Qui est derrière la capsule de suicide assisté Sarco, la « Tesla de l’euthanasie »

La capsule Sarco.

Polémique en Suisse, lundi après-midi, une première personne est décédée dans une « capsule de suicide », un acte contraire à la législation suisse. Derrière cette invention controversée, on trouve Philip Nitschke, un médecin australien résidant aux Pays-Bas.  

Ce lundi après-midi, une Américaine de 64 ans a été la première personne au monde à utiliser la capsule Sarco – abbréviation pour “sarcophage” – pour mettre fin à ses jours, selon des informations du Volkskrant. Le ministre de l’Intérieur avait pourtant déclaré que cette capsule d’assistance au suicide était contraire à la législation suisse. Bien que le pays ait une approche libérale sur l’euthanasie, l’appareil suscite la controverse en raison de son approche sans assistance extérieure. La capsule a été imaginée par Philip Nitschke, avec le designer néerlandais Alexander Bannink. Ce médecin australien résidant aux Pays-Bas est aussi surnommé “Dr Death”, pour sa pratique de suicides assistés.

D’après le journal suisse Blick, la capsule a été utilisée pour la première fois dans une cabane de montagne à Merishausen, dans le canton de Schaffhouse en Suisse. Son inventeur, Philip Nitschke, a également confirmé l’information au journal local NZZ.

La fin de vie en mode “DYI”

Ce dernier est le fondateur et directeur d’Exit International. Il est co-auteur de plusieurs ouvrages sur l’euthanasie. Parmi ses publications sur la thématique: Peaceful Pill eHandbook Essentials, un manuel pratique de choix de fin de vie en mode « DYI, faites-le vous-même ». Going to Switzerland: how to plan your final exit (Aller en Suisse : comment planifier votre dernier départ), ou encore, Killing Me Softly: Voluntary Euthanasia and the Road to the Peaceful Pill (Me tuer en douceur : L’euthanasie volontaire et le chemin vers la pilule de la paix.)

“Australien de l’année”  

Né en 1947 dans une région rurale de l’Australie-Méridionale, Philip Nitschke a étudié la physique à l’Université d’Adélaïde, obtenant un doctorat en physique des lasers à l’Université Flinders en 1972. Un grave accident au pied l’a conduit à retourner à l’université, où il a obtenu son diplôme de médecine à l’École de médecine de l’Université de Sydney en 1988.

L’inventeur de la capsule a aussi reçu plusieurs prix en Australie dont le “Rainier Foundation Humanitarian Award” (1996), le prix “Northern Territorian of the Year” (1997), l'”Australian Humanist of the Year” (1998). Il a également été nominé 8 fois pour le titre d’”Australian of the Year” (2005, 2006, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013), dont à deux reprises, en tant que finaliste (2005 & 2006).

Première injection volontaire et létale légale

En 1996, Philip Nitschke est devenu le premier médecin au monde à administrer une injection volontaire et létale légale sous la loi éphémère “Rights of the Terminally Ill Act 1995”. Cette loi légalisant l’euthanasie dans le Territoire du Nord de l’Australie, avait été adoptée par l’Assemblée législative du territoire en 1995. Quatre de ses patients en phase terminale ont bénéficié de cette loi pour mettre fin à leurs souffrances avant qu’elle ne soit annulée en mars 1997 par le Parlement australien. Le Dr Death a, par après, encore été sollicité par des personnes âgées et gravement malades cherchant de l’aide pour mourir. En réponse à ce besoin, il a quitté la médecine et fondé la Voluntary Euthanasia Research Foundation  (aujourd’hui appelée Exit International) au début de 1997. 

Philip Nitschke, défenseur australien de l’euthanasie, assiste à une présentation par The Last Resort de la machine à suicide Sarco, une capsule imprimée en 3D qui donne à l’utilisateur le contrôle ultime sur le moment de sa mort et qu’il a créée. 17 juillet 2024. REUTERS/Denis Balibouse/File Photo

La « Tesla de l’euthanasie » 

Le « Sarco » est vivement critiquée en Suisse. Le dernier modèle de l’appareil imprimé en 3D, surnommé la « Tesla de l’euthanasie », a été présenté en juillet dernier par l’association The Last Resort. Cette dernière regroupe un collectif international de défenseurs des droits de l’homme (ayant une formation en droit, en sciences, en médecine et en soins de santé) qui souhaitent diversifier (et améliorer) le processus d’aide à la mort en Suisse. La capsule permet aux patients de mettre fin volontairement à leurs jours sans l’assistance d’un médecin. Le Sarco peut aussi servir de cercueil. Selon le site de l’association, l’utilisation de la capsule est gratuite pour les utilisateurs agréés. “Une belle mort est un droit humain fondamental”, stipule sur son site The Last Resort.

Azote liquide

La personne concernée s’allonge dans un siège à l’intérieur de la capsule et appuie sur un bouton. La capsule se remplit alors d’azote liquide, ce qui diminue le taux d’oxygène. En quelques minutes, la personne perd conscience, et peu après, elle décède. 

Selon De Volkskrant, la première personne à mourir dans la capsule Sarco est une Américaine de 64 ans. Cela s’est produit ce lundi 23 septembre vers 16 heures en présence de Florian Willet, un juriste et directeur de The Last Resort qui a supervisé le processus. Il était la seule personne présente lors du décès.  

« Elle voulait vraiment mourir. Elle n’a plus rien dit »

Philip Nitschke

Inventeur de la capsule Sarco.

Nitschke a suivi le processus depuis l’Allemagne à l’aide de capteurs d’oxygène et de fréquence cardiaque, ainsi qu’une caméra placée dans la capsule. Selon lui, tout s’est déroulé comme prévu. Il a déclaré que dès que la personne s’est allongée dans la capsule, elle a immédiatement appuyé sur le bouton. « Elle voulait vraiment mourir. Elle n’a plus rien dit », a-t-il rapporté à De Volkskrant, qui a suivi le processus depuis le début. 

Contre la législation 

De nombreuses polémiques entourent la capsule. Elle ne respecterait pas les normes de sécurité des produits et la législation sur les substances chimiques. Élisabeth Baume-Schneider, cheffe du Département fédéral de l’intérieur, a affirmé qu’elle ne pouvait donc pas être commercialisée. Des procureurs ont menacé de poursuites judiciaires si la capsule était utilisée. Un procureur local parle même d’incitation au suicide. Le ministère public a ouvert une enquête et plusieurs personnes, dont Florian Willet, ont été placées en détention provisoire. La capsule a été saisie pour investigation. 

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