Le fossé entre Knokke la mondaine et une partie de ses habitants ne cesse de s’agrandir
Avec un prix moyen de 650.000 euros par appartement, trois fois la moyenne flamande, Knokke suscite l’intérêt des promoteurs. Et depuis la disparition de Leopold Lippens, révélations et démissions s’y succèdent.
Fin août, Kris Demeyere, premier échevin de Knokke, annonce sa démission. Parmi les reproches qui lui sont adressés dans un audit effectué à la demande de Bart Tommelein, alors ministre flamand des Affaires intérieures, figurent notamment des irrégularités dans une série de contrats de location passés par la commune. L’intéressé conteste vigoureusement, soulignant au passage la disproportion entre les montants incriminés et le chiffre d’affaires (153 millions) du groupe automobile qu’il dirige.
Deux mois plus tard, c’est le bourgmestre en personne, Piet De Groote, qui annonce sa démission. En cause, les investigations du même audit mais aussi un vote secret au terme duquel les membres de la majorité n’ont pas voulu que l’actuel bourgmestre figure en tête de liste lors des prochaines élections communales. Certains d’entre eux lui reprochaient également de ne pas s’opposer assez vigoureusement à l’appétit de promoteurs qui rêvent de transformer Knokke en un nouveau Dubaï. Du One Carlton place Albert (une réalisation conjointe Ghelamco Invest-Versluys Bouwgroup) à la Heldentoren, près de 70 m, une des tours les plus élevées du littoral, en passant par Hoost, une tour polychrome de 14 étages constitués de blocs empilés, les immeubles élevés font en effet leur apparition à Knokke, suscitant un mouvement de résistance incarné par Stop de torens (Arrêtez les tours) animé par différents hommes d’affaires. Avec pour résultat l’éclatement de la majorité qui a finalement refusé d’entériner une hoogbouwnota mitonnée au temps de Leopold Lippens et prévoyant la construction de tours supplémentaires.
Tout aussi vigoureuse reste l’opposition au projet de construction, sur un terrain de 120 hectares, d’un golf de luxe, mégalomane selon ses détracteurs. Après deux décennies de tractations, Paul Gheysens a finalement décroché le permis tant espéré moyennant l’imposition par la ministre de l’Environnement Zuhal Demir de 47 conditions supplémentaires, parmi lesquelles l’aménagement endéans les cinq ans de 20 hectares de forêt en plus de la forêt urbaine (stadsrandbos) de 27 ha déjà prévue.
« Même pour un million d’euros, je ne vendrai pas mon terrain à ces dikkeneken”, a martelé Ronny Van Belleghem au cours de l’émission Pano dédiée par la VRT aux remous qui traversent actuellement Knokke. Virulent, le propos est révélateur du fossé qui sépare Knokke la mondaine d’une partie de ses habitants,
dont une petite centaine d’exploitants agricoles. Parmi ceux-ci, “Boer Ronny”, aujourd’hui retraité, qui refuse obstinément de céder deux hectares de ce qui était hier encore un champ de patates, indispensables selon la commune à la constitution du stadsrandbos prévu de longue date. De guerre lasse, cette dernière a entamé une procédure d’expropriation. Inflexible, Boer Ronny refuse d’être exproprié pour ce qu’il estime être un intérêt privé. Et même si la procédure lui coûte cher, il est bien décidé à ne pas s’incliner devant ces «gros cous».
Guillaume Capron
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