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L’impôt sur les pensions se détraque: le piège s’est encore accentué
Rien n’est aussi mystérieux que le calcul de l’impôt sur les pensions. Cet impôt est truffé d’anomalies, écrit Jef Wellens, fiscaliste chez Wolters Kluwer.
(Cet article est paru le 15 janvier 2016 en néerlandais sur MoneyTalk.be, nous vous en proposons aujourd’hui la traduction, hélas toujours d’actualité)
Contrairement aux salaires, les pensions sont soumises à des régimes spécifiques d’exonérations, des déductions fiscales ordinaires et complémentaires, qui ne constituent pas un ensemble cohérent. Si on intervient légalement dans un des systèmes, cela a souvent des effets secondaires bizarres dans un autre. C’est ce qui s’est passé l’an dernier avec la loi programme, et cela se produit maintenant à nouveau avec le tax shift.
Nous ne parlons pas du piège des revenus fiscaux qui, depuis des décennies déjà, joue des tours aux pensionnés avec une faible pension. Cette anomalie intervient si un pensionné a encore un autre revenu. Sur une pension de 15.500 euros, vous ne payez pas d’impôt, mais si vous combinez celle-ci avec un autre revenu – même si ce n’est que 10 euros – cela vous coûte dans ce cas pas moins de 800 euros d’impôt. Le problème est suffisamment connu, dans les milieux gouvernementaux aussi. A maintes reprises, les ministres des Finances successifs ont exprimé l’intention de solutionner cela, mais cela ne s’est jamais réalisé.
“L’impôt sur les pensions se détraque”
Beaucoup moins connu, c’est le piège de la pension qui intervient si un pensionné n’a pas du tout d’autres revenus. La loi programme a encore renforcé ce piège. Jusqu’au plafond de 15.518 euros par an (montant valable pour l’année d’imposition 2015), les pensions sont exonérées d’impôt. Si la pension est plus élevée, l’impôt est dans ce cas diminué de telle sorte que vous ne payez jamais plus d’impôt que le montant qui dépasse le plafond. Si vous avez une pension de 15.518 euros, vous ne devez dans ce cas rien au fisc. Si vous avez une pension de 15.618 euros, soit supérieure de 100 euros, vous payez alors 100 euros d’impôt. Dans les deux cas, votre montant net est le même.
Mais ce n’est pas tout à fait exact: ces 100 euros d’impôt sont encore majorés de la taxe communale. Si celle-ci s’élève à 8%, il vous reste alors 8 euros net (8% de 100 euros) en moins d’une pension de 15.618 euros que d’une pension de 15.518 euros. Cette petite perte n’est pas un drame, mais ce n’est évidemment jamais agréable de constater que vous avez moins en main après une augmentation de la pension brute. A la requête de l’opposition, le gouvernement a mis au point une solution par le biais d’une modification. C’était du moins l’objectif, car lors de la mise en oeuvre de la modification de la loi, l’une ou l’autre chose a dérapé sur le plan technique, ce qui fait que le piège de la pension n’a non seulement pas disparu, mais qu’il s’est encore accentué.
Si 50% d’imposition est déjà une lourde charge pour beaucoup, que penser de 113% ?
D’une pension de 15.700 euros, il vous reste actuellement 15.570 euros en net, alors que d’une pension de 16.700 euros vous ne conservez que 15.440 euros net, soit 130 euros de moins. Avant la modification de la loi, c’était seulement 80 euros de moins. 1.000 euros brut en plus signifie dans ce cas 130 euros net de moins. Absurde et injuste. Les taux d’imposition augmentent progressivement. Il n’y a rien de mal à cela, les épaules les plus larges supportent les charges les plus lourdes. Mais si 50% – le taux d’imposition normal le plus élevé – est déjà une lourde charge pour beaucoup, que penser de 113% ? Car c’est, au pays de Magritte, le réel taux d’imposition sur les 1.000 euros de pension qui dépassent 15.700 euros.
Seules les pensions inférieures à 17.000 euros peuvent être confrontées au piège des revenus et au piège de la pension. Les pensions plus élevées n’en sont pas affectées. Il s’agit donc d’un groupe de pensionnés pour lequel 130 euros, et certainement 800 euros, est un monde de différence.
En outre, ce groupe reste aussi sur le bord de la route avec le tax shift. À partir de 2019, le tax shift augmente la quotité exemptée d’impôt – la partie des revenus qui est exonérée d’impôt – pour tout le monde. La majoration générera une économie d’impôt annuelle d’environ 300 euros.
Mais comme cet avantage ne vise que les ‘actifs’, pour les ‘non actifs’ comme les pensionnés, c’est compensé par une déduction d’impôt inférieure sur leur pension. Cette déduction diminue de 300 euros, mais pour les pensionnés avec une pension élevée, elle ne diminue que de 100 euros. Conséquence: la majoration de la quotité exemptée d’impôt – l’élément clé du tax shift – ne génère rien pour les pensions jusqu’à 22.430 euros, alors que le pouvoir d’achat des pensions au-delà de 44.860 euros augmente de 200 euros. Cela est-il un effet secondaire intentionnel ou non désiré ? Étant donné que notre fiscalité des pensions est une machinerie complexe et délicate, j’opte pour la seconde option. Mais si je me trompe, c’est un choix politique extrêmement curieux.
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