Pourquoi les Belges déménagent-ils moins et plus tard que leurs voisins européens?

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Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste

Pour la plupart des Belges, déménager représente bien plus qu’un changement d’adresse. C’est une étape importante dans leur parcours de vie. Un besoin qui ne se reflète pourtant pas dans leurs habitudes de déménagement… Ils sont moins mobiles que leurs voisins, et attendent plus longtemps avant de franchir ce cap. Comment expliquer cette situation contradictoire?

Les Belges ne semblent pas être les champions du remplissage de cartons de déménagement, si l’on en croit une récente enquête réalisée par Immoweb. Le site d’annonces immobilières a exploré le parcours immobilier des Belges et les résultats sont parlants: les Belges bougent moins souvent, et surtout plus tard que leurs voisins. Et pourtant, ce n’est pas l’envie qui leur manque.

Les Belges déménagent moins que leurs voisins

Par amour, pour le travail ou pour changer d’environnement… Les Belges déménagent en moyenne 4 fois au cours de leur vie. Soit moins que leurs voisins français, allemands ou même hollandais, pour qui le changement d’adresse est plus fréquent. Aux Pays-Bas, par exemple, on déménagerait deux fois plus souvent que chez nous.

Pour autant, il faut nuancer. Cette fréquence varie selon les régions: à Bruxelles, elle dépasse les 4 déménagements en moyenne, tandis qu’en Wallonie et en Flandre, elle est légèrement inférieure. “Les Bruxellois apparaissent comme plus mobiles, une tendance qui peut s’expliquer par une offre de logements plus dense, un marché locatif plus dynamique et une population en moyenne plus jeune” explique Alicia Rees, Doctorante en démographie (UCLouvain)

Mais pourquoi bouge-t-on si peu en Belgique? Cela pourrait en partie s’expliquer par des raisons financières. La hausse des taux, les prix toujours plus élevés du mètre carré… Changer d’adresse demande un certain budget. Alors le faire plus de quatre fois dans une seule vie est, pour certains, impossible. Il y a toujours la possibilité de déménager sans acheter. En cela, les locataires sont généralement beaucoup plus mobiles.

Mais trois quarts des Belges sont propriétaires de leur logement, ce qui complique davantage les déménagements. Il faut non seulement prendre en compte la différence entre le prix d’achat et le prix de revente, y ajouter tous les frais supplémentaires accumulés au cours de la vie (droits d’enregistrements, frais de notaire, éventuels travaux…). Mais aussi additionner l’ensemble des intérêts sur le prêt hypothécaire. Bref, une somme qu’il faut parvenir à compenser lors de la revente du bien.

Quitter le nid parental: un départ de plus en plus tardif

Selon les résultats de l’étude, les jeunes quittent le domicile parental en moyenne à 22 ans. Là encore, on se démarque de nos voisins, qui prennent leur envol un peu plus tôt. La moyenne est de 21 ans en France et 20,5 ans en Allemagne. 22% des Belges interrogés ont même attendu d’avoir 30 ans (ou plus) avant de déménager pour la première fois.

Autre constat: de nombreux jeunes adultes sont contraints de retourner vivre chez leurs parents. L’étude d’Immoweb révèle ainsi que 17% des Belges réemménagent dans le domicile familial après une première expérience d’indépendance. C’est ce qu’on appelle les « enfants boomerang ».

« Pour de nombreux jeunes adultes, le foyer parental est une solution face aux incertitudes économiques ou personnelles », explique Alicia Rees. Précarité économique, marché du travail instable, difficulté à contracter un prêt immobilier… Diverses raisons motivent ce retour au foyer parental. « Les jeunes travailleurs font souvent face à des emplois précaires ou temporaires, des difficultés à trouver un logement ou encore contracter un emprunt », précise encore la doctorante.

Vivre dans son logement idéal: une utopie?

Même après plusieurs changements d’adresse, la majorité des Belges voit encore son habitat comme une étape provisoire. Seuls 37% des Belges considèrent leur logement actuel comme un rêve devenu réalité. À Bruxelles, par exemple, seulement 20% des habitants sont satisfaits de leur logement, contre 38% en Flandre et 40% en Wallonie.

Mais pourquoi tant de Belges considèrent-ils leur logement actuel comme une solution d’attente?

  • Coût de la vie: le coût du logement pèse de plus en plus lourd dans le budget des ménages. Ajouté à un emprunt parfois difficile à obtenir et à la flambée des prix de l’énergie qui rend certains logements trop coûteux à entretenir, les Belges doivent parfois s’armer de patience avant de trouver leur bonheur.
  • Manque d’options sur le marché: entre la pénurie de biens abordables et la multiplication des logements vétustes et énergivores, le marché immobilier belge souffre d’un déséquilibre entre offre et demande. Par conséquent, les habitants restent dans des logements provisoires, faute d’alternative satisfaisante.
  • Attentes non comblées: beaucoup de Belges font des concessions sur la localisation ou la taille de leur maison pour des raisons budgétaires. Et espèrent pouvoir déménager dans un quartier plus attractif, voire un logement plus grand dès que leur situation le permettra.

« Qu’elle soit un long fleuve tranquille ou pas toujours linéaire, la vie de chacun est faite de choix, de surprises, d’événements (plus ou moins heureux), de rencontres, et aussi parfois d’accidents… Autant d’étapes que l’on peut lire et retrouver dans la trajectoire immobilière de chacun », conclut l’enquête. Il apparaît clairement que les difficultés économiques et le marché immobilier tendu ont une influence sur la mobilité résidentielle. À ce titre, le taux de déménagement s’impose donc comme un indicateur économique et social intéressant.

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