Secteur immobilier belge: qu’attendre d’ici 2025?

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L’attentisme reste de rigueur sur le marché immobilier. Le marché existant continue de profiter des déboires du marché neuf. Les investisseurs sont toujours absents alors que l’ampleur et le coût des rénovations énergétiques freinent bon nombre d’acquéreurs. Les taux pourraient passer sous la barre des 3%, mais personne ne peut toutefois prédire si 2025 sera plus positive.

Rien n’a vraiment changé ces derniers mois : le marché immobilier continue de tourner au ralenti. Les investisseurs ont tourné le dos à l’immobilier, effrayés par la hausse des taux et attirés par des actifs plus intéressants. Le segment du neuf est particulièrement déserté. Seul le marché existant maintient une certaine dynamique de vente, même si de nombreux acquéreurs sont quelque peu surpris par le coût des rénovations énergétiques à effectuer pour rentrer dans les clous. Sans parler que l’incertitude autour de l’octroi des primes, surtout à Bruxelles, n’est pas de nature à redonner confiance aux acquéreurs.

1. L’incertitude favorable au marché existant

“Nous restons dans un marché immobilier particulièrement attentiste, relève le notaire Renaud Grégoire, porte-parole de la Fédération des notaires. L’incertitude et le doute persistent. Ce qui est la pire situation. Si elle se redresse légèrement, la dynamique de ventes reste faible. Les investisseurs ont des difficultés à repasser à l’action. Il faut avouer qu’ils ont acheté beaucoup d’immobilier par le passé et qu’ils réfléchissent peut-être à rééquilibrer leur portefeuille. Les acheteurs sont freinés également par l’ampleur des rénovations énergétiques à prévoir. Sans parler des conditions bancaires qui restent relativement strictes. Autant d’éléments qui ne sont pas de nature à relancer la machine.”

Un constat partagé en partie par Aymeric Francqui, codirecteur de l’agence immobilière Latour & Petit : “Nous avons l’impression que le vent tourne quelque peu et que nous allons vers une meilleure période. Le marché locatif et le marché neuf souffrent tous les deux d’un manque criant de biens de qualité. Ce qui pousse les prix vers le haut. Pour le marché existant, même si le nombre de visites à effectuer pour vendre un bien est plus important, c’est toutefois un segment qui se maintient. D’autant que l’écart avec le neuf ne va faire que grandir si la différence entre le taux de TVA à 21 % et les droits d’enregistrement est maintenue.”

Cette dichotomie entre le marché neuf et le marché existant semble au cœur des enjeux. Surtout qu’aucune fumée blanche ne semble venir du côté politique pour soutenir les nouvelles constructions.

“Le marché locatif et le marché neuf souffrent tous les deux d’un manque criant de biens de qualité.” – Aymeric Francqui (Latour & Petit)

“Toute l’incertitude actuelle favorise le marché existant au détriment du marché neuf, lance Éric Verlinden, codirecteur de Goddard-Loyd. Le marché existant est aujourd’hui à l’équilibre en matière de prix, avec des transactions qui s’effectuent rapidement si le prix fixé par le vendeur est juste. Il est possible d’avoir une marge de négociation pour les logements qui possèdent un défaut. Je relève aussi que l’impact de la PEB sur le marché se marginalise quelque peu. Tant sur le marché acquisitif que locatif, ce n’est plus une priorité. C’est notamment lié au coût de l’énergie qui est plus faible et considéré comme acceptable de même qu’au montant très important qu’il faut désormais mettre sur la table pour rénover son bien.”

2. Les prix repartiront à la hausse en 2025

Ces 20 dernières années, pour retrouver des prix de l’immobilier en baisse, il faut bien chercher. Deux seules diminutions sont d’ailleurs à signaler : en 2009 et 2014. Et encore, elles n’ont pas dépassée les 0,4 %. La force de l’immobilier belge est de n’avoir jamais subi de fortes corrections ou d’envolées de ses prix. Au contraire d’autres pays européens. La France vient par exemple de voir ses prix sur le marché existant baisser de 4,9 % en un an. Chez nous, BNP Paribas Fortis prévoit une stabilisation des prix en 2024 (0 %) avant une remontée en 2025 (+ 3,8 %) et 2026 (4,2 %). L’évolution des prix reste toutefois bien différente entre les biens rénovés et les passoires énergétiques.

“D’après nos analyses, nous devrions assister à une hausse des prix de 2 % en 2024 avec, en Région wallonne, une hausse plus importante pour les biens existants d’entrée de gamme et rénovés, pointe Éric Verlinden. Je perçois également une diminution des prix pour les terrains à bâtir. Le montant pour construire une maison neuve devient trop important pour de nombreux Wallons, ce qui va freiner ce marché. Seul le Brabant wallon, la côte belge et les grandes villes devraient y échapper.”

3. Le neuf toujours dans le rouge

Le segment du neuf traverse toujours une période compliquée. Les promoteurs immobiliers sont sous pression. Ils doivent gérer des problématiques multiples liées à la durée d’obtention des permis, à la hausse des coûts de construction, à la hausse des taux d’intérêt tout en voyant les investisseurs déserter le marché. Or, ces derniers siphonnent habituellement 50 à 60 % des ventes. “Il serait opportun que les prix n’augmentent plus et que le marché se stabilise quelque peu, espère Thierry Kemp, directeur du département neuf chez Victoire. Sans quoi le nombre de ventes ne va jamais reprendre.”

Le segment du neuf va en effet au-devant de grandes difficultés si ses prix continuent à connaître une telle croissance. Le nombre d’acquéreurs potentiels diminuant de plus en plus.

Et ce ne sont pas les chiffres de vente de la Fédération des notaires, particulièrement interpellants tant ils sont faibles, qui vont redonner un semblant d’enthousiasme. Si le marché semble s’être repris quelque peu depuis lors (voir notamment la vente éclair des 121 appartements du projet OXY à Bruxelles), il s’agit d’un indicateur clair.

“Le marché neuf souffre surtout d’un manque d’appartements mis sur le marché, lié à un déficit de permis, relève Aymeric Francqui. Cela gonfle terriblement le coût d’un projet pour un promoteur. L’autre problème est que les prix ont augmenté bien plus vite que le pouvoir d’achat. Le prix de vente est aujourd’hui bien trop élevé. Le seul point positif pour le marché neuf, c’est le léger retour des investisseurs et le fait que l’augmentation des loyers rend cet actif attractif.”

Quid pour 2025 ? L’optimisme n’est pas de rigueur. “L’année 2025 ne s’annonce pas meilleure que 2024, relève Kim Ruysen, directeur de Trevi. Il suffit de regarder le nombre de permis qui sont octroyés ces derniers mois et les prix de vente qui sont annoncés. La seule solution est de diminuer le coût du projet pour un promoteur. Ce n’est pas uniquement les taux qui freinent le marché mais l’ensemble des facteurs négatifs.”

Les signatures de contrats de location ont baissé de 20% ce dernier semestre. © Getty Images

4. Le marché locatif sous tension

La demande locative reste élevée, surtout à Bruxelles et dans les grandes villes belges. Le déficit de biens de qualité à louer reste le principal problème. Federia, la fédération des agents immobiliers, constate une baisse de 20 % des biens disponibles à la location ces derniers mois. Une situation qui s’explique par un déficit de permis pour des constructions neuves et par le départ d’investisseurs intéressés par les rénovations de grande ampleur avant une mise en location. Sans parler que la hausse des prix de l’immobilier a poussé certains candidats à l’achat à rester sur le marché locatif.

“La baisse de 20 % du nombre de nouveaux contrats est particulièrement inquiétante d’autant que la demande, elle, ne diminue pas et reste très élevée, pointe Charlotte De Thaye, directrice générale de Federia. Le gouvernement doit en être conscient : ce n’est pas le prix des loyers qui pose problème mais bien la disponibilité des biens mis à la location.”

“Toute l’incertitude actuelle favorise le marché existant au détriment du marché neuf.” – Éric Verlinden (Goddard-Loyd)

5. L’impact des droits d’enregistrement à 3%

Si la réforme est approuvée dans les temps par le gouvernement wallon, les droits d’enregistrement diminueront de 12,5 % à 3 % à partir du 1er janvier 2025 lors de l’acquisition d’une habitation propre et unique. Une baisse attendue de longue date. Ceux qui possèdent déjà une habitation pourront bénéficier de cette réduction s’ils assurent la revendre dans les trois ans. Voilà de quoi engager la Wallonie sur la même voie que la Flandre. Du moins en partie car aucune obligation de rénovation n’accompagne les acquéreurs wallons.

Quant à l’activité immobilière, elle ne devrait pas connaître de ralentissement d’ici la fin de l’année puisque la date de l’acte de vente sera prise en compte et non celle du compromis, signé le plus souvent quatre mois avant. Reste que cette mesure qui vise notamment à favoriser l’accès à la propriété des primo-acquéreurs pourrait également avoir quelques impacts inattendus.

“Dans certaines zones sous tension, il est possible que la réduction des coûts de mutation accentue les difficultés à accéder à la propriété, en renforçant la dimension spéculative des marchés, souligne Jean-Marie Halleux, professeur de géographie économique et président du Lepur, le pôle de recherche en développement urbain et territorial de l’ULiège. Avec des coûts de mutation proches de 15 %, il n’était pas envisageable d’augmenter les enchères en tablant sur une rapide revente. Cette situation a donc permis d’éviter une déconnexion entre les valeurs immobilières et les fondamentaux de l’économie. Cette mesure va permettre à certains acquéreurs de disposer de davantage de moyens, ils vont donc avoir recours à ‘l’effet butoir’, c’est-à-dire la volonté des ménages de hausser au maximum le montant à débourser pour leur logement.”

6. Des taux sous les 3%, le déclic?

Le nombre de crédits octroyés lors du premier semestre reste dans des standards particulièrement faibles. Il faut remonter à 2016 pour retrouver une telle dynamique.

“Le nombre de demandes de crédit a légèrement augmenté pour le deuxième trimestre consécutif, constate toutefois Ivo Van Bulck, secrétaire général de l’Union professionnelle du crédit. Compte tenu également de la légère augmentation des crédits hypothécaires au cours de ce deuxième trimestre, nous nous attendons à ce que la reprise se poursuive au cours des prochains trimestres.”

Quant au taux d’intérêt, un pic semble avoir été atteint en fin d’année dernière. “Les taux d’intérêt sur les nouveaux prêts habitation à au moins 10 ans ont atteint un pic de 3,6 % en décembre 2023, relève Arne Maes, senior economist chez BNP Paribas Fortis. Les derniers chiffres indiquent un taux d’intérêt moyen de 3,23%.”

Il est désormais possible de passer sous la barre des 3 % pour un prêt de 20 ans.

Reste qu’en consultant le baromètre des taux du site guide-epargne.be, on constate qu’il est désormais possible de passer sous la barre des 3 % pour un prêt de 20 ans, certains candidats à l’achat atteignant même les 2,72 %. “Obtenir un prêt hypothécaire à 2,8 % ou 3 % est quand même très acceptable et est de nature à relancer le marché, lance Kim Ruysen. L’important était surtout d’enrayer le contexte haussier.”

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