À Bruxelles, une nouvelle étude de l’ULB révèle que les propriétaires dépensent bien moins pour l’entretien de leurs logements que ce que prévoit la fiscalité. Résultat : la rente locative grimperait jusqu’à 60 % du loyer payé par les ménages.
À Bruxelles, où 62 % des ménages sont locataires, la question des loyers pèse lourdement sur le budget des habitants. Entre 2010 et 2020, les loyers ont augmenté de 20 % de plus que l’inflation (mesurée à partir de l’indice santé). Désormais, les loyers représentent plus de 45 % du budget des ménages appartenant aux 25 % les plus pauvres, lesquels renoncent à d’autres dépenses essentielles pour se loger. Une étude exploratoire menée par Margot Dior Peelman et Hugo Périlleux (Université libre de Bruxelles) révèle que les frais d’entretien réellement assumés par les bailleurs sont bien moindres que ceux estimés par les pouvoirs publics. Conséquence : la rente tirée de la location apparaît particulièrement élevée.
Des frais d’entretien bien en deçà des estimations
En Belgique, la fiscalité foncière part de l’hypothèse que 40 % du revenu locatif couvre les frais d’entretien et de réparation. Or, l’étude démontre que la réalité est toute autre : sur la base d’entretiens avec 15 bailleurs possédant 22 logements, ces frais s’élèvent en moyenne à environ 10 % du loyer. Même les estimations issues de la littérature grise, qui situent ces coûts autour de 20 %, paraissent largement surestimées.
Une rente locative estimée entre 50 et 60 %
En appliquant le raisonnement des économistes classiques, la rente correspond à l’écart entre le prix payé (le loyer) et la valeur, entendue comme le travail nécessaire à la mise à disposition du bien. Or, à Bruxelles, où la majorité des logements sont anciens et déjà amortis, la rente locative nette représenterait 50 à 60 % du loyer.
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À cela s’ajoute un constat frappant : le temps de travail consacré par les bailleurs à la gestion d’un logement est très faible, environ 4 heures par mois et par bien. Rapporté aux loyers encaissés, cela correspond à des « salaires fictifs » largement supérieurs aux rémunérations moyennes en région bruxelloise.
Des résultats appelés à être élargis
Les auteurs reconnaissent les limites de leur enquête, fondée sur un échantillon restreint de propriétaires souvent réticents à partager leurs chiffres. Mais ils insistent sur la nécessité de reproduire ce type d’analyse à plus grande échelle, afin d’alimenter le débat sur la régulation des loyers et la fiscalité foncière.
Réaction de Federia, la fédération des agents immobiliers francophones de Belgique
En tant que Fédération, Federia dispose d’une vision claire des métiers d’agents immobiliers – syndics, courtiers et régisseurs- et des réalités du terrain. A ce titre, elle conteste fermement la méthodologie de ladite “étude”, les conclusions non fondées des auteurs ainsi que le titre de l’article lourd de sous-entendus.
Une méthodologie scientifiquement irrecevable
L’étude repose sur un échantillon de seulement 15 bailleurs et 22 logements, sur un parc de plus de 300 000 logements locatifs à Bruxelles. Un tel panel n’est en aucun cas être représentatif.
De plus, une série de coûts majeurs qui pèsent sur la rentabilité réelle d’un investissement locatif ont été totalement ignorés dans le calcul, comme les droits d’enregistrement (12,5 %), les frais de notaire, les charges financières, les rénovations PEB, les mises aux normes…. En omettant ces éléments déterminants, elle dresse une image biaisée et trompeuse de la réalité économique à laquelle les bailleurs sont confrontés. Par ailleurs, le cadre théorique retenu, inspiré de Ricardo et de Marx, repose sur un postulat idéologique, réducteur et stigmatisant qui n’a aucunement sa place dans une recherche académique sérieuse.
Une présentation trompeuse, stigmatisante et contre-productive
Réduire la gestion d’un patrimoine immobilier à un « salaire fictif » de 400 €/h, comme le font les auteurs, est une construction démagogique, sans pertinence économique.
Pareil raccourci jette l’opprobre sur l’ensemble des propriétaires et investisseurs privés, qui sont pourtant indispensables pour maintenir et développer l’offre de logements
Federia tient, en effet, à rappeler que le marché locatif bruxellois souffre d’un déficit structurel. La priorité doit être d’inciter les investissements privés pour augmenter, de diversifier les biens disponibles et de permettre à un plus grand nombre d’accéder à un logement abordable. Décourager les investisseurs par des analyses biaisées ne peut qu’aggraver la pénurie et, in fine, pénaliser les locataires.