Les nouvelles ambitions immobilières de Noshaq? La réhabilitation de sites industriels liégeois désaffectés
La filiale immobilière de Noshaq (ex-Meusinvest) monte en puissance. De simple bailleuse de fonds, elle est devenue développeur immobilier. Un repositionnement ambitieux qui se concrétise déjà par une douzaine de projets dont la valeur atteint les 345 millions. Et c’est loin d’être fini. La reconversion des sites industriels désaffectés est désormais en ligne de mire.
Un virage stratégique et des ambitions nettement revues à la hausse. En demi-léthargie depuis plus de 30 ans, le pôle immobilier de Noshaq (ex-Meusinvest) est entré depuis quelques mois dans une nouvelle dimension. De quoi débouler à grande vitesse sur la place immobilière liégeoise et susciter, malgré les perplexités de départ, un intérêt certain des promoteurs et autres investisseurs.
Il faut dire que Noshaq Immo n’arrive pas les poches vides. Son bas de laine de 32,5 millions d’euros accumulé au fil des ans s’est transformé aujourd’hui en un potentiel d’investissement de plus de 345 millions. Le capital de départ étant désormais doublé par des tiers investisseurs alors que le solde est apporté par les banques. ” Ce montant représente l’ensemble des projets que nous portons dans la province de Liège, confesse Frédéric Driessens, CEO de Noshaq Immo. Il a dépassé les attentes puisque nous espérions atteindre les 300 millions dans le courant de l’année 2020. Nous sommes partie prenante dans une douzaine de dossiers où nous sommes soit à la manoeuvre, soit en appoint. Mais il s’agit dans tous les cas de partenariats. Ma plus grande fierté aujourd’hui est de voir que quantité de promoteurs et investisseurs viennent frapper à notre porte. Dont même certains Flamands. ”
Aujourd’hui, la vraie nouveauté est le positionnement de Noshaq en matière de réhabilitation de sites industriels liégeois désaffectés.
Noshaq Immo est donc en quelque sorte le réveil d’une belle endormie. Il est bien loin le temps où, alors doté d’un capital de 4 millions, cette filiale n’était qu’un simple bailleur de fonds pour entreprises dans le besoin d’infrastructures. ” Nous n’étions alors qu’un outil de support à des projets d’intérêt régional, poursuit Frédéric Driessens, à la tête d’une cellule de cinq personnes. Cet outil a, par exemple, permis de créer Liege Airport. Mais il n’était pas valorisé, pas rentable et ne disposait pas de moyens propres. Le funding venait de Meusinvest. Il n’y avait en tout cas pas de volonté d’être développeur. ”
La dynamique actuelle, déterminée en 2018 par le conseil d’administration et concrétisée principalement ces derniers mois, reprend en fait des ambitions somme toute assez classiques : consolider les projets actuels, en développer de nouveaux, effectuer de nouvelles acquisitions ou encore augmenter le funding par des apports privés. Noshaq Immo n’a en tout cas pas vocation à aller seul dans un projet. Soit il sélectionnera des projets immobiliers, consolidera le foncier, déterminera une programmation qui a du sens et fera ensuite appel à des partenaires. Soit il fera l’appoint dans un projet développé par un tiers. Dans tous les cas, l’idée est de collaborer avec des acteurs institutionnels, des fonds (de pension, d’assurance, etc.), des acteurs de l’immobilier (promoteurs et pas uniquement liégeois) ou des investisseurs privés pour boucler le financement. ” Il y a beaucoup d’entrepreneurs liégeois qui ont réussi et qui souhaitent investir dans des projets immobiliers, note Frédéric Driessens. Mais ce n’est pas la rentabilité qui les guide. Ils veulent investir dans des projets liégeois qui ont du sens. Il s’agit donc souvent de réhabilitations patrimoniales qui donnent un nouvel élan à la ville. ”
La revitalisation urbaine du Grand Léopold
Quatre segments sont dans le viseur de Noshaq Immo : la création d’un creative district dans le quartier du Grand Léopold, la biotech, la reconversion de sites industriels désaffectés et la participation dans des projets de tiers, un dernier volet qui permet surtout d’assurer une rentabilité. ” La volonté est avant tout de sélectionner des projets qui créent une infrastructure pour les écosystèmes que Noshaq souhaite développer, explique Frédéric Driessens. Nous n’allons pas, par exemple, développer des bureaux pour faire des coups financiers. Chaque projet doit apporter une valeur ajoutée et participer à la réhabilitation locale. ”
Comme le démontre par exemple le positionnement de Noshaq dans le Grand Léopold. Il y mêle la réhabilitation de chancres et la revitalisation d’un quartier pour en faire un hub créatif. En témoigne la poursuite de l’aménagement de son quartier général situé sur la place Saint-Etienne par la rénovation d’un second bâtiment (Copis, la demande de permis vient d’être déposée) et la construction d’un troisième (Chapelle des Clercs). Soit 4.600 m2 au total. Suivent le réaménagement de la Grande Poste, la construction de kots avec Eckelmans dans Relais Campus (5.500 m2), la construction de bureaux au Fiacre (3.300 m2) et la réhabilitation de la Madeleine 4.0 (8.700 m2) en bureaux, logements et commerces. ” Il est vrai qu’il s’agit de projets que nous n’aurions pas réalisés il y a encore quelques années, fait remarquer Hugues Danze, directeur de la communication de Noshaq. La revitalisation urbaine ne figurait pas dans nos priorités. Pour le reste, il reste encore de nombreux chancres à réhabiliter dans ce quartier. L’idée est d’y rassembler une série de métiers créatifs. ” Et Frédéric Driessens d’ajouter : ” Tous les projets que nous y menons font l’objet d’une réflexion stratégique pour garder de l’emploi de qualité dans le quartier. La demande dépasse en tout cas largement l’offre “. L’objectif est maintenant d’étendre cette stratégie, histoire de tisser une toile d’artisans et de créatifs. ” Ces premiers projets nous ont légitimés, poursuit le CEO. Les promoteurs sont prêts à nous suivre, grands ou petits. Nous sommes en discussions avec des propriétaires de la rue du Champion et de la rue de l’Agneau pour poursuivre la revitalisation de ce quartier. ”
Un pôle agroalimentaire à la Vieille Montagne
Aujourd’hui, la vraie nouveauté est le positionnement de Noshaq en matière de réhabilitation de sites industriels liégeois désaffectés. Une région qui ne manque pas de chancres suite à son passé sidérurgique. L’idée est donc de devenir un acteur majeur en la matière. Si la SPI – l’agence de développement économique pour la province de Liège – occupe déjà le terrain, pas question toutefois pour Noshaq de jouer le jeu de la concurrence. ” Des dossiers comme celui de Chertal ( friches de 200 ha appartenant à ArcelorMittal, Ndlr) pourraient nous intéresser, sourit Frédéric Driessens. Mais si nous allons sur ce type de projet, ce sera en partenariat avec la SPI. Elle dispose d’une expérience que nous n’avons pas pour porter ce type de projets. Mais nous pouvons par contre apporter notre expertise, de manière à être complémentaires. Dans tous les cas, l’idée n’est pas d’être actif sur le segment résidentiel mais de privilégier la création d’activités écosystémiques. Si nous créons du logement, ce sera principalement lié à des demandes des autorités communales ou à des charges d’urbanisme. ”
En matière de réhabilitation, dans le portefeuille de projets de Noshaq Immo figure déjà le Liege Airport Business Park (propriétaire à 20%). On y retrouve également le volet bureau du nouveau projet mixte au Val Saint Lambert. Près de 36.000 m2 seront développés à 50/50 avec Eckelmans. Autre élément, et c’est une nouveauté, Noshaq va redévelopper le site de l’ancienne usine à zinc de la Vieille Montagne à Angleur. L’idée est d’y développer un pôle de production agroalimentaire de qualité, où l’on retrouvera 18.000 m2 de hall, 7.000 m2 d’ateliers et 11.300 m2 de bureaux pour un budget total de 42 millions d’euros. ” On souhaite être prêt d’ici le Mipim ( mars 2020, Ndlr) pour présenter le projet et trouver des partenaires. Il s’agit d’un dossier particulièrement ambitieux. ”
Reste encore deux secteurs d’activités pour Noshaq Immo. Les biotechs tout d’abord. Si l’écosystème liégeois est aujourd’hui bien développé, il manquait encore un acteur qui puisse offrir des laboratoires, salles blanches et autres bureaux aux entreprises spécialisées. C’est par exemple le cas avec le projet LégiaPark (30.000 m2 disponibles en 2021), un centre de biotechnologies situé en face de la clinique du MontLégia et qui a reçu son permis mi-novembre. Les investissements opportunistes ensuite. Noshaq prend ici des participations dans un projet uniquement dans un but de rentabilité. C’est le cas par exemple dans le Liège Office Center (Ardent Group), le quartier général de Prayon, le projet de Louised qui comprend 20.000 m2 de halls industriels ou encore le Trilogis Park. ” L’idée est, en moyenne, de prendre entre 20 et 30% de participation “, relève Frédéric Driessens.
Aller chercher des financements bancaires
Noshaq Immo est aujourd’hui bien lancé. Et l’idée n’est en tout cas pas de s’arrêter en si bon chemin. ” Ce n’est pas dans notre nature, précise Frédéric Driessens. Le but est de poursuivre dans cette voie, de rester attentif à d’autres opportunités de développement et de tenter pour chaque dossier d’avoir un effet de levier maximum. Aujourd’hui, l’effet de levier de nos projets est de un à six. Cela signifie que pour un euro dépensé par Noshaq Immo, il y a six euros de projets. L’objectif est d’augmenter ce ratio et d’aller chercher des financements bancaires à 100%. C’est ce qui s’est par exemple passé avec le projet de Trilogis Park. Réduire la part de fonds propres du fait de la taille de notre portefeuille et de notre crédibilité est un objectif plus que réaliste. Ce qui ‘facilite’ les choses, c’est que les banques ne considèrent pas notre activité comme immobilière mais comme développeur d’infrastructures pour les écosystèmes économiques que soutient Noshaq. Pour le reste, il n’y a pas d’ambition de développer des projets pour autant de millions pas an. Les opportunités et les projets que des architectes, promoteurs ou autres nous présenteront guideront notre activité. ”
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