Ces anciens de BlackRock créent leur propre boîte d’investissement en Belgique

Julien Daco (au fond, à gauche) et Yoni Jennes (au fond à droite). Image : Toward.
Charly Pohu

Ils quittent BlackRock pour lancer leur propre boîte de gestion de patrimoine et d’assurances. Avec une double licence qui donne beaucoup d’avantages. Rencontre avec Julien Daco et Yoni Jennes de Toward Wealth & Insurance.

C’est l’envie d’entreprendre qui a poussé Yoni Jennes et Julien Daco à quitter le géant des fonds d’investissement, BlackRock, et à lancer leur propre aventure. Le premier avait démissionné en juin, le second en août. Et ici en octobre, avec les licences nécessaires en poche, ils ont annoncé sur LinkedIn avoir cocréé Toward Wealth & Insurance. Ou plutôt rejoint l’aventure commencée en 2022 par Stephan Desplancke, ancien collègue à eux chez BlackRock également. Mais pour la porter à un autre niveau.

C’est que Toward se spécialise sur deux aspects en même temps, avec une double licence. La gestion de patrimoine et maintenant aussi l’assurance. Un concept novateur encore rare en Belgique. Le but, c’est servir les clients particuliers avec ce qui leur va le mieux : un compte-titres ou un produit d’assurance-vie (comme la branche 23) pour faire des placements. Voire une combinaison entre les deux. Pour utiliser les avantages de l’un ou de l’autre, en fonction des besoins et des horizons du client.

Optimisation pour le client

Mais ce sont aussi d’autres éléments, couplés à cette envie d’entreprendre, qui ont décidé les deux trentenaires à se lancer avec Toward, nous expliquent-ils. Par exemple, le fameux advice gap, pour Yoni Jennes – qui, il y a peu, ne se serait d’ailleurs jamais vu comme entrepreneur. “Le nombre de particuliers qui ne reçoivent pas de service de conseil financier ou peut-être pas le service adéquat… On s’est dit ok, voilà, on peut faire mieux. C’est notre conviction.”

Ou les frais payés par le client final, ajoute Julien Daco. Il représentera Toward en Wallonie, avec un bureau à Liège. “Quand on rencontrait des courtiers en Belgique, pour des formations par exemple, on voyait les pratiques et la différence de réalité entre ce que nous voyions dans le monde institutionnel, c’est-à-dire des frais très bas et des solutions très compétitives, et en bout de chaîne, on voit ce que paye le client final. Et c’est sur base de ça qu’on a commencé à discuter en se disant si un jour on faisait le pas, comment est-ce qu’on imaginerait le setup idéal?”

Et c’est là que cette double licence prend tout son sens, poursuit-il. “Elle nous permet d’être totalement transparent et d’éviter d’avoir une quelconque incitation. Parce que notre marge, que ce soit du côté assurance ou du côté gestion avec un compte-titre, elle va être la même. Il ne va pas y avoir de double marge ou d’obligation d’aller dans une direction parce que c’est la seule qu’on propose, comme c’est le cas pour des banques ou des compagnies d’assurances.” Autre élément de transparence : Toward ne fonctionne pas avec des rétrocessions ou des partenariats privilégiés. De nombreux produits sont ainsi disponibles.

“On a par exemple fait des analyses et des calculs pour des clients, et on ‘est dit que cela valait peut-être la peine de transformer un portefeuille bancaire en assurance vie, même avec les frais de cette couche assurantielle qui, oui, en première vue, sont légèrement plus élevés. Nous, on y gagne exactement la même chose. Ces frais donc sont légèrement supérieurs, mais les avantages fiscaux ou autres sont clairement intéressants. On arrive à un break-even assez rapidement. Voilà, on va vraiment toujours faire du cas par cas. Cela dépend du profil de risque et personnel du client”, abonde Yoni Jennes.

Frais

Les frais sont donc un aspect important pour les entrepreneurs. Les deux travaillaient notamment sur les ETF, chez BlackRock, et connaissent bien ces produits aux frais très bas. Ils servent d’ailleurs souvent de base pour commencer à construire un portefeuille, puis les gestionnaires ajoutent d’autres actifs, selon ce que recherche le client. Mais nos interlocuteurs pensent aux frais en termes d’optimisation et d’efficacité. Ils n’ont pas pour vocation d’être les moins chers du marché belge. Certains fonds, comme des fonds actifs ou des fonds de private equity, ont un coût plus élevé. Mais ils les sélectionnent pour le client si cela a un sens dans son portefeuille. Les frais dépendent aussi de la qualité des produits.

Ils expliquent que cette combinaison des différents actifs, fonds et marchés auprès d’un même acteur est plutôt rare en Europe. Et si cela est proposé, c’est réservé pour les très gros portefeuilles. Alors qu’ici, le ticket d’entrée est de 100.000 euros. “Les banques privées vont généralement viser des montants plus élevés. C’est ainsi vraiment un effort de notre part de pouvoir redescendre ce minimum”, détaille Julien Daco.

Autre gain de frais : au niveau des intermédiaires des fonds d’assurance-vie. Les courtiers en assurances vont aller auprès d’un gestionnaire de fonds, qui s’occupe des actifs sous-jacents du produit. Ce qui fait deux fois des frais, pour le client. “Le fait de pouvoir faire les deux étapes au même moment, chez nous, fait qu’on est très flexible et on peut être très compétitif sur le pricing. On ne doit pas gagner deux fois la marge”, explique Yoni Jennes.

La dé-cumulation

Autre concept novateur que Toward amène et a développé soi-même : un outil de simulation qui calcule le rendement et l’accumulation du portefeuille. Par exemple, si on met de côté autant par an et que le rendement moyen est de x%, combien aura-t-on à la retraite. Mais pas que, et c’est là la particularité : il inclut aussi les différents besoins du portefeuille. Notamment la dé-cumulation, et comment s’y adapter.

“Prenons par exemple un médecin. Il est habitué à un certain niveau de vie. A 65 ans ou 67 ans, il se dit: “Voici mon train de vie. Et voici la retraite que je vais recevoir. Comment est-ce que je vais franchir l’écart entre les deux?” Donc l’outil va calculer comment on peut vivre confortablement avec notre portefeuille. Est-ce qu’on peut vivre avec 3.000 euros qu’on prend dans son portefeuille chaque mois pour les prochaines 20 ou 30 années ? Ou est-ce qu’on va diminuer ou augmenter son profil de risque ? Et inversement, si on prend un jeune sportif de 20 ans, 25 ans ou 30 ans. Il a le même problème que le médecin, mais ce n’est pas à 65 ans, mais plutôt à 35 ans. Il doit survivre 50 ans encore après sa carrière, avec ce qu’il a constitué dans son portefeuille”, illustre Yoni Jennes.

“L’idée de cet outil, c’est de ne pas juste avoir une simple projection. Mais de réconcilier l’évolution du portefeuille du client, voire de choisir le portefeuille du client sur base d’une optimisation avec ses paramètres de vie. L’accumulation est une partie de la vie où le patrimoine doit être géré tout à fait différemment. On voit généralement les jeunes qui sont à 90 pour 100% d’actions et chaque année ils vont dérisquer leur portefeuille. Quand ils arrivent à 67 ans, ils sont quasiment à 100% en obligations, ou en tout cas sur quelque chose de très défensif.

Souvent, on imagine que 67 ans, c’est l’horizon indépassable de l’investissement. Mais il y a des tas de gens qui se retrouvent avec une somme d’argent folle qui tombe sur leur compte. Ce qui n’est pas sans risques pour le patrimoine. Mais l’histoire ne se termine pas là. Parce qu’il y a tout intérêt, sauf s’il y a un gros projet de vie à 67 ans, à continuer à faire travailler cet argent. Donc, on regarde comment optimiser ce moment de bascule. Cela peut justement être le moment de reprendre plus de risques. Il y a bon nombre de recherches académiques qui montrent que, en fait, même passé un certain âge, un client reste mieux loti dans un portefeuille 60-40 voire 70-30″, ajoute Julien Daco.

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