Immobilier: dans quoi investir aujourd’hui ?

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Les petits investisseurs, qui ont déserté le marché immobilier en 2023, vont-ils y revenir en 2024 ? Des taux plus attractifs, doublés d’une stabilisation du coût des matériaux ainsi que des prix, ont en tout cas redistribué les cartes. De quoi développer de nouvelles stratégies ?

Retrouver la confiance. La hausse continue des taux d’intérêt, combinée à celle des prix et à l’enchérissement des matériaux de construction, a d’abord fait hésiter puis fuir les habitués des bonnes affaires. L’investisseur en immobilier a donc traversé, ces derniers mois, une période d’incertitu­des qui pourrait toutefois toucher d’ici peu à sa fin. La stabilisation voire même une légère baisse des taux, à quoi s’ajoutent certaines diminutions de prix sur le marché ancien, laissent entrevoir des perspectives plus réjouissantes. Le fait de naviguer dans un contexte économique et financier différent pourrait en tout cas entraîner un nouveau positionnement des investisseurs et une réévaluation des segment les plus intéressants.


Avec quels changements à la clé ? Quand on parle d’immobilier, les possibilités d’investissement restent nombreu­ses. Et les choix, difficiles. Qu’il soit neuf ou existant, que sa localisation soit attractive ou plus risquée, qu’il s’agisse d’un appartement, d’une maison, d’un immeuble de rapport, d’un kot, d’une seconde résidence, d’un garage ou d’un rez commercial, qu’il relève du segment coté ou non : chaque produit a ses avantages et ses inconvénients. Il existe, finalement, autant de possibilités que de profils d’investisseur.

Meilleure prévisibilité

“Il est évident que le contexte a évolué et que les investissements d’hier ne sont plus tout à fait ceux d’aujourd’hui, lance Adrian Devos, co-directeur de Buyerside. Certaines bases du marché immobilier ont bougé. Je remarque surtout que pour maintenir leur rendement, les investisseurs actifs sur le marché ancien ont exigé que les vendeurs diminuent leurs prix. Ce qui a entraîné, dans certains cas, des baisses de valeur de près de 15 %.”

Aymeric Francqui (Latour & Petit)
Aymeric Francqui (Latour & Petit).


Si ce n’est pas encore l’emballement, on observe que de plus en plus d’investisseurs retrouvent le chemin de l’immobilier. “Nous le constatons clairement, confirme Aymeric Francqui, co-directeur de l’agence immobilière Latour & Petit. Les marques d’intérêt sont de plus en plus nombreuses. La stabilisation des taux d’intérêt à laquelle nous assistons depuis quelques semaines n’est pas étrangère à cette situation. Les investisseurs ont également une meilleure prévisibilité de la durée des chantiers, ce qui n’était pas le cas quand les coûts de construction s’envolaient. Sans oublier que les loyers ont fort augmenté ces derniers temps, ce qui a tendance à compenser quelque peu l’accroissement du coût d’un prêt immobilier.”


Un constat qui a redistribué certaines cartes, mais qui n’a pas non plus fait vaciller les fon­damentaux. “Il n’existe pas de baguette magique en immobilier, ajoute Aymeric Francqui. Les gens qui achètent 20 % en dessous du prix, ce sont uniquement ceux dont c’est le métier et qui visitent des dizaines de biens chaque mois. Il est vrai qu’il y a à nouveau une marge de négociation. Mais l’investissement dépendra toujours du profil de risque de l’investisseur, de sa volonté de dégager une plus-­value et du temps et de l’argent qu’il veut y consacrer. Acheter un appartement trois chambres à Woluwe-Saint-Lambert ne peut être comparé à l’achat d’une colocation de 12 chambres à Namur.”

Small is beautiful

Adrian Devos

Quelques actifs semblent avoir profité de la période contrastée de ces derniers mois pour revenir dans la ligne de mire des investisseurs. C’est notamment le cas des immeubles de rapport. “Ils profitent surtout du fait qu’ils ne sont pas confrontés à la concurrence des petits investisseurs, précise Adrian Devos. Pour maintenir le rendement souhaité par les investisseurs, les propriétaires ont été obligés de diminuer leurs prix de vente, vu le faible nombre de transactions. Aujourd’hui, le marché est plus équilibré et les rendements pour les immeubles de rapport sont très intéressants, avoisinant les 5 % brut.”

Les divers types de biens

1. 
APPARTEMENT
Avantages
. Demande locative élevée, rendement attractif pour l’immobilier ancien, accessible financièrement, peu de gestion.
Inconvénients. TVA de 21 % et rendement moins attractif pour le neuf, frais et contrain­tes de la copropriété. Offre en baisse pour le neuf.
Rendement. De 3,75 % à 4,25 % brut pour un appartement neuf, de 4 % à 4,5 % brut pour un ancien.

2. IMMEUBLE 
DE RAPPORT
Avantages. Propriétaire de la totalité de l’immeuble, prix moins élevé que si on achète le même nombre d’appartements séparément, rendement élevé, dilution des risques au sein du bâtiment, plus de biens sur le marché qu’avant la remontée des taux, opportunités à saisir avant une baisse des taux.
Inconvénients. Risques assumés par un seul propriétaire, gestion de plusieurs unités locatives.
Rendement. Entre 4,25 % et 4,75 % brut pour un immeuble neuf, de 4,5 % à 5 % brut pour un immeuble ancien.

3. 
COLOCATION
Avantages
. Dans l’air du temps, rendement élevé, demande locative importante.
Inconvénients. Demande locative moins large que pour un appartement, prix d’achat élevé, nouvelles taxations visant à limiter les colocations (nuisances, comme le bruit ou le manque de places de stationnement), incertitudes quant aux normes “pompiers” à respecter pour ce type d’occupation. Sur­offre possible lorsque le marché deviendra mature.
Rendement. De 5,5 % à 7 % brut pour une colocation.

4. 
KOT
Avantages. Prix d’achat abordable, rendement élevé, forte demande, absence de gestion si dans une résidence.
Inconvénients. Forte rotation locative, usure rapide du bien, gestion complexe si elle n’est pas déléguée, bail étudiant à l’avantage du locataire.
Rendement. De 4,75 % à 5,75 % brut pour un logement neuf et de 5,75 % à 6,75 % brut pour un kot ancien, avec une gestion active.

5. RESIDENCE 
SECONDAIRE
Avantages
. Plaisir de profiter de son bien, prix d’achat peu élevé dans certaines régions.
Inconvénients. Gestion fastidieuse, locataires nombreux, démarches administratives, distance physique si le bien est à l’étranger.
Rendement. 3 % à 3,5 % brut si occupation pour le plaisir.

6. 
REZ COMMERCIAL
Avantages
. Aménagements à charge du locataire.
Inconvénients. Investissement risqué, incertitudes autour du profil des locataires, fiscalité spécifique.
Rendement. 5,5 % brut pour les rez extrêmement bien situés. 6,5 % dans les villes secondaires.

7. 
GARAGE
Avantages
. Prix abordable, peu de gestion, sera de plus en plus demandé pour les bornes de recharge électrique.
Inconvénients. Baisse de la demande de parkings en général.
Rendement. 4 % à 4,5 % brut.

Source des valeurs de rendement : Buyerside. Chiffres pour Bruxelles.


De son côté, Aymeric Francqui observe sur son marché (le moyen – haut de gamme) l’émergence de trois tendances : “Le neuf a vraiment la cote en ce moment. La demande est réelle. Tout comme la demande locative pour ce type de biens. La hausse des loyers permet de refaire de cet actif un investissement intéressant, même s’il coûte plus cher à l’achat. Je conseille également la colocation. La demande est extrêmement élevée et cela permet de dégager un rendement très intéressant. Enfin, small is beautiful : plus un investisseur visera petit, plus son rendement sera intéressant. Cela ne change pas. Pour le reste, je voudrais tordre le cou à un canard : investir dans un immeuble ou un appartement qui possède un PEB G n’est pas nécessairement une mau­vaise affaire. Et cela n’entraîne pas toujours une décote. Cela dépend surtout de la qualité de la construction et des connaissances en matière de travaux.


“Dernier avertissement : il faut un investissement qui soit dans les règles sur le plan urbanistique. Aujourd’hui, cela ne pardonne pas. Il y a de plus en plus de contrôles. Les Airbnb, les logements de moins de 28 m2, les faux contrats de location meublés, cela ne passe plus.”

Le recul des SIR, la bonne affaire du moment ?

L’année 2023 a été compliquée pour les actions immobilières. Les diffé­rentes hausses des taux directeurs décidées par la Banque centrale européenne ont complétement refroidi le marché immobilier européen. “En un an et demi, les taux d’intérêt à long terme ont augmenté de 3,5 %, constate Frank Vranken, chief investment officer du gestionnaire d’actifs Edmond de Rothschild. C’est surtout la rapidité de cette hausse qui a provoqué une réaction négative chez les investisseurs. Dans le passé, il fallait six à sept ans pour que les taux longs se rétablissent après un tel bond.”


De nombreuses SIR ont procédé, avec succès, à une augmentation de capital (Montea, Home Invest, etc.). De quoi leur redonner quelques couleurs. “La différence principale entre l’immobilier coté et le non coté, c’est qu’il est directement impacté par la hausse des taux d’intérêt, poursuit Frank Vranken. Les coûts de refinancement des crédits et la valorisation du portefeuille en ont ressenti les conséquen­ces. Cela a par contre eu peu d’effets directs sur le marché existant car il n’y a pas d’évolution instantanée des prix. Néanmoins, je pense que les retombées se font désormais ressentir sur l’immobilier non coté, vu la baisse du nombre de transactions. Les prix diminuent quel­que peu car ils intègrent la hausse des taux. Je pense donc que l’immobilier existant va continuer à connaître un ralentissement de son activité pendant quelque temps encore, même si la demande en logements est importante. Par contre, pour l’immobilier coté, je pense qu’il a mangé son pain noir et que les différents cours de Bourse ont déjà intégré les corrections. Il y a donc clairement de bonnes affaires à faire. Il faut se tourner vers des SIR – et non des développeurs – , qui possèdent un bon bilan, dont le chiffre d’affaires se maintient, qui sont faiblement endettées et qui distribuent d’intéressants dividendes. Ajoutons que de nombreuses SIR sont couvertes contre les hausses de taux d’intérêt, ce qui leur permet de maintenir des résultats stables.”

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