Une confédération de PME dénonce la “déconnexion” de Bruxelles qui les “assomme avec un tsunami administratif”
Faire avancer la transition écologique des entreprises sans les bombarder de charges administratives : telle est la tâche délicate qu’essaie de résoudre Bruxelles.
Le dialogue est tendu en ce moment entre Bruxelles et les entreprises européennes, et c’est le moins que l’on puisse dire. Ces dernières veulent en effet ralentir la cadence de mise en application des normes européennes, accusées par certains d’étouffer les entreprises.
Le dernier en date à avoir tiré la sonnette d’alarme est la Confédération des PME, ou CPME, un organisme français qui représente presque 250 000 entreprises. Cette dernière a tenu ce jeudi une conférence de presse pendant laquelle son président, François Asselin, a lancé : “Nous ne voulons pas être broyés, assommés par un tsunami administratif tel qu’il est en train de se préparer.”
Dans ce qui “est en train de se préparer”, le patron de la CPME entend par là les nouvelles obligations de reporting extra-financier qui seront opérationnelles en janvier 2024. Il s’agit concrètement de la mise en application du CSRD (“Corporate Sustainability Reporting Directive” ou Directive sur la publication d’informations sur la durabilité des entreprises). Cette directive exige des entreprises qu’elles publient régulièrement des rapports sur les risques sociaux et environnementaux auxquels elles sont confrontées et sur l’impact de leurs activités sur les personnes et l’environnement. Cela pour que les investisseurs et autres parties prenantes puissent agir en toute connaissance de cause sur les impacts environnementaux des entreprises dans lesquelles ils comptent investir.
Alors que cette directive ne concernait que les grandes entreprises et des sociétés cotées, depuis le 05 janvier 2023, un ensemble plus large de grandes entreprises, ainsi que de PME cotées, sont désormais tenues de publier ces rapports de durabilité. Les premières concernées devront appliquer les nouvelles règles pour la première fois au cours de l’exercice 2024, pour des rapports publiés en 2025. D’où la levée de bouclier à l’approche de la date butoir.
Des mesures écologiques “pragmatiques”
François Asselin souhaite que la transition écologique se fasse dans une “temporalité qui correspond à la vie des entreprises” et avancer “progressivement pour emmener tout le monde.” Il souligne que la multiplication des normes européennes pourrait devenir une source de “défiance” entre entrepreneurs et acteurs publics.
Et pour remédier à cela, la CPME a publié un document comprenant “une série de mesures pragmatiques pour réussir la transition écologique.” Sous entendant que celles actuellement proposées par Bruxelles ne le sont pas. L’organisation plaide ainsi pour l’octroie d’une pause règlementaire pour que les entreprises s’adaptent aux nouvelles normes. Une “pause” qui a été, on s’en souvient, aussi proposée par l’Allemagne, la France et la Belgique entre autres.
La CPME souhaite aussi instaurer un “test PME” avant la publication d’un nouveau texte environnemental qui concernerait les entreprises, et rendre public ce test. Il s’agirait donc d’inviter un échantillon de petites entreprises à appliquer les règles en question afin d’analyser leurs effets avant que la loi ne soit votée. Et si cette dernière est adoptée, la CPME exige des formations pour comprendre et appliquer les réglementations, et assurer une traduction opérationnelle, c’est-à-dire des outils adaptés, du financement et de l’accompagnement.
Enfin, la CPME précise que “majoritairement, les TPE-PME ne seront pas directement assujetties à ces nouvelles obligations”, mais elle alerte sur les impacts indirects “du fait des effets de ruissellement.” Les standards de la CSRD sont aussi selon elle trop complexe, le nombre d’indicateurs dépassant les 80 et le nombre de points de données pouvant aller jusqu’à 1 500. “De nombreuses entreprises n’auront d’autre choix que de recourir à des consultants spécialisés, payés à prix d’or.” Les 25% de baisse des charges administratives promis par Ursula von der Leyen et l’annonce du “Paquet PME” n’auront donc pas calmé les principaux concernés.
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