Le marché immobilier côtier montre des signes de reprise. Les taux d’intérêt et la météo sont favorables, et la confiance retrouvée pousse également le marché vers l’avant. Les propriétaires ressentent toutefois la pression croissante des rénovations, et les promoteurs immobiliers adoptent une attitude plus réservée.
Les prix des appartements à la côte repartent à la hausse. Durant les cinq premiers mois de l’année, Immoweb a enregistré une hausse des prix de 2,6%. En 2023, l’évolution des prix en bord de mer s’était arrêtée, et en 2024 également, les prix se stabilisaient. Ce n’est que depuis le début de cette année que la tendance des prix est à nouveau clairement positive. “Il est frappant de constater que la reprise à la côte accuse un retard par rapport à la tendance générale en Belgique, déclare Jonathan Frisch, économiste chez Immoweb. En raison de la légère baisse des taux, le niveau des prix en Belgique avait déjà recommencé à augmenter plus fortement à la mi-2024. À la côte, il a fallu attendre six mois de plus.”
Selon Jonathan Frisch, le caractère saisonnier du marché immobilier côtier joue un rôle à cet égard. “L’immobilier en bord de mer suit un schéma saisonnier marqué, dit-il. Entre février et l’été, l’attractivité est la plus forte, et cela se reflète dans la dynamique des prix.”
À plus long terme, les prix ont nettement plus augmenté à la côte que dans le reste du pays. Au cours des cinq dernières années, la hausse affichée est de 21,5%, contre 16,7% pour la Belgique dans son ensemble. “En 2021 et 2022, les hausses de prix enregistrées à la côte étaient nettement supérieures à la moyenne nationale, selon Jonathan Frisch. Ce furent les années covid et post-covid durant lesquelles les gens recherchaient plus d’espace et d’air libre, et durant lesquelles le télétravail s’est imposé – autant de facteurs qui ont renforcé l’attractivité des communes côtières.”
Environ 4.189 euros/m²
Immoweb a calculé le niveau des prix pour l’ensemble du bord de mer à 4.189 euros/m². À titre de comparaison : au niveau de toute la Belgique, il est de 3.079 euros. Les différences entre les communes côtières sont également importantes, avec des extrêmes comme Knokke-Heist (6.638 euros/m²) et Blankenberge (2.801 euros/m²).
Immoweb a également analysé l’impact de la proximité de la plage sur les prix des logements. Il en ressort qu’un logement situé à moins de 100 mètres de la plage est 42% plus cher qu’un logement similaire situé à plus d’un kilomètre, et 19,2% plus cher qu’un logement situé entre 101 et 500 mètres de la plage.

Confiance dans l’immobilier
Filip Dewaele, agent immobilier et président du groupe immobilier Dewaele, observe sur le terrain une légère tendance à la hausse des prix. “Cela indique que l’offre et la demande sont actuellement assez bien équilibrées”, dit-il. Selon l’expert, c’est surtout la vente de biens existants qui a retrouvé de la dynamique. Mais le marché du neuf se maintient également relativement bien, affirme-t-il : “À l’intérieur du pays, j’entends des promoteurs se plaindre, beaucoup moins à la côte. Nous ne vivons pas un boom comme il y a quelques années, mais de nouveaux biens sont bel et bien vendus.”
Cette analyse est confirmée par David Degroote, co-CEO du groupe immobilier Degroote, l’un des plus grands promoteurs de la côte. “Nous voyons des signes clairs de reprise, mais nous ne sommes pas encore tout à fait au niveau de l’avant covid, dit-il. Je considère 2018 et 2019 comme des années normales. À partir de 2020, nous n’avons plus connu d’année normale, ni dans un sens positif ni négatif. La demande et le sentiment se sont clairement améliorés cette année par rapport à 2024.”
Il remarque aussi que le processus de vente se déroule à nouveau plus rapidement. “L’an dernier, il fallait parfois 10 à 12 semaines pour passer d’un prospect chaud à une vente signée. Nous voyons aujourd’hui ce délai se normaliser à six à huit semaines. Cela indique que les gens hésitent moins, sont plus sûrs de leur décision.”
Reprise des ventes
Gino Weyne, gérant du promoteur Condius, constate également que les ventes reprennent et que les gens se décident à un stade plus précoce du projet : “Ce n’est pas comme si nous vendions à nouveau massivement sur plan. En général, les travaux doivent déjà avoir commencé. Ou bien il faut pouvoir fournir aux candidats acquéreurs un planning clair. Mais surtout à des emplacements de choix comme la digue, on voit que certains se décident très tôt.”
Nos interlocuteurs soulignent unanimement la “confiance accrue” chez les acheteurs potentiels. Comment cela s’explique-t-il malgré l’incertitude internationale persistante ? “Je pense que l’imprévisibilité de la Bourse joue en faveur de l’immobilier, répond Gino Weyne. L’immobilier est perçu comme plus stable et plus prévisible. Les gens comprennent que l’immobilier offre de la sécurité à long terme. Ceux qui attendent une baisse des prix risquent de continuer à attendre. Et spécifiquement à la mer, les gens achètent aussi pour en profiter. C’est un investissement qui procure également du plaisir. En outre, il y a moins d’incertitude que l’année dernière, quand les taux hypothécaires étaient encore en hausse. Entre-temps, ces taux ont légèrement baissé et semblent se stabiliser.”
“L’imprévisibilité de la Bourse joue en faveur de l’immobilier, perçu comme plus stable et plus prévisible. – ”Gino Weyne (Condius)
Le rôle des taux
Bien que le marché côtier soit traditionnellement moins sensible aux taux – car les acheteurs financent souvent avec leurs propres moyens – cela joue tout de même un rôle, souligne aussi Filip Dewaele. “Dire que les taux n’ont aucun effet, ce n’est pas exact, estime-t-il. C’est plutôt un effet indirect : un taux élevé effraie les gens. Mais avec un taux juste en dessous de 3%, le climat n’est certainement pas défavorable aujourd’hui.”
David Degroote qualifie la baisse des taux de “facteur non négligeable” dans la reprise du marché. Selon lui, “il y a encore toujours un nombre considérable d’acheteurs qui contractent un petit crédit. Dans ce cas, un taux plus bas est un avantage”.
Parfois, il ne faut pas chercher trop loin les raisons pour lesquelles le marché repart cette année, fait remarquer Filip Dewaele. “Le printemps de l’année dernière a été particulièrement pluvieux. Cela freine l’envie d’acheter à la mer. Cette année, le temps printanier était bien plus agréable. Soyez-en sûr, cela aide.”
Des promoteurs plus sélectifs
L’un des grands défis de notre côte belge est le renouvellement du parc immobilier vieillissant. “Une vague de rénovations nous attend, constate Filip Dewaele. Cela vaut bien sûr aussi pour les immeubles à appartements anciens à l’intérieur du pays, mais il y en a particulièrement beaucoup à la côte.”
La plus grande difficulté dans les rénovations d’immeubles à appartements est de faire converger les différents propriétaires qui, via l’association des copropriétaires (ACP), sont conjointement responsables des parties communes. “Ces propriétaires ont des intérêts divergents et une capacité financière différente. Surtout dans les communes côtières les moins chères, on voit souvent une partie des propriétaires freiner face à de lourds investissements. C’est moins le cas à Knokke.”
“Les projets avec un prix de sortie en dessous de 3.000 euros/m2 ne sont quasiment plus développés.” – David Degroote (Vastgoed Degroote)
En conséquence notamment du durcissement des réglementations PEB, la pression sur les propriétaires augmente. Pour certains, souvent plus âgés, un tel investissement lourd est aussi un moment pour vendre le bien. Selon Filip Dewaele, il existe en outre beaucoup d’incertitudes sur le coût des interventions importantes comme la rénovation/l’isolation de la façade ou le remplacement de l’installation de chauffage. Il plaide donc pour un plan pluriannuel obligatoire des investissements futurs dans chaque immeuble. “Cela améliorerait la transparence. Propriétaires comme acheteurs potentiels sauraient alors à quoi s’attendre.”
“Un pas dans la bonne direction”
L’intention du gouvernement fédéral de soutenir les associations de copropriétaires dans l’élaboration d’un plan d’investissement pluriannuel pour les investissements liés au climat, Filip Dewaele la considère comme “un pas dans la bonne direction”. “Mais je crains que ce ne soit encore trop facultatif, dit-il. Faire établir un tel plan coûte de l’argent, et dans une ACP, il est très difficile de faire passer quelque chose si ce n’est pas obligatoire.”
Filip Dewaele est généralement optimiste à propos du marché immobilier côtier. “La seule véritable menace est que le marché entre dans une sorte d’attente, où l’offre comme la demande se figent. Cela peut se produire s’il y a beaucoup d’incertitude.” Il souligne qu’une résidence secondaire en bord de mer est un produit de luxe. “Cela la rend aussi plus vulnérable à l’incertitude : ce n’est pas un besoin. Tout le monde doit se loger, manger et boire. Une résidence secondaire, on ne l’achète que si on se sent sûr et qu’on peut se le permettre. D’un autre côté, ce statut de luxe procure aussi de la stabilité en période d’incertitude. Les achats immobiliers à la mer se font généralement avec de l’argent dormant, des excédents. C’est pourquoi il y a rarement des ventes paniques à la côte. Si les prix baissent, les propriétaires attendent simplement.”
Eviter les projets bon marché
Sur le marché du neuf, David Degroote constate que les promoteurs évitent de plus en plus les projets bon marché. “Les projets avec un prix de sortie en dessous de 3.000 euros/m² ne sont quasiment plus développés”, dit-il. Cette tendance est la conséquence de ce que Degroote décrit comme “la tempête parfaite dans le monde de l’immobilier”. “En seulement trois à quatre ans, l’inflation, la hausse des coûts de construction et la montée des taux ont rendu quasiment impossible de dégager une marge sur ce type de projets.”
David Degroote constate que les promoteurs immobiliers à la côte sont devenus plus prudents et plus sélectifs dans leur politique d’acquisition. “Récemment encore, un projet à Bredene avec une cinquantaine d’appartements n’a reçu aucune offre. En 25 ans de métier, je n’ai jamais vu ça. Cela en dit long sur la retenue du marché. Nous hésitons aussi plus souvent : faire ou ne pas faire ? Et parfois, nous renonçons, simplement parce que ça ne vaut pas le coup. Parfois, les attentes du vendeur sont aussi trop élevées.”
Les chiffres de ce dossier
• Les prix de vente des appartements existants reposent sur les données d’Immoweb. ce dernier utilise un modèle statistique tenant compte des caractéristiques des biens mis sur le marché, comme la surface habitable, le nombre de chambres et l’état de l’appartement (bon, à rénover…). Ce modèle hédonique permet d’éliminer les fluctuations de prix dues aux variations dans les caractéristiques des biens proposés.
• Les prix au mètre carré proposés dans ces pages font référence à un “appartement standard” 2 chambres de 95 m², avec terrasse ou balcon, situé au 1er, 2e ou 3e étage avec ascenseur, dans un bâtiment construit dans les années 1990.
• Les prix du neuf sont basés sur le Baromètre du neuf de la plateforme de données immobilières Realo et du développeur de quartiers Matexi. Il s’agit également de prix hédoniques portant sur des appartements de référence de 70 m² (une chambre) et de 95 m² (deux chambres).
• Les prix mentionnés dans les articles sont recueillis auprès d’agents immobiliers, prestataires de services immobiliers, notaires, promoteurs et particuliers. Cela permet d’identifier les tendances de base pour le marché résidentiel de chaque station balnéaire.
• Dans les tableaux de loyers, les prix concernent le segment le plus élevé du marché (emplacement de premier choix et/ou aménagement haut de gamme). Il s’agit de prix de marché collectés par l’agence ERA SERVIMO, active sur toute la côte belge.