La Belgique a atteint un nouveau record : 1.299.825 indépendants étaient affiliés à l’Inasti fin 2024. Mais derrière cette progression historique, un chiffre continue de stagner : seulement 36 % des indépendants sont des femmes. Une proportion stable depuis plusieurs années, malgré des hausses notables dans certaines catégories. La Ministre des Classes moyennes, des Indépendants et des PME, Éléonore Simonet (MR), dit vouloir faire de l’entrepreneuriat féminin un axe majeur de son plan PME, attendu courant 2025.
Sur les près d’1,3 million d’indépendants que compte la Belgique, 464.634 sont des femmes (36%), rapportent les derniers chiffres de l’Inasti. En un an, le nombre de femmes exerçant une activité principale a augmenté de 0,63 % (contre +0,21 % pour les hommes). En activité complémentaire, la croissance est encore plus significative : +3,75 % chez les femmes, contre +1,84 % chez les hommes. Les retraitées actives ne sont pas en reste : 40.592 femmes continuent à travailler après l’âge légal, une hausse annuelle de pas moins de 6,73 %.
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Des freins encore nombreux et structurels
Ces chiffres témoignent d’un intérêt croissant des femmes pour le statut d’indépendante, mais aussi d’un sous-développement persistant de leur présence dans l’entrepreneuriat belge. Pour expliquer cette sous-représentation, les stéréotypes de genre, le manque de confiance, et l’accès difficile au financement sont souvent cités. Selon Frank Janssen, professeur en management à l’UCLouvain qui s’exprimait récemment dans un de nos articles, « les femmes sont souvent perçues comme moins crédibles par les investisseurs, c’est un défi majeur. » Ce manque de reconnaissance pèse sur la légitimité perçue des entrepreneures. « L’entrepreneuriat est encore associé à des qualités comme la prise de risque ou l’autonomie, des traits qu’on attribue trop souvent à un profil masculin », analyse-t-il.
Autre frein souvent évoqué : le fameux « syndrome de l’imposteur », qui empêche certaines femmes de se lancer ou de valoriser leur travail. Les femmes s’empêchent elles-mêmes de réussir à cause de croyances auto-limitantes. Au quotidien, les femmes entrepreneures doivent encore aussi souvent composer avec une charge mentale plus élevée, un manque de soutien familial, et un besoin accru de flexibilité pour équilibrer vie privée et professionnelle. Autant de bâtons dans les rouées pour leurs projets d’entreprises.
Manque de visibilité et de reconnaissance
Le Baromètre de l’entrepreneuriat féminin – Édition 2025 du Réseau Diane met en lumière, de son côté, plusieurs difficultés rencontrées par les femmes indépendantes en Wallonie et à Bruxelles. Une préoccupation majeure est la baisse des revenus des femmes entrepreneures. Malgré une augmentation du nombre d’indépendantes, leurs revenus restent inférieurs à ceux de leurs homologues masculins. Cette disparité salariale persiste et constitue un frein à l’égalité économique.
Les femmes entrepreneures signalent aussi un manque de reconnaissance et de visibilité dans le monde des affaires. Elles estiment que leurs succès sont moins valorisés, ce qui peut impacter leur confiance en elles et leur motivation à entreprendre. Ces obstacles soulignent la nécessité de mettre en place des mesures spécifiques pour soutenir l’entrepreneuriat féminin, telles que des programmes de mentorat, des facilités d’accès au financement et des politiques favorisant l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle, met en avant le réseau. Le développement des réseaux féminins peut aussi les aider à faire rayonner leur business.

Un plan PME pour plus d’inclusion
Consciente de ces enjeux, la Ministre des Classes moyennes, des Indépendants et des PME Éléonore Simonet (MR) annonce vouloir faire de l’entrepreneuriat féminin un axe majeur de son plan PME. Attendu courant 2025, les détails précis de ce plan doivent encore être affinés et passer la rampe du conseil des ministres.
Dans une longue interview récente accordée à Trends Tendances, la ministre développe ses priorités sur l’entrepreunariat féminin. « Oui, il y a un plafond de verre et il y a un travail énorme à mener pour les femmes indépendantes. En 2024, 36% des indépendants sont des indépendantes. Or, à notre époque, cela ne devrait pas être plus difficile d’entreprendre parce que l’on est une femme. En tant que politique, c’est notre rôle de donner tous les moyens pour favoriser l’égalité des chances. »
Des actions sont envisagées pour aider les femmes à entreprendre. « Nous avons décidé d’une dispense des cotisations sociales supplémentaire pour le 2e trimestre pour les femmes indépendantes qui ont accouché. Je trouve cela positif, mais ne résumons pas la situation de la femme à cela. Si un jour j’ai des enfants, chacun – père et mère – sera autant concerné par l’enfant. Comment briser ce plafond de verre ? En leur donnant de la visibilité, en les soutenant via des initiatives fédérales, en initiant les mises en réseau, en améliorant les conditions de financement et en sensibilisant les banques… Il y a encore trop de biais masculins. Je serai l’alliée des femmes indépendantes. Depuis Sabine Laruelle, il y a 20 ans, il n’y avait plus eu que des hommes à ce poste », avance la ministre.