Profession “sound designer”, un domaine où se distinguent des belges

Dan Klein “Nous sommes des créateurs de souvenirs.” © photos pg

Les marques mais aussi les lieux comme les boutiques, les bars, hôtels et restaurants portent une attention particulière à leur identité sonore. Un domaine où se distinguent des passionnés belges, alliant technique et créativité.

On a tendance à l’oublier mais au même titre que l’image, le son joue souvent parfois un rôle clé dans la construction de l’identité d’une marque, d’un espace: commerces, restaurants, bars, hôtels, etc. Afin de renforcer leur singularité, ceux-ci optent de plus en plus régulièrement pour la composition d’une bande-son personnalisée. Pour ce faire, ils passent souvent par de véritables professionnels, ingénieurs du son ou compositeurs qui se sont spécialisés en cette matière. Parmi eux, deux Belges: le jeune Pascal Jadot, aka Jabeau, et le plus aguerri Dan Klein.

Le premier, producteur, arrangeur, mixeur, est actif dans le monde de la musique, de la publicité et du gaming et vient d’habiller le bar Confessions, rue du Bailli à Ixelles. “Je suis musicien de formation, avec un background classique en piano et guitare. J’ai étudié au conservatoire de musique de Mons en me spécialisant dans l’application à l’image pour apprendre, entre autres, à composer des musiques de films, de pubs, etc. Ensuite, je suis parti à Londres, à l’Abbey Road Institute, pour me spécialiser dans le travail en studio avec des instruments et apprendre les rouages de la production. Je me suis lancé ensuite comme indépendant. Je compose de la musique pour moi et pour des clients qui font appel à moi afin de créer du contenu musical pour leur marque, notamment habiller leurs publications sur les réseaux sociaux. Le bar Confessions est le premier lieu que j’habille, avec une approche différente dans la mesure où j’ai travaillé sur le mariage des sens: j’ai ainsi imaginé une bande-son propre pour chaque cocktail en fonction de ses ingrédients. L’idée étant que le son amplifie les sensations liées au goût et à l’odorat.”

Les tarifs peuvent aller de 100 à 20.000 euros, selon la durée de la plage.

Bellerose et Certo

Le second, musicien, producteur, DJ, consultant, s’est depuis quelques années réorienté dans la création de bandes sonores, pour le cinéma et la télévision, mais aussi, pour des commerces (Bellerose, La maison du diamant, etc.), des hôtels, bars et restaurants. A Bruxelles, on lui doit notamment la bande-son d’adresses comme Certo, La Villa Lorraine, Variétés, Lily’s, Lola et, plus récemment, Mix. Et à l’étranger, ses collaborations vont du food court Food Society à Lyon au Jam Hotel de Lisbonne en passant par le palace marocain La Mamounia. “Je suis musicien, mais avant tout mélomane. J’ai d’abord consommé énormément de musique avant d’en créer. J’ai travaillé durant plusieurs années comme musicien, au sein du groupe Vismets, avant de commencer à composer de la musique de film. En parallèle, ma passion pour la musique m’a amené à devenir résident sur Kiosk Radio, où ma programmation a attiré l’attention de Jean-Michel André, le CEO du groupe Limited Edition Hotels. Ma collection de disques japonais l’intéressait particulièrement et il m’a proposé d’habiller musicalement un lieu d’inspiration nippone qu’il venait de concevoir avec le designer Lionel Jadot: l’Atsukan (inspiré des bains publics asiatiques). Suite à quoi, j’ai créé mon agence de conseil musical, Mustard & Bongo, et les contrats se sont enchaînés ; souvent grâce au bouche à oreille.”

Dan Klein “Nous sommes des créateurs de souvenirs.”
Dan Klein “Nous sommes des créateurs de souvenirs.” © photos pg

Un jeu d’équilibre constant

Le design sonore implique de posséder tant une culture musicale riche, tous genres et époques confondus, qu’un savoir-faire technique et une bonne dose de créativité. “Il faut être capable de comprendre les sons, savoir les produire et les marier”, confirme Jabeau. Il faut aussi se mettre au service du client, respecter ses envies et son cahier de charges. “Trois éléments doivent se rencontrer, explique Dan Kein. Il faut comprendre les attentes du client, pouvoir le guider tout en cernant son concept et son public. Ensuite, ça doit passer par le prisme, l’oreille et la culture du designer. C’est un jeu d’équilibre constant. Il m’arrive de suivre des briefings très précis, où je n’essaye pas d’aller hors du cadre. Le client ne veut pas prendre de risque, je le comprends fort bien et le respecte. Par contre, quand on me donne carte blanche et que je peux tendre vers une playlist avec des sons inattendus, qui vont à la fois surprendre et séduire le client, c’est très gratifiant.” Jabeau confirme: “Plus on nous laisse de liberté, plus on peut se montrer créatif”.

Nos deux experts ont la chance de vivre chacun de leur passion, pas toujours évidente à traduire en chiffres, entre autres en raison de la diversité des projets et des demandes. “Quand j’ai décroché mon premier contrat en qualité de designer sonore, je ne savais pas du tout comment facturer”, nous avoue Dan Klein en riant. La valeur de mesure communément utilisée, c’est le temps. “Je facture à la minute produite, précise Jabeau. Certains s’étonnent parfois des tarifs, mais ils n’imaginent pas le temps que cela demande ; une minute exige plusieurs heures de travail”. “On travaille vraiment au cas par cas. Cela peut aller de 100 à 20.000 euros selon la durée de la plage, poursuit Dan Klein. Le plus chronophage, c’est la création de l’identité de base.” Et une fois la bande-son créée, il faut encore souvent l’updater. “Créer le sound design d’un lieu exige une playlist de plusieurs heures: 8 heures, 12 heures et parfois plus. Dans le cas d’un lobby d’hôtel par exemple, c’est jusqu’à 24 heures. Pour éviter des redondances, je propose une playlist beaucoup plus longue, voire le double, que je devrais en outre renouveler régulièrement, à raison de 20% chaque mois en moyenne.”

Pascal Jadot “Les gens n’imaginent pas le temps que cela demande.”
Pascal Jadot “Les gens n’imaginent pas le temps que cela demande.” © photos pg

Le métier de sound designer ne se limite en outre pas à composer des morceaux ou à créer des playlists, il exige également de sans cesse se tenir informé des nouvelles techniques, des tendances du moment, d’écouter aussi de nombreux sons différents, du monde entier. “Je passe un temps fou à écouter des musiques que je collecte et classe dans des dossiers, par thèmes, par familles… dans lesquels j’irai puiser ensuite”, commente Dan Klein, qui conclut: “Je vois le métier de sound designer comme un créateur de souvenirs. J’aime l’idée que ce que nous produisons va amplifier ou générer des émotions.”

instagram.com/jabeau, instagram.com/mustard.and.bongo.

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