Plus de 400.000 PME incapables de résister à un nouveau choc économique
Une analyse de Graydon indique qu’une PME sur trois ne dispose plus des réserves suffisantes pour affronter un nouveau choc économique. La proportion grimpe jusqu’à 42% pour les entreprises ayant au moins un salarié.
Au 31 décembre 2021, nous croyions avoir tourné la page du Covid et nous parlions surtout des plans de relance de l’économie. Les entreprises avaient plutôt bien traversé la crise, notamment grâce aux aides publiques et au recours au chômage temporaire. Le bureau d’information financière Graydon a décortiqué les bilans 2021 des PME belges (moins de 50 personnes) et en a conclu que plus de 90% d’entre elles affichaient une situation financière saine.
Le problème, c’est que les PME ont dû puiser dans leurs réserves pour tenir le cap et que l’année 2022 a amené un nouveau choc, avec l’explosion des coûts énergétiques et, par ricochet, une inflation généralisée et une poussée à la hausse des salaires. “Le Covid a été un choc au niveau du chiffre d’affaires, qui a pu être maîtrisé en réduisant les coûts, explique Eric van den Broele, directeur Recherche et Développement chez GraydonCreditsafe. Cette fois-ci, les chocs concernent les coûts énergétiques et salariaux. Il est beaucoup plus difficile de les maîtriser. Cela concerne toutes les entreprises, qu’elles soient en bonne santé ou pas avant.” Le constat de Graydon est implacable : un tiers de ces PME belges qui, il y a douze mois, étaient encore en bonne santé financière ne sont aujourd’hui plus en capacité de résister à ces nouveaux chocs. Cela concerne 416.000 entreprises.
La proportion d’entreprises vacillantes est encore plus élevée parmi les petits employeurs : elle atteint en effet les 42% pour les PME de 1 à 4 personnes, 39% pour les 5 à 9 salariés et 40% pour les 10 à 20 salariés. Cela confirme les menaces d’une hécatombe en ce premier semestre, comme l’indiquait il y a quelques semaines une étude de Trends Business Information sur les cessations d’activités, déjà constatées en 2022.
Comment éviter qu’un tel désastre ne se matérialise ? A court terme, l’UCM demande une accélération du paiement des aides promises pour les factures d’énergie. “Les primes pour les factures de septembre à décembre ne seront payées qu’en février ou mars, déplore Arnaud Deplae, administrateur-délégué de l’UCM. Ce délai peut paraître très long quand votre entreprise est en difficulté.” Pour les coûts salariaux (+14,7% pour la période 2002-23, selon l’Unizo), c’est évidemment la question de l’indexation automatique qui revient sur la table. Pour les représentants des PME, il semble clair que la majeure partie de leurs membres n’ont pas les moyens de payer les augmentations prévues. “Nous ne demandons pas la suppression de l’indexation mais, cette année, dans la situation que nous connaissons, on ne peut pas faire autrement que de mettre notre système au congélateur “, dit Danny Van Assche, directeur général de l’Unizo. Cette période pourrait être mise à profit pour repenser le calcul et les modalités de l’indexation automatique.
D’un point de vue plus structurel, les organisations patronales réclament un relèvement de la déductibilité des investissements économiseurs d’énergie (la porter à 45,5% comme aux Pays-Bas) ainsi qu’une simplification des procédures pour le développement de production décentralisée d’énergie. Elles aimeraient aussi que les pouvoirs publics mettent en place une organisation de gestion et de suivi de crise prenant mieux en compte les spécificités des PME, comme ce fut le cas durant la crise du Covid. “Cette crise me semble plus grave qu’en 2020, car il n’y a pas de fin prévisible, conclut Arnaud Deplae. Lors du Covid, nous pouvions tabler sur le vaccin et les traitements. Ici, nous ne voyons pas poindre d’embellie. Les prix énergétiques sont certes à la baisse mais ils demeurent bien plus élevés qu’il y a un an. Nous vivons une crise beaucoup plus structurelle par rapport à la manière dont la Belgique est organisée.“
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