Un employeur peut-il se soustraire à l’indexation des salaires?

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Souvent appliquée en début d’année, l’indexation obligatoire des salaires peut-elle être évitée par un employeur?

La Belgique est l’un des rares pays qui prévoit une indexation automatique des salaires afin de compenser l’évolution du coût de la vie. Cette indexation est organisée au niveau sectoriel via des conventions collectives de travail déterminant les modalités de calculs de cette indexation.

Sous la commission paritaire 200 – c’est-à-dire la commission paritaire résiduelle pour tous les employés ne ressortant pas d’une autre commission, soit près d’un demi-million de travailleurs – cette augmentation est appliquée au 1er janvier et basée sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation. Sous d’autres commissions, des modalités parfois différentes seront prévues tant sur le timing (en cours d’année, à une ou plusieurs reprises) que sur les montants (montants fixes ou déterminés par référence à l’indice des prix).

Dans tous les cas, les conventions collectives sectorielles réglant l’indexation sont rendues obligatoires par arrêté royal. Ne pas les appliquer expose donc l’employeur à une sanction pénale de niveau 1, c’est-à-dire une amende administrative de 80 à 800 euros (centimes additionnels compris), sans compter le risque civil de devoir payer des arriérés de rémunération. L’employé disposant à ce sujet d’un délai de prescription de cinq années et ce – en suivant la thèse du délit dit “continué” – à partir de la dernière infraction. En d’autres termes, un juge pourrait décider d’octroyer des arriérés sur toute la carrière d’un travailleur.

Une clause de ­non-application ?

Insérer une clause dans le contrat de travail prévoyant l’accord des parties sur la non-application de la clause ne fonctionnera pas, une telle clause étant nulle car contraire à une convention collective rendue obligatoire (principe de la hiérarchie des normes en droit social).

Obtenir une renonciation du travailleur à bénéficier de l’indexation ne fonctionnera que si cette renonciation est donnée après la date de l’indexation car le travailleur ne peut y renoncer valablement qu’après que son droit est né (disposition impérative). Et bien entendu sans pression. La renonciation peut être implicite mais doit être certaine. En tout cas, le silence ou l’omission ne constituent généralement pas une renonciation. Un accord sur une réduction de salaire pourrait lui être valable même par avance.

Quant au fait d’avoir déjà donné une augmentation de “mérite” au travailleur en cours d’année, cela ne dispensera pas l’employeur d’appliquer l’indexation à moins de pouvoir prouver que cette augmentation de mérite ne couvrait pas que les bonnes performances du travailleur mais visait aussi à compenser l’augmentation du coût de la vie.

Christophe Delmarcelle, Associé fondateur
Cabinet DEL-Law
Juge suppléant au tribunal du travail

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