Quand Nutella croque Kellogg: le groupe italien Ferrero s’offre les céréales américaines pour 3,1 milliards

Frederic Brebant
Frederic Brebant Journaliste Trends-Tendances 

Le groupe italien Ferrero met un sacré paquet d’argent sur la table pour racheter WK Kellogg, le spécialiste américain des céréales pour petit-déjeuner. Une nouvelle étape cruciale dans la bataille des géants de l’agroalimentaire où les frontières entre snacks et céréales se brouillent de plus en plus.

Le petit-déjeuner n’est plus une affaire de routine, c’est désormais un terrain stratégique. Ferrero, le fabricant italien de Nutella, Kinder et Crunch, a annoncé hier le rachat de l’américain WK Kellogg pour un montant de 3,1 milliards de dollars, dette comprise. Une opération 100 % cash qui permet au groupe piémontais de s’emparer de marques emblématiques du petit-déjeuner nord-américain comme les célèbres Corn Flakes, Rice Krispies ou encore Froot Loops.

La transaction valorise l’action de WK Kellogg à 23 dollars, soit une prime de 31 % sur le cours de clôture de mercredi et de 40 % par rapport au cours moyen des 30 derniers jours.

Approuvée à l’unanimité par les conseils d’administration, l’opération doit encore recevoir le feu vert des actionnaires et des autorités de la concurrence, mais elle devrait être finalisée d’ici la fin de l’année. Le groupe américain WK Kellogg deviendra alors une filiale à part entière de Ferrero qui détient aussi plusieurs marques de confiserie dont le célèbre Tic Tac, ainsi que le fameux Rocher en chocolat tant apprécié des soirées de l’ambassadeur.

Une offensive méthodique

L’appétit de Ferrero pour le marché américain ne date pas d’hier. Après l’acquisition, en 2018, des activités de confiserie de Nestlé aux États-Unis pour 2,8 milliards de dollars, le groupe italien poursuit sa stratégie de croissance externe. Avec cette nouvelle opération, Ferrero renforce significativement sa présence en Amérique du Nord où il emploie déjà plus de 14.000 personnes dans 22 usines.

En intégrant WK Kellogg, Ferrero met donc la main sur une nouvelle capacité de production, un réseau de distribution et un portefeuille de marques qui lui permettront de couvrir davantage de moments de consommation, au-delà du segment sucré. ‘‘L’objectif est clair : élargir notre offre sur le marché nord-américain avec des produits complémentaires’’, souligne le groupe dans son communiqué.

Des céréales en perte de vitesse

Ce rachat intervient toutefois dans un contexte tendu pour le marché des céréales traditionnelles, en recul depuis plus d’une décennie. Critiquées pour leur teneur en sucre et en additifs, les céréales du petit-déjeuner peinent en effet à séduire les nouvelles générations, davantage tournées vers des snacks à emporter, plus pratiques et souvent perçus comme plus sains.

La maison mère historique Kellogg l’a d’ailleurs bien compris : en octobre 2023, elle a scindé ses activités en deux entités distinctes. D’un côté, WK Kellogg pour les céréales classiques ; de l’autre, Kellanova, dédiée aux snacks (Pringles, Cheez-It, Eggo…). Cette dernière fait d’ailleurs l’objet actuellement d’une tentative de rachat par un autre géant, en l’occurrence le groupe Mars (Twix, Snickers, M&M’s, etc.), prêt à débourser 36 milliards de dollars pour élargir son terrain de jeu sucré au salé.

Concentration sous surveillance

Face à la montée des coûts, à la pression sur les marges et à l’évolution des habitudes de consommation, les grands noms de l’agroalimentaire redessinent désormais leurs frontières : Ferrero, Mars, Nestlé et Mondelez misent de plus en plus sur les acquisitions pour sécuriser leurs positions sur des segments porteurs. Mais cette concentration croissante attire évidemment l’attention des autorités. La Commission européenne a d’ailleurs ouvert fin juin une enquête approfondie sur l’opération Mars-Kellanova, redoutant une réduction de la concurrence et une pression haussière sur les prix.

Dans ce paysage en recomposition, Ferrero joue donc la carte de la diversification ciblée, sans renier son ADN sucré. En absorbant WK Kellogg, le groupe italien s’offre à la fois des marques centenaires et un levier logistique stratégique. Et peut espérer demain faire rimer Rice Krispies avec Nutella.

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