Achat scindé : quels avantages et quels risques ?
L’achat scindé est souvent utilisé dans la planification successorale et est encore plus intéressant depuis juillet. Avec quelques subtilités tout de même.
L’achat scindé est une technique courante de planification successorale puisqu’il permet de contourner les droits de succession sur un bien.
Pour rappel, un achat de bien classique est un achat immobilier dit en «pleine propriété». Concrètement, cela reprend l’usufruit et la nue-propriété. Dans un achat scindé, l’usufruit et la nue-propriété sont vendus séparément. L’exemple le plus classique est que les parents achètent l’usufruit et les enfants la nue-propriété.
Cette répartition offre en effet des avantages à chacun. Les parents peuvent habiter le bien ou percevoir les loyers du bien et les enfants ont eux la certitude que la propriété leur reviendra. Un autre avantage est que cela évite aux enfants de payer des droits de succession qu’ils auraient dû payer si l’achat avait été fait en pleine propriété en raison du transfert de la propriété suite au décès.
Qu’est-ce qu’un usufruitier et un nu-propriétaire?
L’usufruitier a le droit de jouir d’un bien immobilier, qui appartient en fait à quelqu’un d’autre: le nu-propriétaire. Il peut donc occuper le logement, sans payer de loyer, ou même le mettre en location et en toucher les revenus locatifs. Il est par contre pas possible de le vendre ou de le donner sans le consentement du nu-propriétaire. Vous ne pouvez pas non plus l’hypothéquer dans son entièreté (sauf exception). L’usufruit est un droit temporaire, qui s’éteint automatiquement au décès de l’usufruitier. Cette extinction ne suscite ni frais, ni formalités, ni droits de succession.
Le nu-propriétaire est officiellement le propriétaire d’un bien immobilier. Il peut en disposer, mais il ne peut pas l’utiliser, ni en jouir. Il ne peut donc pas l’habiter ou le mettre en location, mais peut le vendre ou l’hypothéquer (bien que la plupart des banques n’acceptent l’hypothèque que moyennant l’accord de l’usufruitier).
Régulièrement financé par une donation
L’achat de la nue-propriété par les enfants est le plus souvent financé par les parents via une donation. La technique est régulièrement utilisée pour des résidences secondaires ou des immeubles de rapport. C’est fiscalement plus intéressant puisque les droits de donation en ligne directe ne sont que de 3% à Bruxelles, et à 3,3% en Wallonie. La méthode de la donation a néanmoins quelques subtilités auxquelles il est judicieux de faire attention.
De nouvelles précisions de l’administration fédérale
La donation est en soi relativement simple puisqu’elle ne doit pas forcément être enregistrée. Par contre le timing a lui toute son importance si l’on veut éviter les mauvaises surprises.
Ainsi, comme le précise le site des notaires, depuis le 1er août 2020 l’argent donné par les parents doit se trouver sur le compte des enfants avant la signature du compromis de vente. Si ce n’est pas le cas, l’administration considère que l’achat n’a pas été réalisé avec leurs propres fonds (et ils devront tout de même payer des droits de succession au moment d’hériter) .
On notera que cette précision fiscale n’est valable que pour Bruxelles et la Wallonie. Concrètement il faut que les parents aient eu leur domicile fiscal dans une de ces 2 Régions dans la période de 5 ans précédant leur décès. En Flandre c’est un peu plus souple puisque la donation doit juste précéder l’acte authentique (soit en moyenne un délai de trois mois supplémentaire)
Encore plus intéressant depuis juillet
Début juillet de nouvelles tables de conversion de l’usufruit ont été publiées. Elles permettent de chiffrer l’usufruit sur base d’un pourcentage. Or en 2024, les taux d’intérêt ont augmenté, entraînant la hausse considérable de la valeur de l’usufruit.
Si elles ont fait augmenter la valeur de ce dernier, elle a fait par un effet de balancier diminuer celui de la nue-propriété. Cela fait donc moins d’argent à sortir pour les enfants ou moins d’argent à transférer par donation, c’est selon.
Un exemple concret
La valeur de l’usufruit est calculée sur la base des tables de conversion, de la valeur vénale des biens et de l’âge de l’usufruitier au jour de l’introduction de la requête. En effet, l’espérance de vie de l’usufruitier est prise en compte. Ainsi, plus celui-ci est jeune, plus il est susceptible de bénéficier longtemps de l’usufruit, et plus sa valeur est élevée. De plus, une distinction est faite en fonction du sexe de l’usufruitier.
Cette année, les tables sont basées sur un taux d’intérêt maximal de 2,25% (contre 1,34% en 2023). Ce qui fait que l’usufruit d’une femme âge de 70 ans vaut 33,37% de la valeur totale du bien. En 2023, il était de 20,59. Soit une différence de plus de 10%. Imaginons qu’elle soit usufruitière d’un appartement à la Côte d’une valeur de 450.000 euros. Après conversion, sa part s’élève à 33,37% de 450.000 = 150.165 euros.
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