Immobilier locatif: 3,29 % de rendement net, est-ce suffisant ?

Les prix des loyers sont en hausse. Cependant, les futurs propriétaires-bailleurs qui s’attendent à des rendements importants doivent savoir que la valeur des logements progresse plus lentement. Une nouvelle étude montre que le rendement de l’immobilier résidentiel est inférieur à ce que de nombreux investisseurs imaginent.

Quelle rentabilité attendre d’un investissement immobilier locatif ? La question semble simple, mais la réponse n’est pas si évidente. De nombreux chiffres circulent, souvent fondés sur des définitions différentes du rendement.

Cette confusion s’explique en partie par la diversité du marché immobilier belge. Aucune habitation ne se ressemble exactement, ce qui rend toute généralisation difficile. De plus, la transparence du marché est limitée. Les données sont fragmentées, voire inexistantes. L’évolution des prix de l’immobilier dépend de nombreux facteurs, tels que les taux d’intérêt, la fiscalité, les revenus, la démographie et les changements réglementaires. Une analyse précise nécessite donc de nombreuses estimations et hypothèses.

Le rendement net moyen estimé à 3,29 %

Il est pourtant essentiel pour les investisseurs du marché locatif privé de bien comprendre la rentabilité de leur investissement. C’est l’objectif d’une nouvelle étude des économistes spécialisés en immobilier Frank Vastmans et Joren Vandenbergh. Ils sont tous les deux affiliés à Steunpunt Wonen. un consortium multidisciplinaire regroupant des experts de trois grandes universités flamandes (KU Leuven, VUB (Vrije Universiteit Brussel, Université d’Anvers). Ces experts ont calculé le rendement net total d’un logement locatif moyen. Ils arrivent à un taux de 3,29 %.

De nombreux investisseurs pourraient affirmer, sur la base de leurs propres calculs, qu’ils obtiennent un rendement plus élevé.

Frank Vastmans. « De nombreux investisseurs pourront effectivement présenter des rendements historiques plus élevés. Cela s’explique en grande partie par l’augmentation de la valeur de leur bien, ce que l’on appelle le rendement indirect (le rendement direct provient, lui, des loyers, ndlr). La baisse continue des taux d’intérêt jusqu’en 2022 a entraîné une hausse significative des prix de l’immobilier. Mais cette période semble révolue. Les taux ont remonté, et ces deux dernières années, la valorisation des biens a été très limitée, voire nulle. »

« 3,29 % reste correct pour un investissement relativement peu risqué »

Frank Vastmans

Steunpunt Wonen

“Dans notre analyse, nous ne nous basons pas sur les rendements historiques, mais sur les prévisions. Bien sûr, nous ne pouvons pas prédire l’avenir, mais en nous appuyant sur des analyses des prix immobiliers et des paramètres économiques, comme la croissance des revenus prévue par le Bureau du Plan, nous essayons de faire la meilleure estimation des prix futurs des logements. Les variations de valeur du passé sont probablement plus importantes que celles que nous calculons actuellement. Mais, l’objectif de notre étude est précisément de déterminer si les investissements immobiliers resteront attractifs à l’avenir.”

3,29 % n’est-ce pas un peu faible pour un investissement assez exigeant en termes de gestion ?

Vastmans. « Personnellement, je trouve que 3,29 % reste correct pour un investissement relativement peu risqué. Certes, la gestion d’un bien locatif demande du travail, mais il ne faut pas non plus exagérer l’ampleur de cette tâche. Il est possible de déléguer la gestion locative à un agent immobilier, ce qui réduit l’implication personnelle, bien que cela ait un impact sur le rendement net. Il y aura toujours un certain suivi à assurer, mais tout dépend du type de bien et du profil du locataire. Un appartement neuf avec un bon locataire demandera moins d’efforts et de coûts qu’une maison ancienne. »

Les investisseurs sous-estiment-ils les coûts d’entretien et la dépréciation des biens ?

Vastmans. « En partie oui, même si, pour les constructions neuves, des coûts d’entretien réduits sont souvent pris en compte. Mais la dépréciation est un autre sujet : la valeur d’un logement peut évoluer très différemment d’un bien à l’autre. Un bon entretien ralentit la perte de valeur, et inversement. C’est pourquoi il est difficile d’estimer précisément l’évolution du prix d’un bien. Deux maisons identiques peuvent voir leur valeur évoluer différemment en fonction de leur entretien ou de leur rénovation.

« De plus, les tendances moyennes des prix immobiliers, telles que relayées dans les médias, offrent une vision parfois biaisée. Un bien spécifique voit sa valeur progresser plus lentement car il vieillit chaque année. C’est pourquoi, dans nos analyses de rendement, nous suivons l’évolution des biens aux caractéristiques similaires sur le long terme, selon une approche appelée analyse hédonique. Cela nous permet d’offrir aux investisseurs une vision plus approfondie. »

Récemment, le réseau immobilier CIB a mis en garde contre un écart croissant entre l’offre et la demande sur le marché locatif. L’État doit-il rendre l’investissement locatif plus attractif ?

Vastmans. « Non, je ne pense pas que le gouvernement doive soutenir davantage le marché locatif. Car si l’on soutient d’abord le marché locatif, puis celui des propriétaires, au final, on fait grimper les prix partout. Je plaide plutôt pour une neutralité de l’accession à la propriété qui garantit un équilibre entre les deux marchés, avec des ajustements là où c’est nécessaire. Si certaines catégories de la population risquent d’être exclues du logement, alors l’État doit intervenir.

« L’essentiel reste l’offre. Sans une offre suffisante, on aura toujours des problèmes de prix. Il ne faut pas nécessairement inciter davantage les bailleurs, mais il ne faut pas non plus les décourager. Ils représentent une part importante du parc immobilier. Si on les dissuade d’investir, on réduit l’offre et on aggrave le problème. »

Taille du bien, performance énergétique et profil des locataires influencent le rendement

L’étude de Frank Vastmans et Joren Vandenbergh analyse également l’impact des caractéristiques des logements et des locataires sur le rendement brut locatif.
Les logements plus petits et plus anciens affichent un rendement brut supérieur à celui des logements récents et plus spacieux.
Le type de logement joue aussi un rôle. Ainsi, les maisons mitoyennes affichent un rendement brut supérieur de 0,2 point de pourcentage par rapport aux maisons individuelles. Une des raisons avancées est que les maisons individuelles disposent souvent d’un grand jardin, qui ne se déprécie pas de la même manière qu’un bâtiment.
L’efficacité énergétique est un facteur clé. Les logements avec un mauvais label EPC (E-F) offrent un rendement brut supérieur de 3 % à ceux classés B-D, et l’écart est encore plus important par rapport aux logements les plus performants (label A). Cela s’explique par le fait que la meilleure performance énergétique est intégrée dans un prix d’achat plus élevé.
 Le profil des locataires influence aussi le rendement. Plus la proportion de diplômés de l’enseignement supérieur est élevée dans un quartier, plus le rendement locatif brut tend à être faible. À l’inverse, un taux plus élevé de personnes en incapacité de travail ou au chômage a un léger effet positif sur le rendement locatif brut. Cela suggère que les propriétaires appliquent des loyers plus élevés pour compenser un risque accru (d’impayés ou de dégradations). « C’est comparable aux banques, qui appliquent un taux d’intérêt hypothécaire légèrement plus élevé pour les emprunteurs considérés comme plus risqués », explique Vastmans.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content