La Wallonie poursuit le ménage dans ses outils d’aménagement du territoire
Le gouvernement wallon a approuvé ce mardi en deuxième lecture une réforme attendue : celle du Code de développement territorial (CoDT) et de son corollaire, le projet de Schéma de Développement territorial (SDT). Les professionnels du secteur attendent de voir.
Pour rappel, le CoDT, qui a remplacé le CWATUPE depuis juin 2017 déjà, rassemble l’ensemble des règles contraignantes – souvent complexes voire contradictoires – en matière d’aménagement du territoire et d’urbanisme. Le SDT est, quant à lui, le document d’orientation qui doit cadrer la stratégie territoriale pour l’ensemble du territoire wallon. Or depuis des années déjà , les professionnels de l’immobilier réclament qu’on rende ces outils plus simples, transparents, efficaces et sûrs juridiquement.
«La concrétisation des deux réformes sur lesquelles nous travaillons depuis deux ans déjà est un pas majeur. Le nouveau cadre légal aujourd’hui validé par le gouvernement fixe 20 objectifs régionaux de développement territorial et d’aménagement. Ils ont de concert pour finalité l’optimisation spatiale, le développement socio-économique et le maintien de l’attractivité territoriale, la gestion qualitative du cadre de vie et la maîtrise de la mobilité», promet Willy Borsus, le ministre wallon de l’Urbanisme et de l’Aménagement du territoire.
L’étalement du bâti en point de mire
Parmi ces objectifs prioritaires, la lutte contre l’étalement urbain reste une contrainte de taille. A cet effet, un groupe d’experts a élaboré , à la demande du gouvernement, une méthodologie de mesure et une trajectoire de superficie artificialisable jusqu’à 2050 au niveau régional.
Le texte validé ce mardi met en place le concept de centralité comme clef de voûte de la nouvelle politique d’aménagement du territoire et oriente les projets préférentiellement vers les lieux les mieux équipés. Ces centralités doivent être définies par les villes et communes via les schémas de développement communaux ou pluri-communaux.
Cinq ans pour garder la main au niveau local
Un délai de cinq ans est prévu pour généraliser ces schémas structurants à l’échelle du territoire. A défaut, c’est le pouvoir régional qui prendra la main et inscrira ces centralités dans le SDT – via un atlas l’accompagnant – et fixera les mesures qui s’y appliqueront.
Cet atlas tiendra également compte du rapport de la commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner les causes et la gestion des inondations de juillet 2021.
Pour lutter contre l’étalement urbain, le nouveau SDT privilégiera la densification des centralités existantes.
Parmi les mesures les plus significatives à ce propos, on notera l’extension des pouvoirs de tutelle des fonctionnaires délégués pour les autoriser à suspendre tout permis ne prenant pas suffisamment en compte les risques naturels. Ces risques seront donc intégrés le plus en amont possible dans l’élaboration des plans et schémas d’aménagement du territoire : un travail pointilleux et compliqué qui risque de provoquer bien des conflits au niveau local, notamment si des expropriations sont à planifier et justifier.
L’exception économique
Cette lutte tous azimuts contre l’étalement urbain doit malgré tout intégrer «les besoins raisonnables d’extension des entreprises». L’artificialisation du foncier restera toutefois l’exception pour les activités économiques et on privilégiera avant tout les friches affectées en zone d’activités économiques au plan de secteur.
Implantations commerciales: en finir avec le feuilleté actuel
La réforme sur la table du gouvernement met également de l’ordre du côté du très controversé décret régional cadrant les implantations commerciales (2015), dont l’abrogation est programmée.
Pour rappel, le transfert de cette compétence vers les Régions en 2014 et sa matérialisation avaient été à géométrie variable du nord au sud. La Région wallonne avait, à l’époque, fait le choix hybride de maintenir une réglementation des implantations commerciales distincte de celle de l’urbanisme et du permis d’environnement, en créant un régime complexe tant de planification que d’autorisation.
Entre juin 2015 et février 2022, 1.032 demandes de permis d’implantation commerciale ou de permis intégrés ont néanmoins été introduites, donnant lieu à 805 décisions finales. Les derniers chiffres recensés depuis 2015 traduisent d’ailleurs, selon les pouvoirs publics, «un suréquipement à l’échelle régionale».
Permis obligatoire dès 200 m²
Le nouveau SDT sera également doté de mesures guidant l’urbanisation cadrant les commerces. Désormais, la compétence locale sera renforcée si le projet commercial s’inscrit entièrement dans une centralité définie par un schéma communal et reste inférieur à une superficie de 2.500 m². Dans les autres cas, la jauge est abaissée à 1.500 m² dans le but de favoriser une approche globale du territoire pour des projets qui, par nature, sont «plus susceptibles que d’autres d’avoir des incidences supra-communales». Les communes pourront également considérer que tout nouveau commerce est soumis à permis à partir de 200 m².
D’autres modalités viennent renforcer le nouveau cadre légal, comme l’avis obligatoire des communes limitrophes lorsque le projet a une surface commerciale nette égale ou supérieure à 1.000 m², la tenue systématique d’une enquête publique ou le renforcement de la commission d’avis sur les recours.
«Il s’agit ici d’une véritable simplification qui constitue un nouveau point d’équilibre entre les différents acteurs. La Wallonie était la seule Région à disposer de ce système hybride. La réforme proposée aujourd’hui est un pas vers plus de cohérence globale. Elle est par ailleurs très attendue par le secteur», insiste Willy Borsus.
Parmi les autres mesures importantes validées par le gouvernement wallon, on notera encore davantage de flexibilité dans le système de charges d’urbanisme et le soutien inconditionnel et structurel au logement public au niveau communal dans tout nouveau développement résidentiel de taille.
«Transparence, simplification et sécurité juridique»
«Quel que soit le projet, nous voulons amener plus de flexibilité dans la procédure et doter les pouvoirs publics de moyens permettant un plus large accès de tous aux processus décisionnels en aménagement du territoire et en urbanisme», insiste encore Willy Borsus, qui garantit que le nouveau cadre légal apportera plus d’efficacité, de clarté et de sécurité juridique, ainsi qu’une rationalisation et une simplification des procédures tant pour les autorités que pour les demandeurs d’autorisation.
Du côté des professionnels du secteur immobilier, on dit attendre impatiemment de vérifier sur le tas les arrêtés d’application et la mise en place pratique du nouveau cadre réglementaire qui se précise.
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