TVA harmonisée à 9% par De Wever: qui seraient les gagnants et les perdants ?

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Muriel Lefevre

L’uniformisation du taux de TVA à 9%, évoquée dans les discussions budgétaires de l’Arizona, promet de clarifier un système devenu complexe. Mais cette rationalisation administrative masque une redistribution silencieuse du pouvoir d’achat.

Actuellement, la TVA s’applique quasiment partout. En Belgique, quatre taux coexistent : 0%, 6%, 12% et 21%. Face à cette cacophonie, l’idée d’une harmonisation circule depuis plusieurs années à la rue de la Loi: les taux de 6% pour les biens de première nécessité (pain, livres, médicaments, énergie) et 12% pour la restauration et certains services seraient supprimés au profit d’un taux unique de 9%. Et, à ce petit jeu, il y a des gagnants, mais aussi des perdants.

Une redistribution aux effets contrastés

L’impact de cette réforme varie radicalement selon les secteurs et les profils de consommation :

CatégorieTaux actuelNouveau tauxImpact estimé
Produits de base (pain, médicaments, livres)6%9%+240€/an pour un ménage moyen (8.000 euros de dépense)
Restauration et certains services12%9%-3€ sur une addition de 100€
Rénovation immobilière6%9%+1.500€ sur un chantier de 50.000€

Pour les biens actuellement taxés à 6%, le passage à 9% représente une hausse de 50% du taux applicable. Le prix des légumes, pain, viande ou poisson vont donc augmenter. Tout comme les billets de musées, concerts, spectacles, ou encore les tickets de bus, tram ou train.

Rien que pour l’alimentation et les boissons non alcoolisées, un ménage belge dépense en moyenne 5.600 euros par an selon Statbel, auxquels s’ajoutent les médicaments, l’eau et autres produits de première nécessité. Ceux-ci ne faisant pas l’objet d’une catégorie distincte, on se contentera d’une estimation prudente située entre 6.500 et 8.000 euros par an pour les biens de première nécessité actuellement taxés à 6% (alimentation, médicaments, eau, livres) pour un ménage lambda. Ce qui représenterait une hausse de 240 euros par an.

A ceci on ajoutera que l’énergie, actuellement taxée à 6% depuis 2023, pourrait, elle aussi, voir sa facture légèrement augmenter.

Le choc de la rénovation

Le secteur de la rénovation subirait le coup le plus violent. Actuellement favorisés par un taux de 6% pour encourager la transition énergétique, les travaux verraient leur coût grimper de 1.500 euros sur un chantier de moyenne envergure (50 000 €). Un frein majeur alors que le marché peine déjà à décoller, notamment à Bruxelles où l’absence de gouvernement gèle les primes. Sans compter que cette mesure contrarierait directement les objectifs climatiques du pays.

A ceci s’ajoute encore un certain flou autour de mesures spécifiques. Ainsi les 6% pour la démolition-reconstruction en neuf introduit en juin 2025 devrait rester en vigueur.

Des gains incertains pour la restauration

À l’inverse, les secteurs taxés à 12% bénéficieraient d’une baisse de trois points. Soit principalement la restauration et alimentation hors domicile. Mais l’expérience montre que les entreprises préfèrent souvent préserver leurs marges plutôt que répercuter les baisses de TVA sur les prix. L’effet sur le pouvoir d’achat reste donc hypothétique.

Enfin, parmi les gagnants, on citera aussi le charbon ou les pneus qui bénéficieraient également de prix plus bas.

Simplicité contre équité

Pour les entreprises et les comptables, l’uniformisation à 9% supprimerait les hésitations sur le taux applicable à chaque produit ou service. Fini les litiges sur la classification des biens, les charges administratives liées à la gestion de multiples taux, ou les erreurs de facturation. Un gain de temps et d’argent indéniable pour les professionnels.

Mais cette simplification a un prix social. Les taux réduits de 6% ne sont pas un accident historique : ils visent précisément à alléger la facture sur les biens que tout le monde doit acheter, indépendamment de ses revenus. Augmenter la TVA sur ces produits frappe donc proportionnellement plus fort les revenus modestes.

Au sein de la coalition Arizona, le projet peine donc à trouver consensus : Vooruit ne veut pas toucher à son électorat, et le CD&V réclame un taux zéro pour les produits essentiels. Et du côté du MR on se refuse toute hausse. Autant dire que sa mise en œuvre s’annonce délicate.

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