Que pèse vraiment le football belge?
Une nouvelle étude du cabinet Deloitte s’est penchée sur l’impact économique de la Pro League, l’association qui regroupe les 24 clubs professionnels des championnats belges de divisions 1A et 1B. Gros plan sur les principaux enseignements.
En passant de Chelsea au Real Madrid pour la coquette somme de 100 millions d’euros (sans parler des bonus), Eden Hazard est devenu le joueur le plus cher de l’histoire du football belge. Bizarrement, son transfert ne concerne pas uniquement ces deux clubs de prestige puisque la transaction financière aura également un impact dans le Brabant wallon. Le règlement de la Fédération internationale de football impose en effet que les clubs formateurs soient rétribués via un ” mécanisme de solidarité “, histoire de récompenser les structures qui ont permis l’éclosion de jeunes talents entre 12 et 23 ans. Dans le cas d’Eden Hazard, l’AFC Tubize, le LOSC Lille et même Chelsea vont donc se partager 5% du montant déboursé par le Real Madrid, selon des critères précis qui prennent en compte l’âge du joueur et le temps passé dans ces clubs formateurs. Concrètement, l’AFC Tubize – relégué en Division 1 amateurs (la troisième division) – devrait donc engranger pas loin d’un million d’euros avec ce transfert record, ce qui renflouera assurément les caisses d’un club en situation difficile.
Des revenus en hausse
Plus ou moins spectaculaires, les montants déboursés chaque année au moment des transferts représentent une importante source de revenus pour les 24 clubs professionnels belges réunis au sein de la Pro League (championnats de divisions 1A et 1B). Ce constat ressort aussi de la toute nouvelle étude du cabinet Deloitte dédiée à ” l’impact socio-économique de la Pro League sur l’économie belge ” qui en est à sa deuxième édition. S’attardant cette fois sur les derniers chiffres disponibles de la saison 2017-2018, ce rapport de 54 pages décortique les mécanismes financiers qui font tourner la machine du football en Belgique, tout en évaluant les retombées dans le paysage économique.
Deloitte affirme que 3.710 nouveaux jobs ont été créés grâce à l’activité des clubs professionnels durant la saison 2017-2018.
Premier enseignement de l’étude réalisée par Deloitte : le chiffre d’affaires généré par les 24 clubs professionnels en Belgique pèse 321 millions d’euros, soit une augmentation de 3% par rapport à la saison 2016/2017. La principale source de revenus provient de la billetterie – un match de la Pro League attire en moyenne 10.000 spectateurs – soit 92,5 millions d’euros, suivi des droits télé (quasi 81 millions), du sponsoring et de la publicité dans les stades (68,2 millions), des diverses recettes commerciales (merchandising, repas, boissons, etc.) pour 48,2 millions et, enfin, des primes données par l’UEFA lorsque des clubs se qualifient pour une grande compétition européenne comme la Champions League ou l’Europa League et passent un ou plusieurs tours (31,2 millions pour la saison 2017-2018).
A côté de ces revenus plutôt stables, les clubs belges bénéficient aussi de cet autre apport financier – cette fois beaucoup plus variable – que sont les transferts de joueurs. Chaque année, des footballeurs belges sont vendus et achetés, en Belgique et à l’étranger, et les différents clubs doivent donc composer de manière subtile pour que la balance de ces transferts affiche un résultat positif. Pour la saison 2017-2018, ces revenus étaient de l’ordre de 73,3 millions, soit un recul de quasi 25% par rapport à la saison précédente qui affichait une plus- value de 97,1 millions.
Près d’un milliard injecté
Au total, les revenus des 24 clubs de divisions 1A et 1B – chiffre d’affaires et transferts – flirtent donc avec les 400 millions d’euros pour la saison 2017-2018. En ajoutant à ce montant les revenus propres de la Pro League, le cabinet Deloitte en arrive à évaluer l’impact direct du football professionnel belge à 529 millions. Mais la société de conseil va plus loin dans son analyse et complète le tableau avec deux autres données. D’une part, l’impact considéré comme indirect -la production émanant du reste de la chaîne de valeur à travers, notamment, les fournisseurs et le secteur horeca – et, d’autre part, l’impact défini comme induit – les dépenses des employés et des joueurs dans le paysage économique – dont Deloitte chiffre respectivement les montants à 263 millions et 151 millions d’euros. En embrassant cette vue d’ensemble, le cabinet international évalue la production brute totale de la Pro League en Belgique à près d’un milliard d’euros en 2017-2018 – 943 millions pour être précis – contre 935 millions pour la saison précédente.
Considérable, le poids du football dans l’économie belge s’évalue aussi en termes d’emplois. Dans sa dernière étude, Deloitte affirme que 3.710 nouveaux jobs ont ainsi été créés grâce à l’activité des clubs professionnels durant la saison 2017-2018, soit une augmentation de 15% par rapport à l’exercice précédent. Si les joueurs occupent une bonne partie de ces emplois (44%), ils ne sont toutefois pas majoritaires puisque 56% des jobs sont attribués aux autres employés des clubs pour remplir diverses tâches connexes à l’activité sportive.
Un salaire moyen de 211.000 euros
Au niveau budgétaire, les salaires de ces joueurs représentent en revanche le poste principal des dépenses pour les clubs de football professionnel. Evalué à 214 millions d’euros pour la saison 2017-2018, le montant total des coûts salariaux n’a fait qu’augmenter ces dernières années et fixe désormais le ratio salaires/revenus à 56% pour la période étudiée contre 51,2% deux ans plus tôt. Pour les deux divisions 1A et 1B, le salaire annuel brut moyen d’un joueur professionnel gravite autour des 211.000 euros, mais ce montant augmente de plus de 50% si l’on se focalise sur les clubs du G5, à savoir les équipes qui ont obtenu les meilleurs résultats sportifs au cours des cinq dernières saisons (Anderlecht, Bruges, Genk, La Gantoise et le Standard). Dans ces clubs situés en haut de classement, le salaire annuel brut moyen passe en effet à 323.000 euros alors qu’il retombe à 187.000 euros pour les joueurs qui évoluent dans les 11 autres équipes de D1A.
Moins importantes mais néanmoins révélatrices des pratiques en vigueur, les sommes déboursées par les équipes pour rétribuer les agents de joueurs se chiffrent, pour la saison 2017-2018, à 37 millions d’euros, soit environ 10% des revenus des clubs professionnels. Si 245 agents de joueurs étaient répertoriés par l’Union belge de football durant cette période, l’étude Deloitte révèle en revanche que le ” top 5 ” de ces agents a engrangé, à lui seul, plus du tiers de ces commissions (12,5 millions), soit une moyenne de 2,5 millions de revenus pour chacun de ces cinq super-agents !
Une vraie valeur ajoutée
Si de grosses sommes d’argent sont injectées chaque année dans le monde du football, qu’en est-il au final de la réelle contribution de la Pro League à notre économie ? Selon les calculs savants de Deloitte, la valeur ajoutée du football belge était, pour la saison 2017-2018, de l’ordre de 615 millions d’euros, contre 669 millions un an plus tôt, soit une baisse de 9% due principalement à des résultats de transferts plus décevants pour la période analysée.
Comme toutes les organisations actives en Belgique, les 24 clubs de la Pro League contribuent aux finances de l’Etat par le biais de l’impôt sur les sociétés (3,7 millions), de l’impôt sur les salaires (34,5 millions), des cotisations sociales (23,8 millions) et de la TVA (14,9 millions), ce qui représente un montant total de 77 millions versés dans les caisses publiques.
” L’année dernière, les clubs de football professionnel belges ont apporté une valeur ajoutée importante à l’économie belge, conclut Sam Sluismans, associé chez Deloitte Belgique. Ils ont créé 15% d’emplois en plus et, malgré une année mouvementée, il n’existe aucun doute que le football belge ait toujours un impact socio-économique pour notre société .” Et on ne vous parle même pas de l’impact d’Eden Hazard sur la vente des nouveaux maillots du Real Madrid…
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