Que faire de son habitation en cas de séparation ?
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Lorsqu’un couple se sépare, la question du logement devient primordiale, surtout en présence d’enfants. Beaucoup souhaitent conserver leur maison pour garantir une certaine stabilité familiale, mais cela n’est pas toujours faisable d’un point de vue financier. Quelles sont les options envisageables et quels sont les pièges à éviter ?
1. Racheter la part de son ex-conjoint : une solution onéreuse
Si l’un des partenaires souhaite conserver le bien immobilier, il doit racheter la part de son ex-conjoint. Une chose plus facile à dire qu’à faire. Plusieurs éléments clés peuvent compliquer la situation :
L’évaluation de la valeur actuelle du bien
La détermination du prix du logement peut susciter des désaccords. En cas de litige, il est possible de solliciter un expert immobilier indépendant pour estimer objectivement le bien. Une fois la valeur du bien déterminée, on soustrait le montant restant du prêt pour obtenir la valeur nette à partager.
Exemple : Une maison est estimée à 400 000 €, avec un prêt hypothécaire en cours de 180 000 €. La valeur nette du bien est donc de 220 000 €. Si les partenaires ont investi à parts égales, celui qui souhaite garder le bien devra verser 110 000 € à son ex-conjoint.
Cependant, l’investissement n’est que rarement parfaitement égal. Il arrive très souvent que l’un des partenaires ait investi davantage (apport personnel, travaux). Ces éléments doivent être pris en compte dans le calcul de la somme à verser. Si rien n’a été acté par écrit, les différentes interprétations peuvent être source de conflit. Comme le dit l’adage : “Quand on aime, on ne compte pas ; quand on n’aime plus, on compte.”
Des frais annexes
En Belgique, lorsqu’un bien est partagé après une séparation, des droits d’”enregistrement sur partage” sont dus :
- Région de Bruxelles-Capitale : 1 %
- Région wallonne : 1 %
- Région flamande : 2,5 % depuis le 1er août 2012, avec un abattement de 50 000 €, majoré de 20 000 € par enfant dans certaines situations (divorces, cessations de cohabitation légale).
S’il s’agit d’un nouveau crédit hypothécaire, il faut aussi prévoir des frais de notaire et d’enregistrement.
Bon à savoir : Certaines banques permettent de réemprunter la somme déjà remboursée, évitant ainsi de nouveaux frais d’hypothèque.
2. Rester copropriétaires : une solution temporaire à encadrer
Certains ex-partenaires choisissent de rester copropriétaires, notamment lorsqu’ils ont des enfants. Cette solution permet à l’un des conjoints d’y vivre jusqu’au départ des enfants.
Cependant, cette situation comporte des risques :
- Les deux ex-partenaires restent responsables du prêt hypothécaire, même si un seul occupe le logement.
- Tant que le crédit est en cours, chacun a des obligations financières, ce qui peut bloquer l’achat d’un autre bien.
- Des conflits peuvent surgir sur les charges du logement.
Qui paie quoi ? Il est essentiel de définir des règles claires dès le départ :
- Qui rembourse le crédit immobilier ?
- Qui paie les charges (entretien, taxes, assurances) ?
- À quelle date la vente sera-t-elle envisagée ?
Ces décisions doivent être officialisées via une convention notariée pour les couples mariés. Pour les cohabitants, un accord écrit privé peut suffire, mais il est vivement conseillé de le faire enregistrer devant notaire.
3. Vendre le bien : attention aux frais cachés
Si ni le rachat ni la copropriété ne sont possibles, la vente devient inévitable. Mais attention aux frais imprévus :
- Indemnité de remboursement anticipé : La banque peut réclamer une pénalité de trois mois d’intérêts.
- Frais de mainlevée hypothécaire : Si le crédit était garanti par une hypothèque, des frais sont à prévoir.
- Solde insuffisant : Si la vente ne couvre pas le prêt et les frais, les ex-partenaires doivent payer la différence.
Que faire si la vente ne couvre pas la dette ? Si le produit de la vente ne suffit pas à rembourser le prêt, les ex-partenaires doivent combler la différence. Si l’un ne peut pas payer, l’autre peut être contraint d’avancer les fonds.
Anticiper pour éviter les mauvaises surprises
Il est possible d’anticiper les conséquences d’une séparation en prenant quelques précautions.
Choisir le bon régime matrimonial ou une convention de cohabitation
Le cadre légal de l’union influence la manière dont le bien immobilier sera partagé en cas de séparation. Lorsqu’un couple marié achète un bien, la répartition dépend du régime matrimonial adopté. En cas de régime de communauté de biens, le bien appartient aux deux époux s’il est acquis après le mariage (même si un seul a contribué davantage à l’achat). En cas de divorce, le bien est partagé à parts égales, sauf si des clauses spécifiques sont prévues. En cas de séparation des biens, chaque époux reste propriétaire des biens acquis à son nom. Si l’un achète un bien immobilier seul, il en reste pleinement propriétaire après la séparation. Mais dans les deux cas, il est possible d’inclure des clauses spécifiques sur la répartition des biens en cas de séparation. Un notaire peut vous aider à structurer un contrat adapté à votre situation.
Cohabitants légaux ou de fait : prévoir un accord écrit
Pour les couples non mariés, les règles sont différentes. Pour ceux qui vivent en cohabitation légale, chacun reste propriétaire de ce qu’il a acheté. Un bien immobilier acheté ensemble est soumis aux règles du régime de l’indivision (chacun possède une part proportionnelle à son investissement, sauf mention contraire). Pour les cohabitants de fait, il n’existe aucun cadre juridique spécifique. Si aucun document n’encadre la répartition, les conflits peuvent être longs et coûteux. Il est donc vivement conseillé d’établir une convention de cohabitation devant notaire, mentionnant la répartition des apports dans le bien immobilier.
Par exemple, en optant pour un achat en indivision avec mention des quotités. Chaque partenaire détient une part du bien proportionnelle à son investissement (ex. : 60 % – 40 % si l’un a contribué davantage). On peut également ajouter une clause de récompense : si un des partenaires investit plus (par exemple, un apport personnel ou le financement de travaux), un remboursement de cette somme peut être prévu en cas de séparation.
Exemple : Si l’un des partenaires apporte 50 000 € d’apport personnel lors de l’achat et que cela n’est pas mentionné dans l’acte, il risque de ne jamais récupérer cet argent en cas de séparation.
Sécuriser le remboursement du prêt hypothécaire
Si un prêt hypothécaire est contracté ensemble, les deux partenaires restent solidairement responsables du remboursement, même après la séparation. Quelques précautions permettent d’éviter des complications :
- Opter pour une clause de solidarité limitée : Elle permet d’éviter qu’un des partenaires ne doive rembourser seul en cas de séparation.
- Souscrire une assurance solde restant dû : Elle protège les co-emprunteurs en cas de décès de l’un d’eux.
- Fixer une convention écrite sur le remboursement du prêt : Si l’un des partenaires rembourse plus que l’autre, un accord écrit doit préciser s’il pourra récupérer ce surplus en cas de séparation.
Anticiper les frais et charges du logement
Même si un bien est acheté à deux, il est courant que l’un des partenaires paie plus de frais (rénovations, entretien, taxes). Pour éviter toute confusion lors d’une séparation, il est recommandé de :
- Tenir un registre des dépenses pour prouver qui a financé quoi.
- Inclure une clause d’indemnisation dans l’acte notarié, précisant si ces dépenses seront prises en compte dans le partage.
- Définir clairement qui paiera les charges fixes (électricité, eau, assurances).
Enfin, pour les plus prévoyants, ou cyniques, c’est selon, sachez qu’il est aussi possible de rédiger une convention de séparation anticipée devant notaire. Ce document permet de fixer à l’avance ce qu’il adviendra des biens communs en cas de rupture.
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