Tesla célèbre sa première usine européenne, malgré les polémiques
Opération séduction près de Berlin: le constructeur américain Tesla inauguré samedi sa future “giga-usine”, la première en Europe, espérant livrer ses premières voitures électriques en décembre. Problème, il n’a pas encore les permis de construire.
Des milliers de personnes ont été accueillies pour une cérémonie festive, alors que l’entreprise n’a toujours pas reçu de permis de construire et que certains riverains s’opposent au projet.
Les participants ont été acheminés par des navettes spéciales à Grünheide, dans la banlieue de Berlin, formant de longues files d’attente pour accéder à la première usine européenne du groupe, devant laquelle des dizaines de chapiteaux blancs, une grande roue et des manèges avaient été installés.
En fin d’après-midi, l’emblématique patron du groupe Elon Musk a fait une apparition, tentant de lire quelques phrases en allemand, avant de reprendre son discours en anglais.
“Nous sommes prêts à démarrer la production d’ici quelques mois, en novembre ou décembre, pour livrer, espérons-le, nos premières voitures en décembre”, a-t-il déclaré.
“Avec cette usine, nous voulons produire des voitures électriques peu chères et en grande quantité (…) afin d’accélérer la transition énergétique”, a également lancé Elon Musk, sous les applaudissements.
La cérémonie s’est déroulée au fil de concerts de musique électro, visites de l’usine et “food trucks” végétariens, pour une journée que le groupe américain voulait à l’image de Berlin, capitale européenne de la fête.
– “Aucune date” –
A travers ces “portes ouvertes”, le constructeur américain veut montrer patte blanche auprès des habitants, après plusieurs mois de polémiques.
Tesla a en effet bénéficié d’une procédure exceptionnelle et controversée d’autorisation préalable, qui lui a permis de débuter les travaux dès 2019, avant d’avoir un permis de construire.
Aucun agrément définitif n’a depuis été délivré par les autorités locales, qui évaluent encore l’impact de l’usine sur l’environnement. Les travaux sont pourtant presque terminés.
Ce régime d’exception -et la situation administrative qui en découle- a suscité la colère de certains riverains, inquiets pour les ressources en eau et la biodiversité de la région.
“Stop Tesla”, “l’eau et la forêt ne sont pas pour le profit privé”: certains d’entre eux s’étaient rassemblés samedi matin à une centaine de mètres de l’usine pour exprimer leur rejet du projet.
“Il est incroyable de pouvoir construire une telle usine sans autorisation!”, s’est indigné Gurdrun Lübeck, militante associative locale de 69 ans.
Manifestations, recours en justice, lettres ouvertes… des opposants, soutenus par des associations, se sont mobilisés ces derniers mois pour retarder le projet.
L’an dernier, la justice a même contraint Tesla à suspendre son chantier en raison du risque de destruction d’habitat naturel d’espèces protégées de lézards et de serpents.
Une consultation publique, prévue dans le cadre de la procédure d’obtention du permis, est ouverte jusqu’au 14 octobre.
Une autorisation définitive ne devrait pas être accordée avant cette date. Celle-ci est indispensable pour que l’usine lance la production.
“Aucune date n’est encore fixée” pour délivrer cette autorisation, a assuré à l’AFP le ministère de l’Environnement du Brandebourg, la région où est implantée l’usine.
– Retards –
Parmi les invités à la fête, pour la plupart des habitants de la région, on ne trouvait pas que des soutiens inconditionnels de l’entreprise. “Je suis critique, en quelque sorte. Il n’y a pas assez de routes, de place, pour une telle usine ici”, estime Marlen Winkler, 35 ans.
L’usine, annoncée en grande pompe en novembre 2019, s’étendra sur 300 hectares, pour une production de 500.000 véhicules électriques par an.
Beaucoup craignent l’insuffisance des infrastructures pour accueillir une telle installation, dans cette ancienne région d’Allemagne de l’Est.
L’usine doit bénéficier des technologies dernier cri, avec notamment “la plus grande machine de moulage de pièces détachées au monde”, note Ferdinand Dudenhöffer, expert automobile et directeur de l’institut allemand Center Automotive Research.
Elon Musk prévoit également d’y construire “la plus grande fabrique de batteries au monde”.
Le groupe devra démonter l’usine à ses frais si aucun permis de construire ne lui était délivré. Une issue jugée “improbable” par M. Dudenhöffer, en raison du “soutien politique” au projet. “L’ensemble des partis politiques y sont favorables”, rappelle l’expert.
Mais des “modifications de l’édifice” pourraient être demandées, retardant l’ouverture. Celle-ci était initialement prévue en juillet.
fcz/clr
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