Interdire à ses employés toute autre activité rémunérée ?

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En tant qu’employeur, pouvez-vous encore imposer à vos travailleurs d’exercer leur activité professionnelle uniquement auprès de votre entreprise ?

1/ En principe, le travailleur a le droit d’occuper ­plusieurs emplois

Avant l’entrée en vigueur de la loi du 7 octobre 2022 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles, de nombreux contrats de travail contenaient des clauses d’exclusivité interdisant à l’employé d’exercer une activité complémentaire pendant toute la durée de son occupation. Dorénavant, les employés ont le droit de combiner plusieurs emplois auprès de différents employeurs. La nouvelle loi précise également que l’employé ne peut pas être soumis à un traitement défavorable en raison de ses activités complémentaires. Toutefois, l’employeur peut prévoir dans le contrat de travail que l’employé devra l’informer au ­préalable de ses éventuelles activités complémentaires.

2/ Prévoir une clause d’exclusivité adaptée

Il reste toutefois possible pour l’employeur, dans certains cas légitimes et limités, de prévoir une clause d’exclusivité adaptée dans le contrat de travail. A cet égard, la loi permet de déroger à l’interdiction d’insérer une clause d’exclusivité sur base d’une justification légale. A titre d’exemple, l’employeur pourrait invoquer la loi sur les contrats de travail pour empêcher, via une clause d’exclusivité, ses employés de travailler pour un concurrent en dehors de leurs horaires de travail. Il est également possible pour l’employeur, en s’appuyant sur l’obligation qu’à l’employé de ne pas compromettre sa propre sécurité ou celle d’autrui, d’insérer une clause d’exclusivité interdisant toute activité chez un autre employeur qui compromettrait la sécurité de tous, comme un travail de nuit supplémentaire.

Enfin, il est à noter que la loi du 7 octobre 2022 ne vise que les activités complémentaires exercées pour un autre employeur. La législation reste muette en ce qui concerne les activités complémentaires que l’employé exercerait en tant qu’indépendant en dehors de ses heures de travail. Il pourrait donc être argué que l’employeur peut interdire à ses employés d’exercer une activité complémentaire en tant qu’indépendant via une clause d’exclusivité. Cette position pourrait bien entendu être contestée devant les juridictions du travail. Mis à part celles fondées sur une justification légale, toute autre clause d’exclusivité n’est dorénavant plus valable.

3/ Nécessité de vérifier les clauses d’exclusivité existantes

Une réévaluation des clauses d’exclusivité existantes dans les contrats de travail des employés (puisque celles-ci ne sont plus valables) est vivement conseillée. A défaut, les employés pourront valablement en contester la validité et l’application.

Enfin, on notera que si l’employeur impose une clause d’exclusivité illégale, la législation prévoit qu’il est passible d’une sanction pénale de niveau 2, c’est-à-dire une amende pénale de 400 à 4.000 euros ou une amende administrative de 200 à 2.000 euros. Le risque d’application effective d’une sanction pénale nous semble toutefois théorique.

Océane De Ridder, avocate chez CMS

Gaël Chuffart, avocat associé

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