Réinsertion professionnelle: trouver le bon job … et la bonne personne

Le cosearching s’adresse à tous les publics, sans distinction ni d’origine, ni de diplômes, ni de parcours. © PG

Financé par Actiris, le cosearching est un projet innovant qui, dans un cadre dynamique et collaboratif, permet aux chercheurs d’emploi de rebondir en répondant concrètement à leurs besoins ainsi qu’à ceux des entreprises en quête de nouvelles recrues.

Lorsque l’on interroge les chefs d’entreprise, et singulièrement ceux des PME, sur les défis qu’ils ont à relever, le recrutement figure souvent parmi les premières réponses données. Dénicher du personnel s’apparente même à un véritable casse-tête pour certains. Pourtant ce ne sont malheureusement pas les personnes en recherche d’emploi qui manquent. Notamment à Bruxelles et en Wallonie.

Au-delà d’un profil d’emploi défini, d’autres paramètres entrent dorénavant davantage en compte pour décrocher un job, avec au premier chef une palette de compétences aussi diverses que l’esprit d’équipe, l’autonomie, l’empathie, la confiance en soi ou encore la capacité d’écoute, pour en citer quelques-unes. Les chercheurs d’emploi évoluent dans un paysage économique marqué peu ou prou par un chômage structurel, la compétition entre candidats, le manque de feedback de la part des recruteurs. Autant de facteurs qui ne concourent pas à accroître les chances de ces derniers de retrouver du travail.

À destination d’un public diversifié

C’est dans ce contexte qu’a été mis sur pied, fin 2019 à Bruxelles, le cosearching, qui se présente comme “un modèle d’entraide et d’intelligence collective pour les chercheurs d’emploi”. Financé par Actiris jusqu’en décembre de cette année, le cosearching est un partenariat de quatre associations complémentaires : Activ’Action, Backstage.Network, Divers Gens et Tracé Brussel.

“Si le cosearching est officiellement né il y a six ans, rappelle Benoit de Bellefroid, cofondateur de Divers Gens, sa genèse remonte à quelques années plus tôt. Après la crise financière de 2008, des chercheurs d’emploi au Portugal se sont spontanément réunis afin de faire face à l’isolement et ainsi s’entraider pour traverser cette période difficile. Le projet est né à Bruxelles, à l’initiative d’Actiris, dans le cadre du dispositif des Maisons de l’emploi, en collaboration avec trois acteurs experts en intelligence collective.”

Fin 2021, un Cosearching Center est ouvert à BeCentral pour accueillir la communauté d’entraide et renforcer les initiatives de ses “cosearchers“. Le cosearching s’adresse à tous types de publics, sans distinction ni de diplômes, ni d’origine, ni de parcours. Une hétérogénéité qui fait la richesse du projet. Les participants sont des personnes pourtant motivées, qui se retrouvent éloignées de l’emploi pour diverses raisons : “accidents” de vie (burn-out, maladie, etc.), difficulté à construire un réseau, non-connaissance des codes attendus pour le type d’emploi visé ou profil moins recherché (par exemple les seniors).

© PG

Travail en équipe et autonomie

En pratique, le cosearching se déroule en deux phases. La première se concentre sur l’initiation au travail en équipe et dure huit semaines. Durant celle-ci, les participants sont accompagnés par un facilitateur, comme le détaille Laurence Warnant, facilitatrice chez Activ’Action : “Les groupes sont constitués de 12 à 15 personnes qui apprennent au fil des semaines à se connaître, à identifier leurs besoins et déterminer les thématiques sur lesquelles elles souhaitent collaborer.” Le facilitateur ou la facilitatrice apporte un cadre et sensibilise les participants aux soft skills nécessaires au travail en équipe. Ensuite, il va progressivement s’effacer afin de permettre au groupe de gagner en autonomie. C’est alors que débute la seconde phase, articulée sur l’autonomie connectée au sein de la communauté.

Les groupes vont donc désormais fonctionner de manière autonome tout en restant intégrés à la communauté du cosearching. Les rencontres sont organisées dans l’espace de coworking collaboratif situé à BeCentral. “Au sein de la communauté, ils ont accès tous les mois à des workshops et ateliers variés, tels que des hackathons, des rencontres avec des recruteurs ou des entreprises, des temps de travail collectif sur un secteur ou un aspect spécifique, poursuit Laurence Warnant. Ces opportunités leur permettent d’élargir leurs horizons et de dynamiser leurs démarches.”

Chaque semaine, de nouvelles initiatives émergent directement des participants, comme dernièrement les usages de l’IA dans la recherche d’emploi. “Le mot-clé à toutes les étapes du processus est l’entraide, reprend Benoit de Bellefroid. C’est vraiment grâce à l’entraide que les participants vont retrouver de la confiance en eux et leurs capacités.”

Une dynamique bénéfique pour les chercheurs d’emploi…

Depuis son lancement en 2019 et après avoir traversé la période difficile du covid, le cosearching a prouvé son utilité, non seulement sur le plan humain mais également plus prosaïquement sur le plan professionnel. Les chiffres le confirment. Depuis 2019, quelque 1.739 Bruxellois ont été accompagnés et répartis dans 156 groupes d’entraide, avec en 2022, la moitié de sorties positives vers l’emploi, la formation, les études ou un projet entrepreneurial, six mois après l’accompagnement. Pour les autres, cela leur demande un peu plus de temps mais la communauté d’entraide reste active et stimulante jusqu’à ce que chacun décroche un job.

Dans une enquête d’évaluation menée en 2024, on relève que 87% des participants considèrent avoir significativement avancé vers leur projet professionnel à l’issue de la phase initiale d’accompagnement du cosearching, 92% des bénéficiaires jugent avoir sensiblement accru leurs soft skills durant la phase d’accompagnement et 95% des cosearchers interrogés estiment continuer à renforcer ces compétences en fréquentant la communauté.

Les témoignages de cosearchers que nous avons recueillis confirment les chiffres mentionnés ci-dessus. Petit tour d’horizon avec Céline, Pierre et Papy qui illustrent la diversité des personnes que l’on croise et qui se rencontrent ici dans un espace convivial. “J’ai vécu à l’étranger jusqu’à présent, tout en étant Belge, commence Céline. Je suis revenue au pays en août dernier ne connaissant que très peu de monde et ne bénéficiant d’aucun réseau. Le cosearching m’a permis de sortir de chez moi, de rencontrer d’autres personnes, d’échanger avec elles et également de trouver un travail dans le social.”

Pour sa part, Pierre, qui est Français, a un parcours qui l’a mené de l’Asie à Bruxelles, “juste avant que ne débute le covid, poursuit-t-il. J’avais une société de production de documentaires au Cambodge et comptais ouvrir un bureau à Bruxelles. Mais avec la crise sanitaire, tout a capoté. Le cosearching m’a permis de créer du lien social et de rebondir”.

Enfin, Papy, originaire du Congo, qui apprend, alors que nous parlons, qu’il vient de décrocher un emploi chez McDonald’s et qu’il commence ce soir : “Depuis que je suis arrivé en Belgique, j’ai enchaîné les petits boulots dans les restaurants et dans les bars. Grâce au cosearching, j’ai pu préciser le travail que je cherchais et me doter des outils pour l’obtenir.” La preuve par le message positif qu’il a reçu durant notre échange.

© PG

…et pour les entreprises qui cherchent à recruter

Si les bénéfices que les participants retirent du cosearching sont clairs, ils ne sont pas moindres pour les entreprises qui participent au projet et/ou y font appel pour leur recrutement. C’est notamment le cas avec SD Worx. “Une approche diversifiée est très importante dans le recrutement, confie Angéline Parizel, talent sourcing & recruitment marketing lead chez SD Worx. Nous arrivons ainsi à trouver des talents que l’on ne détecte pas dans des circuits plus classiques. Un spécialiste IT n’est pas naturellement sur LinkedIn, par exemple. Le cosearching nous a permis de rencontrer des personnes pleines de ressources.”

Parmi les entreprises engagées aux côtés du cosearching, on peut relève notamment les noms d’Infrabel, TriFinance, la Croix-Rouge, NTT Data, Irisnet ou encore Mac Square qui détient des franchises McDonald’s et qui a mis en place un processus de recrutement inclusif, en lien avec l’accompagnement du cosearching.

“Ces partenariats et ces collaborations avec les entreprises font partie de différentes initiatives que nous développons avec elles, intervient Flavio Zárate Chabluk qui travaille pour Backstage.Network où il est en charge des partenariats avec les entreprises inspirantes. Nous organisons ainsi, entre autres, des ateliers interactifs entre chercheurs d’emploi et collaborateurs d’entreprises, dans un format workshop dynamique, et le sprint pour l’emploi qui est un atelier hebdomadaire pour avancer concrètement dans les candidatures. Mentionnons aussi le parcours Jobday, qui est un accompagnement complet autour d’un salon de recrutement, en trois étapes avec une préparation aux offres avant, une participation en groupe pour rencontrer les recruteurs durant le salon, et un suivi personnalisé et des relances après, ou encore le parcours Job Dating qui est une immersion sur le terrain avec une entreprise partenaire.”

Autant d’initiatives qui sont profitables tant aux chercheurs d’emploi qu’aux entreprises, mais qui pourraient ne plus être financées par Actiris l’an prochain. Dans le contexte de la réforme du chômage et de la limitation des allocations, à partir de janvier prochain, le cosearching est donc en quête de nouveaux financements afin de continuer à aider concrètement et efficacement les personnes en recherche de travail. Parmi les pistes imaginées figurent une campagne de dons ainsi que le sponsoring d’entreprises qui pourraient ici faire coup double. En soutenant des chercheurs d’emploi, elles pourront également découvrir les futurs talents qui leur manquent.

Suivez Trends-Tendances sur Facebook, Instagram, LinkedIn et Bluesky pour rester informé(e) des dernières tendances économiques, financières et entrepreneuriales.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content