Après avoir conquis les consommateurs européens avec ses prix imbattables sur les vêtements et gadgets, Temu s’attaque désormais à un nouveau marché : l’alimentation. Ce virage stratégique, amorcé en 2025, pourrait bien bouleverser l’équilibre du discount alimentaire en Europe, dominé jusqu’ici par des géants comme Aldi et Lidl.
Temu, filiale du groupe chinois PDD Holdings, a connu une croissance fulgurante en Europe. Temu est arrivé en Belgique dans le sillage de son expansion européenne, amorcée fin 2022. En 2023, sa présence y était encore marginale, mais elle a rapidement gagné en visibilité grâce à une stratégie marketing agressive, notamment sur les réseaux sociaux comme TikTok et Instagram.
Un repositionnement imposé
En France, la part de marché de Temu dans le secteur du discount est passée de 8 % en 2023 à 19 % en 2025, avec une croissance des ventes de +129 % en 2024. Bien que la Belgique soit un marché plus petit, les tendances y sont similaires : forte progression en 2024, notamment dans les segments de la mode, des accessoires et des articles ménagers à bas prix.
Mais cette ascension s’est heurtée à des obstacles réglementaires : surtaxes douanières aux États-Unis, fin des exemptions fiscales sur les petits colis en Europe, et contrôles accrus sur les produits importés.Pour contourner ces freins, Temu a adopté une stratégie de recentrage : au lieu d’importer depuis la Chine, elle s’approvisionne désormais auprès de fournisseurs européens. Ce modèle permet de réduire les délais de livraison, de rassurer les consommateurs sur la qualité des produits, et surtout, d’éviter les nouvelles taxes.
Des partenariats locaux
Temu a commencé par l’Allemagne, où elle a noué des partenariats avec des marques locales comme Wurstbaron (charcuterie) et Mr Tom (barres aux noix). Ces produits, à longue conservation, sont idéaux pour la vente en ligne. La plateforme prévoit d’étendre cette stratégie à d’autres pays, notamment la Suisse, en adaptant son offre aux goûts locaux.
L’objectif est clair : proposer une sélection de produits alimentaires, cosmétiques et de jardinage à bas prix, tout en respectant les normes européennes. Temu ne cherche pas à concurrencer les supermarchés sur les produits frais, mais plutôt à s’imposer sur les produits de grande consommation à forte rotation (FMCG).
Une menace pour les enseignes traditionnelles ?
Aldi et Lidl, piliers du discount alimentaire en Europe, peuvent-ils être inquiétés ? À court terme, Temu ne dispose pas de l’infrastructure logistique pour rivaliser sur les produits frais ou les achats de dernière minute. Mais sur les produits secs, les snacks, les cosmétiques ou les articles ménagers, dont la durée de conservation est bien plus importante, la plateforme représente une alternative crédible, notamment pour les jeunes consommateurs urbains, habitués à l’achat en ligne.
Avec ses prix ultra-compétitifs, son marketing agressif (notamment sur TikTok) et sa capacité à renouveler rapidement son offre, Temu attire une clientèle sensible au pouvoir d’achat. Elle n’est plus perçue comme une simple plateforme “low cost”, mais comme une marketplace généraliste capable de concurrencer des enseignes comme Cdiscount, Ikea ou même Carrefour sur certains segments.
Vers une redéfinition du discount en ligne ?
L’entrée de Temu sur le marché alimentaire européen marque une nouvelle étape dans la transformation du commerce de détail. En combinant sourcing local, prix cassés et puissance logistique, la plateforme pourrait bien redéfinir les règles du discount en ligne. Si elle parvient à gagner la confiance des consommateurs sur des produits sensibles comme l’alimentation, elle pourrait devenir un acteur incontournable du e-commerce européen.
Reste à savoir si les producteurs locaux accepteront durablement ce nouveau canal de distribution, et si les consommateurs seront prêts à acheter leurs produits alimentaires sur la plateforme.