parmi ces derniers, le plus couru est évidemment le bitcoin, souvent qualifié d’or numérique. Contrairement au métal jaune, la valeur du jeton bitcoin n’a toutefois pas brillé ces derniers mois, ayant baissé de près de 25% depuis son pic du mois de mars.

Ce qui ne l’a pas empêché d’asseoir un peu plus sa domination sur le monde des cryptoactifs, représentant à lui seul plus de 56% de la capitalisation des plus de deux millions des projets répertoriés par CoinMarketCap. Premier cryptoactif fondé en 2009 par Satoshi Nakamoto, un pseudonyme derrière lequel se cachent probablement plusieurs personnes encore inconnues, le bitcoin est surtout plébiscité en tant que réserve de valeur en raison de sa rareté, de sa transférabilité et de sa durabilité. Tout comme l’or !

Réserve de valeur

Les deux actifs sont disponibles en quantité limitée : l’ensemble des ressources disponibles sur Terre pour l’or et un nombre de 21 millions de jetons pour le bitcoin (dont 19,7 millions déjà “minés” numériquement). Les plus tâtillons ajouteront toutefois que l’offre finale pourrait être plus élevée. Même si cela semble aujourd’hui utopique, de l’or pourrait un jour être extrait de sols extraterrestres, la Nasa évaluant par exemple que l’astéroïde Eros contient 20 milliards de tonnes d’or, soit 100.000 fois plus que ce qui a été extrait sur Terre dans l’histoire de l’humanité.

Concernant le bitcoin, la quantité maximale (hard cap dans le jargon) pourrait être relevée avec l’accord de la majorité de nœuds du réseau, c’est-à-dire les intervenants chargés de la validation des transactions. Ces derniers n’ont toutefois aucun intérêt à le faire (actuellement) puisqu’ils sont rémunérés en jetons bitcoin dont la valeur ne pourrait qu’être affectée en cas de relèvement du hard cap.

L’or et le bitcoin ont aussi certaines caractéristiques d’une monnaie : transférables, fongibles (interchangeables) et divisibles. Un satoshi, la plus petite unité de compte disponible sur le réseau bitcoin, vaut ainsi un cent millionième de jeton, soit une valeur actuelle d’environ 0,0005 euros. Enfin, tant l’or métallique que numérique sont pérennes, ne se dénaturant pas dans le temps – ce qui explique d’ailleurs le rôle historique de l’or comme moyen d’échange par rapport à de nombreux autres métaux qui s’oxydent.

Corrélation avec les actions

Sur les marchés, l’or et le bitcoin sont par contre loin d’avoir des trajectoires similaires. Comme vous pouvez le constater sur le graphique ci-contre, le bitcoin est beaucoup plus volatil. De plus, les périodes de recul du cryptoactif semblent être plutôt favorables à l’or, tout particulièrement cette année.

Comparativement, l’évolution du bitcoin semble plus proche de celle du Nasdaq, indice américain des valeurs technologiques et de croissance. Ce qui n’est pas dénué de sens, le bitcoin pouvant être considéré comme l’alternative monétaire d’une société entièrement numérisée.

Cathie Wood, CEO du gestionnaire de fonds ARK Invest, peut en témoigner. Promue gourou sur Wall Street, grâce à l’envolée de 152% de son fonds amiral ARK Innovation en 2020, elle prédit que le jeton bitcoin vaudra 1,5 million de dollars à terme tout en continuant à fortement miser sur Tesla, Roku (streaming), Roblox (jeux en ligne, métavers) ou Robinhood (plateforme de trading populaire auprès des jeunes) entre autres.

Le Bitcoin peut être considéré comme l’alternative monétaire d’une société entièrement numérisée.

Le développement des ETF, c’est-à-dire des fonds échangés en Bourse, sur le bitcoin est même plutôt de nature à renforcer cette corrélation. Matt Bauer, stratégiste chez Ned Davis Research, constate ainsi que “l’accessibilité accrue a entraîné une baisse de la volatilité, une baisse du ratio de Sharpe (mesurant la surperformance d’un actif risqué, ndlr) et une augmentation de la corrélation avec le S&P 500″, l’indice élargi des actions américaines.

A titre de comparaison, les ETF sur le bitcoin représentent près de 5% de la capitalisation totale du cryptoactif, contre à peine un peu plus d’un pour cent pour l’or. C’est évidemment un paramètre à garder à l’esprit avant d’investir en bitcoin. Miser sur cet “or numérique” ne protégera pas forcément votre portefeuille en temps de crise. D’autant plus que l’historique est forcément limité pour un actif créé en 2009 et dont le rôle en tant qu’investissement est tout récent.

Ethereum et finance décentralisée

C’est encore plus le cas des autres cryptoactifs. En termes de capitalisation, le deuxième plus important est le projet Ethereum (14% de l’ensemble des cryptoactifs).

Contrairement au bitcoin, l’offre d’ether, l’unité de compte du réseau Ethereum, est illimitée. Le rythme de création “monétaire”, appelé inflation dans le jargon des cryptoactifs, s’est même accéléré depuis le début de l’année selon les spécialistes de Fidelity Digital Assets. L’ether ne peut ainsi pas être considéré comme une réserve de valeur, mais plus comme un moyen de profiter du succès du réseau ethereum, utilisé pour différentes applications comme les échanges de NFT (jetons non fongibles comme des œuvres numériques), la finance décentralisée, le métavers…

L’année dernière, Matthew Sigel, responsable de la recherche sur les actifs numériques chez Van Eck, évaluait les revenus annuels du réseau ethereum à 2,6 milliards de dollars. Pour 2030, il prévoit un chiffre compris entre 2,6 et 137 milliards de dollars, un grand écart qui reflète l’extrême hétérogénéité des prévisions.

Stablecoins et fiscalité

Le troisième cryptoactif par ordre d’importance est le tether (5% de la capitalisation totale), une stablecoin dont l’unique objectif est d’afficher une valeur fixe d’un dollar pour un jeton tether. Ce dernier sert ainsi de dollar numérique, comme l’USDC. Stasis Euro est son équivalent pour la monnaie européenne – mais il s’agit d’un projet d’envergure nettement moindre.

Les stablecoins peuvent aussi avoir un intérêt fiscal pour ceux qui investissent directement en cryptoactifs. Dans certains pays, les plus-values sont taxables lors de la conversion en devise locale, de sorte que le passage par une stablecoin permet de repousser l’imposition. En Belgique, le ministre des Finances Vincent Van Peteghem a estimé qu’une plus-value générée lors d’une transaction entre deux cryptoactifs pouvait aussi être taxable.

Rappelons qu’une plus-value en cryptoactifs est taxée en Belgique si elle ne relève pas de la gestion de bon père de famille, ce qu’il faut entendre par un investissement relativement modeste et un nombre limité de transactions. A défaut, vous serez soumis à la taxe sur la spéculation de 33% (sur le montant de la plus-value), voire à une requalification comme revenu professionnel dans les cas le plus extrêmes.

Comment investir ?

Si vous êtes prêt à tenter l’aventure, vous pouvez décider d’acheter directement des cryptoactifs en passant par une plateforme comme Kraken, Coinbase ou Binance. Ne perdez toutefois pas de vue l’importance de l’analyse du cryptoactif dans lequel vous souhaitez investir. Derrière le bitcoin et l’ethereum, la finalité de nombreux projets paraît parfois obscure, ce qui finit par se ressentir sur leur valeur. Dogecoin, litecoin, bitcoin ash, polkadot, cardano, terra, algorand, etc. cotent ainsi toujours moins d’un cinquième de leur sommet et ne montrent pas de réel signe de reprise.

Une autre option est de passer par des ETF (fonds cotés en Bourse), ou plus précisément des ETC ou ETN en Europe – pour des raisons réglementaires. Si la finalité est la même, la différence peut être importante d’un point de vue fiscal. Une plus-value sur ETC et ETN risque en effet d’être soumise à la taxe Reynders (précompte de 30%). Pour l’éviter, chaque émetteur peut conclure un ruling avec le fisc – ce qui n’a pas encore été annoncé. Les acteurs plus actifs sur le marché belge comme VanEck ou Invesco sont plus susceptibles de le faire pour leurs produits : Invesco Physical bitcoin, (Bourse de Francfort ; ticker BTIC ; frais annuels de 0,9%), VanEck Bitcoin ETN (Euronext Paris ; ticker : VBTC ; frais annuels de 1%) et VanEck Ethereum ETN (Euronext Paris ; ticker : VETH; frais annuels de 1%).

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