Quels seront les emballages de demain ?
Le boom du commerce en ligne amplifié par la crise du covid a eu un effet turbo sur le secteur de l’emballage et créé de nouvelles attentes. Pour continuer à cartonner, l’emballage moderne se doit d’être le plus possible solide, éco-responsable et sur mesure. Producteurs et distributeurs de caisses, boîtes et enveloppes s’activent à trouver des solutions d’avenir.
Plus de 1,8 milliard de transactions (+5,8% par rapport à 2019), un chiffre d’affaires planétaire de 112 milliards d’euros (+8,5%), la vente de produits se taillant 54% des achats en ligne… A l’échelle belge, 108 millions de transactions, 20.000 nouveaux commerces en ligne… 2020 a bien été l’année de l’e-commerce, dopé par la pandémie. Sous cette impulsion, le secteur de l’emballage s’est également emballé. Avec trois priorités comme curseurs: l’écoresponsabilité (dans le choix des matériaux), la solidité des caisses, boîtes et enveloppes, et le sauvetage des produits neufs récupérés nickel dans des emballages endommagés. Sur ce dernier aspect, certains acteurs comme l’entreprise néerlandaise Buybay, active dans le reconditionnement et la revente de produits retournés, ou la plateforme belge d’e-commerce Veepee montrent l’exemple d’un re-use circulaire.
L’e-commerce triomphant a consacré l’emballage comme levier stratégique central d’une expérience client positive.
L’e-commerce triomphant a donc consacré plus que jamais l’emballage comme levier stratégique central d’une expérience client positive. A condition de remplir ses rôles essentiels: protéger au maximum les articles ; constituer un colis pratique et à l’aspect irréprochable puisqu’il est l’unique élément de contact physique entre l’e-commerçant et son client ; et garantir une écodurabilité au service de la préservation de la planète. Un dernier critère qui, selon une enquête réalisée en 2020 par le géant de l’emballage Smurfit Kappa, est capital pour 50 à 75% des consommateurs.
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Nombre moyen de chutes d’un paquet au cours de sa séquence manutention/ envoi/transport/retour.
Omniprésent au niveau planétaire, le système de vente-envoi-retour de biens de consommation s’affaire donc à trouver de nouvelles solutions. Tant pour séduire ses clients que diminuer l’impact écologique de ses milliards d’envois et résoudre le casse-tête des dégâts subis par l’emballage au cours de son acheminement. L’enquête Smurfit Kappa menée dans 10 pays européens épinglait aussi qu’environ 7% de l’ensemble des colis étaient endommagés lors de leur parcours. Une autre étude menée pour DS Smith, géant britannique de la production d’emballage carton, souligne qu’en moyenne, 68% de clients ne passeraient plus commande en cas de colis endommagés… Un directeur du groupe résume: “L’utilisation d’emballages mal conçus a des conséquences très concrètes: elle entraîne une augmentation des trajets, des risques de dommages, le tout ayant pour effet d’impacter négativement la réputation d’une marque ou d’un commerçant”.
Boîtes à solutions
A chaque produit envoyé sa boîte selon sa taille, son poids, son degré de fragilité, son besoin de remplissage, etc. Ça en fait des types d’emballages à fabriquer (un modèle de caisse existe parfois en 10 dimensions! ), manipuler, stocker et envoyer. La réflexion et les expériences vont bon train pour plus d’efficacité tant ergonomique qu’écologique. Exemples.
La caisse à hauteurs variables. Magique! Une seule caisse adaptable à 12 différentes dimensions, grâce à un système de joints plus souples à entailler/plier. Cet emballage résistant et à forte modularité signifie moins de boîtes à stocker et moins de calage/remplissage.
La caisse à “fond automatique”. Pour mettre en forme une caisse, il faut d’habitude plier ses éléments puis fermer tous ses joints à l’adhésif plastique ou PVC. La boîte dont le fond se déploie automatiquement fait gagner du temps à ceux qui emballent puisqu’il ne faut plus adapter sa partie inférieure ni la renforcer d’adhésif. Ergonomique et respectueux pour l’environnement.
Les caisses pliables et pochettes plastiques réutilisables. Qui dit e-commerce dit aller et retour possible d’un produit. Dès lors, pourquoi ne pas prévoir d’office la réutilisation de l’emballage pour d’autres envois? En France, la solution Hipli est développée en partenariat avec La Poste. Son principe: l’e-commercant et ses clients ont le choix de recourir à une large gamme d’emballages réutilisables, caisses et pochettes plastiques avec zip. Après réception de son paquet, le client peut déposer son emballage vide et facilement pliable dans une boîte aux lettres. La Poste relève celle-ci, récupère les boîtes et emballages vides, les nettoie puis les redistribue aux e-commerçants qui peuvent les réutiliser jusqu’à 20 fois. Certaines caisses sont même réutilisables 50 fois. Ce nouveau type d’emballages figure déjà au catalogue de RAJA Belgique mais celle-ci aspire à la création d’un système de retour comparable avec bpost. D’autres acteurs comme le finlandais RePack et l’américain LimeLoop sont aussi engagés dans la voie des paquets réutilisables mais cautionnés.
De quoi motiver l’ensemble de la chaîne de l’e-commerce à trouver des solutions tous azimuts. Chez RAJA, groupe français notamment distributeur leader du secteur des emballages, on est au taquet sur ces questions. Bart Lambrecht, directeur marketing de la filiale belge (basée à Tongres), décoche illico un chiffre interpellant: “Des études ont établi qu’un paquet tombe en moyenne 17 fois au cours de sa séquence manutention/envoi/transport et parfois retour. C’est énorme! Le défi central est donc pour les producteurs et distributeurs d’emballages (comme RAJA et ses 28.000 clients en Belgique) qu’un colis garde un aspect attrayant et rassurant tout en protégeant au maximum l’objet qu’il contient. Toutes les réflexions et innovations poursuivent aujourd’hui cet objectif en y intégrant la dimension écologique tant dans le choix des matériaux utilisés que dans l’éventail de tailles d’emballages ( il en existerait jusqu’à 1.250, Ndlr) collant au plus près aux gabarits du produit. Moins de volumes, c’est moins de transport et donc moins de pollution”.
Ajuster la taille et réduire les “vides”
En effet, les concepteurs s’efforcent aujourd’hui de tourner définitivement la page des caisses surdimensionnées qui obligent à combler d’importants volumes avec “de l’air” sous forme de ballonnets, films plastiques à bulles ou autres (les colis français montreraient encore en moyenne 43% de vide). “Heureusement, la tendance à concevoir et utiliser un emballage adapté en taille au produit que l’on envoie s’impose de plus en plus, confirme le manager marketing de RAJA Belgique. Notre gamme d’emballages (50% de notre chiffre d’affaires) s’est fort élargie et compte aujourd’hui quelque 4.000 références. L’autre réalité induite par l’e-commerce est la possibilité donnée au client de retourner ses produits. Beaucoup de caisses et emballages postaux sont donc désormais munis d’une fermeture ‘retour’ pour renvoi immédiat de l’article.”
De son côté, l’amélioration de la solidité des emballages se focalise aujourd’hui sur “la résistance aux ‘accidents’ de parcours, poursuit Bart Lambrecht. Un effort majeur porte sur les coins des caisses et boîtes qui doivent à la fois être très résistants et former des zones d’absorption de chocs. Cela passe par le choix d’épaisseurs de renfort de carton ondulé à simple, double voire triple cannelure”. Mais également à l’intérieur des emballages rigides où subsiste toujours un certain vide à combler. Le matériau de remplissage sert alors tant à caler le produit qu’à l’isoler des chocs extérieurs. “La dimension écologique intervient aussi ici puisqu’on remarque l’arrivée de carton gaufré (à la place du plastique) mais surtout un retour marquant du papier pour bourrer le vide restant, caler et protéger l’article. Comme le carton, le papier est une matière dont les déchets sont les plus faciles à recycler. Enfin, si un e-commerçant préfère quand même utiliser des films à bulles ou autres solutions plastiques, elles sont désormais facilement recyclables ou biodégradables car fabriquées à partir de végétaux comme le maïs”, analyse notre expert.
“Les Rescapés” de Veepee
Spécialisée dans les ventes flash d’invendus de grandes marques de vêtements, de mobilier, décoration ou d’électro domestique, la plateforme Veepee s’est récemment penchée sur la question: que faire des colis à l’emballage abîmé à une étape ou l’autre de leur(s) périple(s) mais dont les articles sont revenus intacts? Sa réponse s’appelle depuis septembre “Les Rescapés”, une vente flash à prix ultra- cassés pour éviter “de jeter les articles et encore moins de les détruire juste parce que leur emballage a été endommagé”, justifie Tobias Tousseyn, le country manager Benelux de Veepee. Arnaud Kervyn, son head of supplier development, détaille: “Avant notre offre ‘Rescapés/Survivor’, on ne pouvait pas revendre ces produits. Maintenant, ils bénéficient d’une deuxième chance qui leur évite la destruction ou de finir chez des marchands de fripes ou autres. C’est une vente flash spécifique de quelques jours qui s’ajoute à notre quinzaine d’autres ventes flashs plus classiques. La première salve de ‘Rescapés’ a eu lieu début octobre et quasi 100% des 3.000 produits (essentiellement déco et lifestyle) proposés avec une ristourne jusqu’à -75% ont trouvé acquéreurs. La formule va devenir régulière et s’étendre au Benelux”.
Forte de ses 7 millions de membres en zone Benelux et de ses 8 millions de pièces vendues en 2020, la plateforme Veepee se démarque aussi par sa politique d’envois payants. “En effet, explique Arnaud Kervyn, nous sommes conscients de notre rôle à jouer pour rendre l’économie plus circulaire. Depuis sa création, notre plateforme s’efforce de limiter au maximum les envois. Donc nos clients paient pour recevoir un colis (4 euros) mais aussi s’ils veulent le renvoyer (2 euros). Cela incite à une consommation plus responsable, des achats raisonnés et à réfréner les allers-retours de produits, moments les plus délicats pour l’emballage. Ce dernier occupe à présent une place énorme dans l’équation e-commerce car il influence la compétitivité de ses acteurs.”
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