La brique est-elle encore abordable en Belgique?
La plupart des feux restent au rouge pour ceux qui veulent devenir propriétaire. L’immobilier est de moins en moins abordable. Et le contexte économique, devant peu évoluer à l’avenir, les candidats à l’acquisition devront être créatifs pour trouver des solutions car rien ne devrait changer à moyen terme.
Le marché immobilier continue de tourner au ralenti en Belgique. Le nombre de ventes d’appartements et de maisons avait diminué de 15 % en 2023. Il ne s’est pas redressé lors du premier semestre 2024, avec une baisse d’encore 4 % par rapport au premier semestre 2023. De nombreux indicateurs restent dans le rouge. Les plus importants, difficilement quantifiables, étant ceux liés à l’incertitude économique et à la confiance des ménages. Selon les statistiques d’ING, l’immobilier belge n’a d’ailleurs plus été aussi inaccessible depuis 10 ans.
“Cet indice prend en compte deux aspects : la quotité et le pourcentage que les ménages doivent rembourser par rapport à leurs revenus, précise-t-on chez ING. L’indice d’accessibilité est à son point le plus bas, mais nous nous attendons à ce qu’il se stabilise. C’est lié à la stabilisation des taux d’intérêt, à la croissance des revenus et à l’augmentation des échéances des prêts.”
Il faut dire que les candidats à l’achat et à la rénovation de leur logement, de même que ceux qui veulent acheter un logement neuf, naviguent désormais dans un tout autre environnement. Les prix ne baissent pas et restent élevés, le coût des matériaux de construction se stabilise mais reste important alors que seuls les taux fléchissent quelque peu. Si le budget pour devenir propriétaire est moins important que dans d’autres pays européens, plusieurs signaux ont tendance à réduire les ambitions.
1. Des coûts de construction qui se stabilisent.
Selon l’indice des prix à la production dans la construction – soit l’indice qui permet de connaître les coûts de la construction d’un logement –, les prix des matériaux se sont stabilisés en 2023 et début 2024, après la tornade qui les a frappés en 2021 et surtout en 2022. Reste que se lancer dans une rénovation ou dans la construction d’une maison coûte désormais 21 % plus cher qu’il y a deux ans, selon les données de Statbel. Et qu’il est très peu probable qu’ils redescendent. Il faudra donc s’habituer à ces nouveaux standards.
2. Des taux d’intérêt qui diminuent.
Ils semblent avoir atteint un pic en novembre 2023. Depuis lors, ils ont entamé une lente diminution pour revenir en juillet au même niveau qu’en février 2023. Il faut par contre remonter au mois d’août 2014 pour atteindre le même niveau. Entre les deux, une longue période de taux bas, avec de l’argent presque gratuit pour les prêts hypothécaires.
Selon Immotheker, pour un prêt de 250.000 euros pendant 20 ans à taux fixe (quotité de 80 %), le taux moyen actuel est de 3,27 %. Il y a cinq ans, en 2019, le taux moyen était de 1,69 %. La mensualité est aujourd’hui 188 euros plus élevée alors que, au final, il faudra débourser 45.130 euros supplémentaires. Reste qu’il s’agissait d’une période exceptionnelle qu’on ne retrouvera pas de sitôt. “Les candidats acquéreurs doivent se rendre compte qu’il faut faire son deuil des conditions passées et qu’ils ne retrouveront pas des taux aussi attractifs, pointe Kim Ruysen, CEO du réseau immobilier Trevi. Leur capacité d’emprunt a, il est vrai, diminué. Mais c’est la nouvelle réalité.”
3. Des fonds propres toujours plus élevés.
Lors d’un achat, l’acquéreur qui souscrit un crédit hypothécaire pour financer son acquisition devra le plus souvent déposer des fonds propres. Soit un montant qui équivaut en général à 20 % de la valeur du bien. Se faire prêter par la banque 100 % de la somme était monnaie courante il y a quelques années mais est plus compliqué aujourd’hui, vu les nouvelles instructions de la Banque nationale (BNB). Les primo-acquéreurs peuvent toutefois, sous certaines conditions, encore y accéder.
“Nous continuons à soutenir l’accès à la propriété des primo-acquéreurs, lance Marc Delforge, responsable des crédits chez BNP Paribas Fortis. Dans certains cas, la Banque nationale autorise que nous prêtions 100 % du montant. Et BNP a choisi de réserver ces situations aux plus jeunes.” Précisons qu’à ces premiers fonds propres, l’acquéreur devra également ajouter un capital de départ qui permettra de payer les droits d’enregistrement (différents selon les Régions), de même que les frais notariaux.
Selon la Banque nationale, les primo-acquéreurs devaient en moyenne déposer 35.867 euros en 2016 pour 60.008 euros en 2023. Une hausse plus importante que celle des prix de l’immobilier. “L’estimation moyenne des fonds propres liés à un emprunt hypothécaire a continué d’augmenter en 2022 et 2023 en raison de la progression des prix de l’immobilier et d’une moindre part des crédits avec une quotité élevée, commente Sébastien Daems, porte-parole de la BNB. L’augmentation de l’estimation moyenne des fonds propres en 2022 et 2023 est toutefois moins soutenue que précédemment, essentiellement en raison de la croissance moins marquée des prix des logements sur la même période.”
4. Des obligations de rénovation à suivre.
Si, en Wallonie, il n’y a pas encore d’obligation de rénover son logement lors d’une nouvelle acquisition, la situation est différente en Flandre depuis le 1er janvier 2023. Un choix qui permettra d’accélérer la rénovation du parc immobilier, mais qui gonfle aussi le budget des primo-acquéreurs. Toute maison ou appartement qui dispose d’un score énergétique E ou F doit désormais subir une rénovation énergétique dans les cinq années suivant l’achat, lui permettant d’atteindre au minimum le score D.
Un calendrier a été établi pour les prochains objectifs à atteindre :
- à partir de 2028, il faudra atteindre un PEB C dans les cinq ans ;
- à partir de 2035, atteindre un PEB B (maisons) et C (appartements) dans les cinq années suivant l’achat ;
- à partir de 2040, atteindre au minimum un PEB A (maisons) et un PEB B (appartements) dans le même timing ;
- à partir de 2045, tous les biens devront avoir un PEB A dans les cinq ans.
Se lancer dans une rénovation ou dans la construction d’une maison coûte désormais 21 % plus cher qu’il y a deux ans.
A Bruxelles, il n’y a pas non plus d’obligation liée à l’acquisition. Les classes PEB F et G seront supprimées dès 2033 alors que les classes E et D le seront d’ici 2045. A cette date, tous les bâtiments devront avoir atteint le niveau de performance énergétique C.
“On constate néanmoins un ralentissement des transactions sur le marché existant en Flandre suite à ces obligations, relève Kim Ruysen. Certains ménages ne peuvent pas suivre la hausse des prix, des taux, et ces obligations de rénovation. Auparavant, il était possible de les étaler dans le temps, de manière à digérer l’investissement.”
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